Aujourd’hui, 10 octobre 2013, le monde entier célèbre la journée mondiale de la santé mentale. A cette occasion, les fins limiers de la Prospérité, Quotidien de Mont Fleuri, ont approché madame Gbandi Moke Charlotte, Conseillère sociale, travaillant au poste d’encadrement administratif de Doruma, dans le territoire de Dungu, en Province orientale, dans le cadre du projet de prise en charge psychosociale développé dans cette partie du territoire national par le Comité international de la Croix-Rouge en RDC. Depuis fin 2008, cette région a été le théâtre des violences liées à la présence de l’armée de résistance du seigneur (LRA) et aux opérations militaires lancées pour y faire face. Les rescapés et victimes de ces violences souffrent, pour la plupart, des troubles psychiques et présentent des symptômes psychosomatiques. Appelée affectueusement ‘’Maman pas-à-pas’’, madame Gbandi leur apporte un soutien psychosocial. Son travail consiste à les aider à réintégrer la société. Un travail qu’elle accomplit avec attention et amour. 

La Prospérité : Quel est votre état d’esprit ?

Charlotte Gbandi Moke : Au début, j’étais moi-même traumatisée après un entretien avec les rescapés. Ils me partageaient des histoires affreuses et inimaginables. J’ai souffert des insomnies. Pour surmonter cet état, j’ai recouru à la prière mais également, à l’équipe psychosociale du CICR qui m’apporte un appui non négligeable. Après une année d’expérience, je travaille sans inquiétude. Chaque jour, je fais face aux stress et je fournis des efforts pour les surmonter. C’est un travail que je fais avec attention et amour pour aider mes compatriotes à réintégrer la société.

La Pros : Comment parvenez-vous à persuader vos interlocuteurs ?

CGM : Les premiers contacts sont difficiles. Les rescapés refusent de vous donner leur témoignage. Certains vous demandent ce que vous allez en faire et ce qu’ils recevront en échange. Ils vous répondent avec une violence et agressivité qui vous effrayent. Ces comportements sont l’expression d’une souffrance psychologique à la suite d’un événement traumatique. Face à la réticence, je m’emploie à leur expliquer le bien-fondé de l’accompagnement psychosocial organisé par le CICR. Je les persuade que notre souci est de les aider à réintégrer facilement la société. Mais également, leurs expériences ne seront jamais divulguées. Une fois, ils réussissent cette réintégration, ils seront aptes à reprendre leurs activités quotidiennes et contribuer au développement de la région. L’exercice n’est pas facile. Il faut beaucoup de patience pour les mettre en confiance.

La Pros : Que leur dites-vous exactement ?

CGM : Au cours des entretiens, je leur explique qu’ils ne doivent pas se culpabiliser de ce qu’ils ont commis comme bévues en brousse. Ils ne l’ont pas fait de leur propre gré mais parce qu’ils ont été contraints par les rebelles. Une fois mis en confiance, les rescapés vous relatent leur expérience dans la brousse. Ils se défoulent et parviennent à sortir du carcan de la dépression. Ces entretiens sont très importants et décisifs pour un nouveau départ. Leurs histoires restent un secret professionnel et ne peuvent être divulguées.

La Pros : Comment dénichez-vous les rescapés au sein de la communauté ?

CGM : Très souvent, les rescapés ayant bénéficié de l’accompagnement psychosocial, nous oriente vers les autres rescapés non encore pris en charge. La communauté nous aide aussi.

La Pros : Est-ce facile de concilier votre vie de ménagère et de conseillère sociale ?

CGM : Puisque je réalise mon travail avec passion, je parviens à concilier ces deux casquettes. A la maison, je suis mère de famille et ménagère. Mes temps perdus, je les consacre à l’agriculture. Avant, j’entretenais un restaurant de fortune que j’ai nommé ‘’Pas-à-pas’’, mais l’activité n’est plus rentable.

Propos recueillis par Laetitia Mbuyi
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