​*Le Groupe d’experts de l’Onu  réclame  aux   Gouvernements rwandais et ougandais de procéder à l’extradition des membres congolais du M23, conformément aux mandats d’arrêt internationaux, et de mener des enquêtes sur les personnes qui ont fourni un appui au M23 à partir du Rwanda et de l’Ouganda et d’engager des poursuites contre elles.


Puis, il demande à ces deux pays voisins de la RD. Congo,  d’établir une liste actualisée des membres du M23 qui se sont réfugiés sur leur territoire  et de partager avec le Comité,  les informations dont ils disposent à cet égard, notamment des renseignements biographiques concernant des personnes  visées par les sanctions, afin de mettre à jour la liste de  sanctions.

Par ailleurs,  le Groupe d’experts de l’Onu invite le  Conseil de sécurité de proroger d’un an le mandat de la Brigade d’intervention de la MONUSCO, pour appuyer les opérations menées par les FARDC contre les groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo. Aux    Etats Membres dans la région des Grands Lacs,  il leur demande, en outre,  de donner la priorité à la mise en application de l’Initiative régionale de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, de renforcer et d’harmoniser les sanctions prévues pour le trafic d’ivoire et de coordonner les efforts menés pour identifier et démanteler les réseaux de trafic de l’ivoire.

A la CIRGL, il sollicite la création   d’une commission chargée de mener des enquêtes sur le trafic transfrontière de minerais et d’y mettre fin, conformément à la Déclaration de Lusaka de 2010, et de coopérer avec les Etats Membres,  pour harmoniser les taxes sur l’or dans la région afin de décourager la contrebande.

Quant à la RD. Congo, le Groupe d’experts dresse une série de mesures  d’urgences à prendre notamment, lancer des mandats d’arrêt et d’extradition, selon le cas, contre tous les dirigeants de groupes armés qui ont commis des violations graves du droit international humanitaire; mener des enquêtes sur les commandants des FARDC qui ont collaboré avec les FDLR et d’autres groupes armés et engager des poursuites contre eux; montrer les progrès accomplis dans la lutte contre la contrebande d’or, la légalisation du commerce de l’or dans la République démocratique du Congo et la présentation au Comité de rapports à ce sujet; examiner dans les trois mois suivant leur réception les rapports des équipes qui certifient que les mines ne contribuent pas à financer le conflit; recruter et entraîner un plus grand nombre d’agents des mines et de membres de la police minière pour superviser toutes les mines certifiées; appliquer le plan d’action conclu en octobre 2012 concernant le recrutement d’enfants et d’autres violations du droit international humanitaire, notamment les sévices commis à l’encontre d’enfants; améliorer les efforts entrepris pour négocier avec les groupes armés en nommant de petites équipes de responsables chargées spécifiquement d’un groupe armé, qui auraient pour tâche d’assurer la liaison avec les autorités locales, la MONUSCO et les organismes des Nations Unies et de coordonner les mesures prises pour amener chaque groupe à se rendre; acquérir les capacités techniques nécessaires pour pouvoir trouver plus facilement la source de tirs d’artillerie et de chars dans l’est de la République démocratique du Congo, afin de résoudre les différends entre la République démocratique du Congo et le Rwanda concernant les allégations faisant état de tirs transfrontières; permettre aux agents des douanes, à l’Office congolais de contrôle et à la Société congolaise des transports et des ports d’avoir accès aux conteneurs transportant du matériel militaire.

Rapport final du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo

Résumé

L’événement le plus important de l’année a été la défaite militaire du Mouvement rebelle du 23 mars (M23), qui s’est replié au Rwanda et en Ouganda. Le Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo a constaté les violations des droits de l’homme commises par le M23 en 2013 et confirmé que le Mouvement recevait un appui du Rwanda, qui prenait diverses formes (recrutement, renforts militaires, livraisons de munitions et appui-feu). Au moment de la rédaction du présent rapport, le Groupe avait reçu des informations crédibles selon lesquelles les dirigeants du M23 se déplaçaient librement en Ouganda et que le Mouvement continuait de recruter au Rwanda.

La victoire des forces armées congolaises (Forces armées de la République démocratique du Congo – FARDC) sur le M23, appuyées par la Brigade d’intervention de la Force sous commandement de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a envoyé un message fort à d’autres groupes armés dans l’est du pays. S’il est vrai que certains de ces groupes sont devenus plus agressifs et ont adopté des positions défensives par peur d’être attaqués par les FARDC et la Brigade d’intervention, plusieurs autres groupes armés ont commencé à se rendre et fait savoir qu’ils voulaient s’intégrer dans l’armée et la police congolaises. De nombreux groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo – en particulier, les Forces démocratiques de libération du Rwanda, les Forces démocratiques alliées et Kata Katanga – continuent de faire peser une menace sur la sécurité. Ces groupes sont responsables de graves atteintes aux droits de l’homme et de déplacements massifs de population.

De nombreux groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo se financent grâce à la production et au commerce des ressources naturelles. S’agissant de l’or, le Groupe note que de nombreux sites miniers se trouvent dans des zones sortant d’un conflit, mais que la production provenant de ces zones se confondait également avec celle des zones de conflit, notamment dans les grandes villes commerçantes à l’est du pays et dans les pays de transit tels que le Burundi, l’Ouganda et la République-Unie de Tanzanie. Le commerce de l’or manquant de transparence, il est difficile de faire la distinction entre les deux. D’après le Groupe, 98 % de l’or produit en République démocratique du Congo sort clandestinement du pays et pratiquement tout l’or échangé en Ouganda – principal pays de transit de l’or congolais – est illégalement exporté de la République démocratique du Congo. En conséquence, les Gouvernements congolais et ougandais perdent des millions de dollars par an en recettes fiscales et tolèrent un système qui finance des groupes armés en République démocratique du Congo.

Si, grâce aux initiatives de l’Organisation de coopération et de développement économiques et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, on a pu faire avancer la certification des sites miniers et améliorer le respect des normes internationales relatives aux modes de production non liées à des conflits et ne reposant pas sur le travail des enfants, les groupes armés et les FARDC continuent de contrôler nombre de sites miniers et de tirer profit de l’exploitation minière et du commerce des minéraux. En 2013, les minéraux – en particulier l’étain, le tungstène et le tantale – ont continué à sortir en contrebande de l’est de la République démocratique du Congo en passant par les pays voisins, ce qui nuit à la crédibilité et aux progrès des mécanismes internationaux de certification et de traçabilité. Le Groupe a enquêté sur l’abattage à grande échelle d’éléphants dans l’est de la République démocratique du Congo, pour l’ivoire, une activité qui finance des groupes armés et des réseaux criminels dans la région.

Conformément à son mandat, le Groupe a également recensé les violations graves du droit international humanitaire, notamment le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats, les exécutions sommaires, les violences sexuelles et les actes de violence dirigés contre des populations civiles. Bien que nombre de ces crimes aient été commis par des groupes armés, le Groupe a également constaté que les FARDC n’étaient pas en reste.

I. Introduction

1. Comme le Conseil de sécurité en a décidé au paragraphe 5 de sa résolution 2078 (2012), le Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo lui présente son rapport final par l’intermédiaire du Comité créé par la résolution 1533 (2004). Comme le Conseil l’a demandé au paragraphe 21 de sa résolution 2078 (2012), le Groupe a échangé avec le Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire des informations relatives aux ressources naturelles. Il a également tenu des consultations avec l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, le Groupe de contrôle pour la Somalie et l’Érythrée et le Groupe d’experts sur le Soudan. Pour mieux visualiser les sites cités dans le présent rapport, le Groupe d’experts a inclus des cartes à l’annexe 1.



Règles de preuve

2. Le Groupe d’experts a utilisé les normes en matière de preuve recommandées par le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les questions générales relatives aux sanctions (voir S/2006/997). Il a fondé ses conclusions sur des documents et, dans la mesure du possible, sur des observations faites directement sur les lieux par les experts eux-mêmes. À défaut, il a corroboré les informations par l’intermédiaire d’au moins trois sources indépendantes dignes de foi.



3. Etant donné la nature du conflit en République démocratique du Congo, rares sont les documents qui fournissent la preuve définitive de transferts d’armes, de recrutement, de la responsabilité du supérieur hiérarchique pour des violations graves des droits de l’homme et d’exploitation illégale des ressources naturelles. Le Groupe a donc dû recueillir le témoignage oculaire de membres des communautés locales, d’ex-combattants et d’anciens membres de groupes armés. Il a également examiné des témoignages d’expert d’agents de l’État et de militaires de la région des Grands Lacs ainsi que de fonctionnaires des Nations Unies. Il a adressé 121 demandes d’information à des gouvernements et des entreprises, et reçu des réponses plus ou moins complètes, comme indiqué à l’annexe 2. Pendant la durée du mandat, le Gouvernement rwandais n’a pas autorisé les visites officielles sur son territoire du spécialiste des questions régionales et du spécialiste des groupes armés.



II. Groupes armés congolais



Mouvement du 23 mars
4. Le Mouvement rebelle du 23 mars (M23) s’est progressivement affaibli, jusqu’à sa déroute en novembre. Les principaux facteurs qui ont contribué à la défaite du M23 sont les suivants : la division, en mars 2013, du Mouvement, qui a entraîné la fuite au Rwanda de son ancien chef, Bosco Ntaganda, et de 788 de ses alliés; le bon niveau de coordination et de collaboration entre les forces armées congolaises (FARDC) et la Brigade d’intervention, et les opérations militaires qu’elles ont menées contre le M23; et l’accroissement de la pression de la communauté internationale sur le Gouvernement rwandais, qui a entraîné une réduction de l’appui que le M23 recevait de l’intérieur du Rwanda. Le Groupe a établi que cet appui s’est poursuivi jusqu’à la fin d’octobre, notamment avec l’arrivée en août de soldats de la Force de défense rwandaise en République démocratique du Congo et la livraison de munitions en juin, juillet et août. Le Groupe a écrit au Gouvernement rwandais pour obtenir des précisions à ce sujet; au moment de la rédaction du présent rapport, il n’avait pas encore reçu de réponse. Bien que le M23 ait annoncé la fin de sa rébellion le 5 novembre, le Groupe dispose d’informations crédibles selon lesquelles le reste des troupes du Mouvement et ses alliés continuent de recruter au Rwanda.



Sources

5. En 2013, le Groupe a interrogé 71 ex-combattants et cadres politiques du M23, dont 34 avaient été recrutés en République démocratique du Congo, 23 au Rwanda et 14 en Ouganda. En mars, le Groupe en a interrogé 14 autres, qui s’étaient rendus aux autorités rwandaises. Il a également interrogé trois déserteurs et un membre

démobilisé de la Force de défense rwandaise, ainsi que des cadres politiques et des membres ou ex-combattants d’autres groupes armés ayant des informations sur le M23.



6. Le Groupe a interrogé des personnes habitant dans les zones contrôlées par le M23, en particulier des leaders de la société civile et des villageois, ainsi que des personnes déplacées. Il a également interrogé des responsables locaux dans le Nord-Kivu, des représentants du Gouvernement congolais, des membres du Mécanisme conjoint de vérification élargi et des fonctionnaires des Nations Unies. Il a examiné la question du M23 à l’occasion de deux visites officielles au Rwanda et de trois visites officielles en Ouganda. Il a adressé à des gouvernements et à des entreprises 13 demandes d’information concernant le M23. Il a également pris et obtenu des photos des positions du M23, fait des observations sur le terrain dans les zones contrôlées par le M23 et à proximité, examiné des rapports établis par des organismes des Nations Unies et le Mécanisme conjoint de vérification élargi, et analysé des documents retrouvés dans les positions auparavant tenues par le M23, après sa défaite.



Le début de la fin



7. Après la bataille de Mutaho en mai (voir S/2013/433, encadré du paragraphe 43), il y a eu relativement peu de combats en juin et au début de juillet. Les FARDC et le M23 ont mis ces mois à profit pour renforcer leurs positions. En juin et en juillet, la Brigade d’intervention a continué de se déployer autour de Goma et Sake.



8. Les combats ont repris à la mi-juillet. À la fin du mois d’août, le M23 a perdu du terrain et des hommes, et connu une baisse de moral à la suite des combats avec les FARDC, la Brigade d’intervention et des groupes armés à Rutshuru. Le 14 juillet, le M23 a attaqué les FARDC pour déloger les forces armées de la colline de Mutaho et de la région de Kanyarucinya, au nord de Goma. Après trois jours de combats intenses, les FARDC, à l’aide de trois hélicoptères d’attaque, ont repoussé le M23 et reconquis du terrain, y compris des positions stratégiques au nord de

Munigi. Le 24 juillet, les FARDC ont utilisé des hélicoptères pour attaquer les positions du M23 dans la région des Lignes de cavalerie, à Rumangabo, à 35 kilomètres au nord de Goma. Des obus tirés d’un hélicoptère des FARDC sont tombés dans une zone civile, faisant au moins sept blessés.



9. Le 21 août, les combats ont repris à Kibati, à environ 15 kilomètres au nord de Goma. À partir du 22 août, de nombreux obus tirés des lignes de front sont tombés dans des zones civiles au Rwanda et en République démocratique du Congo (voir encadré 1). Entre les 22 et 24 août, la Brigade d’intervention a mis son artillerie et

ses hélicoptères à la disposition des troupes terrestres des FARDC dans les combats intenses qui ont eu lieu à Kibati. Entre les 24 et 27 août, les combats ont diminué d’intensité. Le M23 a perdu du matériel et des cadres supérieurs; au moins 17 officiers ont été tués à ce moment-là.



10. Le 28 août, les FARDC et la Brigade d’intervention ont utilisé des chars, des véhicules blindés de transport de troupes, des hélicoptères d’attaque, des mortiers et des troupes terrestres pour attaquer les positions du M23 le long de la ligne de front de Kibati. Le M23, grâce à son arsenal complet (notamment des armes antichar), a résisté de toutes ses forces, causant la mort de deux officiers tanzaniens de la Brigade d’intervention. Le 28 août, le M23 a tiré des obus en direction de Goma, faisant plusieurs blessés (voir encadré 1), et de la base de la MONUSCO, à Munigi, blessant quatre soldats de la paix, dont deux sud-africains et deux tanzaniens. Le 30 août, les FARDC ont réussi à prendre la colline des Trois tours, à Kibati, obligeant le M23 à battre retraite vers le nord, vers Kibumba et Kanyamahoro (voir annexe 3). Cette victoire a mis Goma hors de portée des tirs d’artillerie du M23. Après le 30 août, il n’y a pas eu d’autres bombardements à Goma ou au Rwanda (voir encadré 1).



11. Huit ex-combattants du M23 ont dit au Groupe que les soldats blessés étaient transportés à Rumangabo ou Tshanzu. D’anciens combattants lui ont également dit que des soldats rwandais, morts ou blessés, étaient ramenés au Rwanda pour y être enterrés ou soignés.



12. A  la suite des victoires remportées par les FARDC sur le M23, la pression de la communauté internationale a conduit à la suspension des hostilités et à la reprise des négociations à Kampala, le 10 septembre. Les 16, 21, 23 et 25 septembre, il y a eu des escarmouches entre les FARDC et le M23 le long de la ligne de front, mais, en général, la situation est restée calme pendant les négociations. Le 21 septembre, le M23 a renforcé sa position autour de Kibumba et Kahunga. Des habitants de Kiwanja et des sources des Nations Unies ont signalé au Groupe de nombreux incidents de pillage, d’agressions, d’enlèvements et d’arrestations arbitraires commis par les troupes du M23 dans les zones sous leur contrôle, en recul.

Bombardement de la République démocratique du Congo et du Rwanda



D’après le Gouvernement rwandais et des sources des Nations Unies, entre les 22 et 30 août, au moins 43 obus tirés des lignes de front de la République démocratique du Congo seraient tombés dans des zones civiles dans ce pays et au Rwanda. Il y a eu deux morts et 13 blessés en République démocratique du Congo et un mort et trois blessés au

Rwanda. D’autres obus tirés par le M23 ont fait des victimes dans les camps et les positions de l’ONU (voir par. 150). Dans un rapport daté du 1er octobre que le Mécanisme conjoint de vérification élargi a établi sur les  bombardements ayant eu lieu en août au Rwanda et à Goma, il est indiqué que, sur les sites où l’on pouvait

établir la direction des tirs, ceux-ci provenaient à 80 % de la zone de combat de Kibati et Kibumba, où le M23 était positionné pendant les  combats. Compte tenu des sites touchés au Rwanda et à Goma, le Mécanisme conjoint a conclu que bien que des objectifs militaires n’aient pas été ciblés, le bombardement a été délibéré (voir annexe 4).

Le 30 septembre, en réponse à une demande d’information du Groupe, le Gouvernement rwandais a fourni une liste de 36 localités d’où, entre les 22 et 29 août, des tirs d’artillerie, de mortier et des obus de char provenant de la République démocratique du Congo sont tombés en territoire rwandais. D’après lui, sept obus ont été tirés par des mortiers, neuf par des chars, 18 par des canons ou des obusiers, un par un lance-roquettes et un par un engin non identifié. Sur ces 36 obus, 27 ont explosé.



A  l’exception de deux obus, tous les autres ont touché des champs, des pierres ou des arbres, un obus a atterri dans un village au Kivu, faisant un blessé, et un autre dans un village à Ihumure, causant la mort d’une femme et blessant gravement son enfant. Le Gouvernement rwandais soutient que certains des obus tombés au Rwanda ont été tirés par les FARDC et a donc menacé d’intervenir en République démocratique du Congo; toutefois, des sources militaires de la MONUSCO et un ancien soldat de la Force de défense rwandaise ont dit au Groupe que le M23 était à  l’origine d’une partie ou de la totalité des tirs. Entre les 22 et 30 août, sept obus sont tombés en territoire congolais,  au sud des lignes de front allant jusqu’à Goma. Ces obus, qui, d’après des militaires de la MONUSCO et des sources congolaises, auraient été tirés par le M23, sont tombés dans des zones civiles, à Goma, en particulier près de camps abritant des personnes déplacées, à la périphérie de la ville. Ils ont détruit une école et plusieurs maisons à Goma (voir annexe 5), ainsi que deux ambulances, deux véhicules blindés de transport de troupes et deux autres véhicules de l’ONU, et le domicile d’un fonctionnaire de la MONUSCO.



A  l’issue de son enquête sur le bombardement de Goma, le personnel du Centre de coordination de la lutte antimines des Nations Unies a conclu que le M23 avait probablement tiré les obus à partir de sa position de Kibati (voir annexe 6).



Echec

13. La fin du M23 est venue rapidement après la rupture des négociations qui se sont tenues à Kampala, le 21 octobre. Au cours de l’accalmie qui a eu lieu entre le début de septembre et la fin d’octobre, toutes les parties ont renforcé leurs positions et se sont préparées au combat. Le M23 a profité des négociations pour déployer des armes lourdes, y compris des canons. Le 18 octobre, le M23 a empêché une délégation du Mécanisme conjoint de vérification élargi de se rendre à Tshanzu pour examiner un de ses dépôts d’armes (voir annexe 7). Toujours le 18 octobre, près de Kanyamahoro, le M23 a tiré sur deux hélicoptères sud-africains de la Brigade d’intervention, sans les atteindre.



14. Tôt dans la matinée du 25 octobre, le M23 a attaqué deux positions des FARDC à Kanyamahoro. Il a été repoussé par les FARDC, qui ont alors pris l’offensive. Certaines des positions du M23 étant stratégiquement situées près de lafrontière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, notamment à Kabuye et au Mont Hehu (voir annexe 8), il était difficile pour les FARDC de tirer sans viser le Rwanda. Du 25 au 27 octobre, le M23 a reçu un appui-feu des chars de la Force de défense rwandaise, à la frontière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, à Kabuhanga et Kabuye (voir ci-dessous).



15. Au cours des derniers combats, des groupes armés opérant à Rutshuru ont attaqué des positions du M23 (voir annexe 9). Au 28 octobre, les FARDC avaient rapidement avancé et repoussé le M23 dans ses bastions à Tshanzu et Runyoni, près de la frontière avec l’Ouganda et le Rwanda. Le M23 a détruit un char T-55 des FARDC pendant qu’il se retirait de Kibumba (voir annexe 10). Le 30 octobre, les FARDC ont pris Bunagana, à la frontière avec l’Ouganda, où se trouvait le siège politique du M23.



16. Quand le 4 novembre, le M23 a délibérément bombardé des zones civiles à Bunagana, la Brigade d’intervention a bombardé Tshanzu au moyen d’hélicoptères d’attaque. Les FARDC ont maintenu la pression, au moyen d’armes lourdes et d’obus de chars, et ont réussi à prendre Tshanzu et Runyoni, le 5 novembre. Le M23 a abandonné un grand stock de munitions à Tshanzu (voir annexe 11). Bien que certains éléments du M23 se soient rendus aux autorités congolaises et que d’autres se soient enfuis au Rwanda, le 5 novembre, le gros des troupes restantes, sous la direction du « général » Sultani Makenga, est entré en Ouganda (voir encadré dans l’annexe 12).



17. La victoire des FARDC sur le M23 est due à plusieurs facteurs. Premièrement, elles avaient plus d’effectifs et de puissance de frappe. Au cours de la dernière opération, elles avaient au moins 6 000 hommes, appuyés par la  Brigade d’intervention, qui comptait 400 hommes sur le terrain. Les FARDC et la Brigade se sont servis  l’hélicoptères pour la collecte d’informations, le transport et le réapprovisionnement ainsi que pour les attaques aériennes. Les FARDC ont également utilisé avec succès des chars, des armes lourdes et des mortiers. Deuxièmement, les chefs militaires des FARDC et de la MONUSCO ont fait preuve de coordination et de  collaboration dans le cadre de la planification et de l’exécution de l’opération. Troisièmement, malgré la poursuite du recrutement, le M23 a vu ses effectifs diminuer en raison du nombre de victimes et de déserteurs, et de la perte de

moral.



Reddition du M23



Les responsables des FARDC ont dit au Groupe qu’au 25 novembre, 284 soldats et policiers du M23 se sont rendus aux FARDC, à Kanyarucinya et Bweremana. Cinquante-cinq autres éléments du M23 s’étaient rendus à la  ONUSCO en octobre et en novembre.

D’après des représentants du Gouvernement congolais et des sources militaires de la MONUSCO, moins de 400 hommes du M23 seraient entrés en Ouganda. Le 19 novembre, en réponse à une demande d’information du

Groupe, le Gouvernement ougandais a dit que, le 5 novembre, 1 445 combattants du M23 étaient entrés en Ouganda et que le « colonel » Innocent Kaina se trouvait parmi eux. Il a également déclaré que les combattants du M23  avaient rendu leurs armes (voir annexe 13). Les 13 et 14 novembre, les autorités ougandaises ont pris les ex- combattants qui se trouvaient à Kisoro pour les emmener à Hima, dans le district de Kasese. Le Groupe a demandé au Gouvernement ougandais de lui fournir une liste de ces combattants et des précisions sur leur statut, mais n’avait

pas encore reçu de réponse au moment de la rédaction du présent rapport.



Recrutement



18. Le Groupe d’experts a interrogé 71 ex-combattants du M23 qui s’étaient rendus au cours de 2013 et avaient fourni des informations sur leur recrutement en 2012 et 2013 dans la République démocratique du Congo, au Rwanda et en Ouganda. Ils avaient été recrutés de force dans les rangs du M23 après avoir été séduits par des promesses d’emploi fallacieuses et s’être portés volontaires. Ils ont déclaré qu’ils avaient été placés en groupes d’environ 80 personnes, en particulier au camp d’entraînement de Rumangabo, où le chef instructeur était, selon leur dires, le commandant Magido. Le Groupe d’experts a obtenu des copies de cahiers utilisés pour la formation des recrues du M23 (voir annexe 14). Il ressort d’un document daté du 4 juillet 2013 reçu par le Groupe que le M23 avait alloué des fonds pour le recrutement et le transport des recrues (voir annexe 15).



République démocratique du Congo



19. Le Groupe d’experts a interrogé 34 citoyens congolais, dont 1 femme et 2 garçons âgés de 15 et 16 ans qui soit avaient été forcés de se joindre au M23, soit s’y étaient joints de leur propre gré. À la fin du mois de juillet, des sources de l’ONU ont signalé que le M23 recrutait de force des civils – abattant ceux qui résistaient – dans les villages de Bushama et de Rutovu (Kibumba). Le Groupe a obtenu un reçu daté du 2 novembre 2012, indiquant que 750 dollars avaient été versés à Kevin Bitabwa, cadre politique du M23, pour l’aide qu’il apportait dans le recrutement de cadres destinés au M23 à Goma (voir annexe 16).



Rwanda



20. Le Groupe d’experts a interrogé 23 personnes venant du Rwanda, dont 18 citoyens rwandais et 5 Congolais habitant au Rwanda, qui avaient servi dans les rangs du M23. Il a également interrogé 31 ex-combattants du Burundi, de la République démocratique du Congo et de l’Ouganda, qui ont déclaré que des citoyens rwandais ou des réfugiés congolais du Rwanda avaient servi avec eux dans le M23. Entre le 1er janvier et le 8 décembre 2013, la MONUSCO a rapatrié 78 citoyens rwandais qui avaient servi dans le M23.



21. Parmi les 23 recrues du Rwanda, 18 étaient des adultes et 5 des enfants qui étaient entrés dans les rangs du M23 de diverses façons. Le Groupe d’experts a interrogé trois citoyens rwandais, dont un garçon âgé de 16 ans, qui avaient été contraints de se joindre au M23. Il a également interrogé 13 autres citoyens rwandais, dont des garçons âgés de 13, 15 et 17 ans, qui avaient été recrutés par le M23, soit en tant que volontaires ou sur la base de promesses d’emploi fallacieuses.

Le Groupe a interrogé un soldat des Forces spéciales de l’armée rwandaise (FDR) déployé à la frontière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo en août 2013, au cours d’un déploiement des FDR dans la République démocratique du Congo à l’appui du M23, et avait déserté par la suite. Il a également interrogé cinq citoyens congolais recrutés au Rwanda, dont un garçon de 17 ans.



22. Le Groupe d’experts a confirmé que certaines des recrues du M23 venant du Rwanda étaient des soldats démobilisés de l’armée rwandaise (voir S/2013/433, par. 40 à 43). D’anciens officiers et soldats du M23 lui ont déclaré que des soldats démobilisés des FDR avaient servi dans le M23 en tant qu’instructeurs et spécialistes du maniement des armes lourdes. Quatre ex-combattants du M23 lui ont déclaré que le commandant Kalissa Rwema, ancien officier des FDR, avait servi comme instructeur dans le M23 à Rumangabo. Des sources de l’ONU et deux

anciens officiers du M23 ont déclaré qu’un ancien soldat de l’armée rwandaise, connu uniquement sous son surnom, « Kifaru », faisait partie de l’équipage du char T-55 utilisé par le M23 dans les combats (voir S/2013/433, annexe 5).

23. Dans son rapport à mi-parcours, le Groupe d’experts a noté que les Rwandais qui avaient tenté de quitter le M23 et de retourner directement au Rwanda avaient été réintégrés de force au M23 par des officiers de l’armée rwandaise (S/2013/433, par. 38). Deux officiers des FDR qui avaient déserté, un officier démobilisé des FDR, un ancien officier du M23 et un agent de recrutement rwandais du M23 ont déclaré au Groupe que les officiers des FDR avaient également recruté pour le M23 et facilité le recrutement par des agents du M23 en leur assurant le libre passage au Rwanda.



24. Le M23 a versé 750 dollars à Emmanuel Ngabo pour l’aider à recruter des cadres pour le M23 à Gisenyi (Rwanda) (voir annexe 16). Gaspard Karemera, nommé administrateur du territoire de Nyaragongo par le M23, s’est également rendu au Rwanda pour y recruter et faciliter le passage des recrues au poste frontière de Kabuhanga. Après la défaite du M23 en novembre, les responsables de la MONUSCO ont fait savoir au Groupe qu’ils avaient trouvé des cartes d’identité nationales rwandaises sur les lieux d’anciennes positions du M23 à Rumangabo (voir annexe 17). Les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) ont également trouvé des cartes de ce type. Le Groupe enquête sur les informations selon lesquelles des opérations de recrutement auraient continué au Rwanda après la défaite du M23.



Ouganda



25. Le Groupe a interrogé 14 hommes recrutés en Ouganda après avoir accepté de fausses offres d’emploi. Treize d’entre eux étaient des ressortissants ougandais, et le quatorzième un Burundais. Entre le 1er janvier et le 8 décembre 2013, la MONUSCO a rapatrié 23 Ougandais qui avaient servi dans le M23.



 26. Le M23 a maintenu à Kampala un réseau de recrutement promettant aux hommes des emplois lucratifs en tant que gardes de sécurité à l’ONU ou auprès de sociétés de prospection pétrolière dans la République démocratique du Congo, ou des emplois de chauffeurs ou de mécaniciens. Des ex-combattants ont identifié « Mufuruki » (S/2013/433, par. 39), « Grace », « Emmanuel » et « Agnes » comme étant les principaux agents de recrutement en Ouganda. Plusieurs hommes recrutés sur la base de telles promesses l’avaient précédemment exercé les fonctions d’agent de sécurité dans des installations des États-Unis en Iraq, et avaient été recrutés spécifiquement parce qu’ils avaient une formation militaire de base.



27. Les agents de recrutement constituaient des groupes de 10 à 15 hommes qui avaient accepté des offres d’emploi et les accompagnaient dans un autobus allant de Kampala à Kisoro, à proximité de la frontière de la République démocratique du Congo, où ils les confiaient à un officier du M23, un certain Kazungu, qui leur faisait passer la frontière (voir S/2013/433, par. 39). À Bunagana, des membres du M23 prenaient leurs pièces d’identité, leurs téléphones et leur argent avant de les envoyer au camp d’entraînement de Rumangabo. Le Groupe d’experts a interrogé trois hommes qui avaient servi en Iraq, dont l’un a déclaré qu’avec trois autres vétérans de l’Iraq, il avait initialement résisté et demandé à retourner en Ouganda, mais qu’ils avaient cédé après avoir été menacés avec une arme à feu.



Appui provenant du territoire rwandais



28. Le Groupe d’experts a établi que le M23 a continué à recevoir un appui en provenance du Rwanda, le plus fréquemment sous la forme d’activités de recrutement, ainsi qu’il est indiqué plus haut, et d’approvisionnement en armes et munitions, en particulier au cours des périodes de combat. Le M23 a également reçu des renforts directs de soldats rwandais en août. Au cours des combats en octobre, des chars rwandais ont tiré en direction de la République démocratique du Congo, à l’appui du M23.



29. En août, des soldats des FDR ont pénétré brièvement dans la République démocratique du Congo pour rejoindre le M23 et participer aux combats. Dix résidents de Kibumba et quatre ex-combattants du M23 ont déclaré au Groupe

d’experts qu’ils avaient vu ces soldats des FDR arriver au cours des combats en août, en particulier entre le 22 et le 24 août et le 27. Il est intéressant de noter que ces soldats traversaient la frontière au poste de Kabuhanga. En outre, un soldat des forces spéciales rwandaises – qui avait précédemment servi dans les FDR dans le cadre de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) (voir annexe 18) – a déclaré au Groupe qu’il était venu de Mudende en août, dans le cadre d’une opération de renfort. Alors que certains soldats des FDR rejoignaient

directement le M23, il avait pour sa part accompagné un commandant sur les flancs du volcan Karisimbi, d’où ils pouvaient surveiller la zone contrôlée par le M23 et communiquer avec les forces des FDR qui opéraient au côté du M23. L’arrivée de renforts des FDR a également été confirmée par deux autres déserteurs et un officier

démobilisé des FDR, des officiers des FARDC et des sources au sein de la MONUSCO.



30. Le Groupe d’experts a établi qu’au cours du dernier combat, des chars de l’armée rwandaise étaient présents à la frontière, tant à Kabuhanga (Rwanda) qu’à Kabuye (République démocratique du Congo). De nombreux témoins oculaires à Kabuye ont montré au Groupe l’endroit où, le 25 octobre, deux chars des FDR avaient traversé la frontière et étaient entrés à Kabuye; d’autres chars des FDR étaient en position juste de l’autre côté de la frontière, à Kabuhanga. D’après des témoignages concordants de 15 personnes déplacées de la zone frontalière à Goma et de 10 résidents locaux qui étaient restés à Kabuye le 25 octobre, les chars des FDR dans la République démocratique du Congo et au Rwanda ont dirigé leurs tirs sur des positions des FARDC. En outre, des commandants et des soldats des FARDC, un journaliste étranger sur le terrain et un diplomate ont confirmé que des chars des FDR avaient commencé à tirer à partir de la frontière à Kabuhanga et Kabuye dans l’après-midi du 25 octobre et continué jusqu’au 27 octobre. Ces tirs ont poussé la plus grande partie de la population de Kabuye et d’autres villages frontaliers à fuir vers Goma et des villages voisins au Rwanda. Le 6 novembre, le Groupe a écrit au Gouvernement rwandais pour demander des clarifications sur cet événement; mais, à la date de l’établissement du présent rapport, il n’avait pas reçu de réponse.



31. Vingt-huit ex-combattants du M23, la population locale vivant dans la République démocratique du Congo à proximité des frontières avec le Rwanda et l’Ouganda, des autorités congolaises et des sources de l’ONU ont indiqué au Groupe d’experts que le M23 avait reçu des cargaisons d’armes et de munitions qui avaient passé la frontière avec le Rwanda à Kabuhanga-Kabuye et avec l’Ouganda à Bunagana. Ces sources ont déclaré que les munitions – munitions pour fusils et pour mitraillettes, cartouches de 12,7 mm, munitions antichars et roquettes –, arrivaient généralement par camions la nuit. Six ex-combattants ont déclaré au Groupe qu’ils avaient vu des camions blancs apporter des munitions du Rwanda au poste frontière de Kabuhanga en juin, juillet et août. Plusieurs ex-combattants du M23 lui ont déclaré qu’ils avaient personnellement transporté des munitions de Kabuhanga au Rwanda, à Kibumba dans la République démocratique du Congo.



Financement

32. En 2013, le M23 a financé sa rébellion principalement en levant des impôts et en pillant la population dans la zone qu’il contrôlait, comme le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) l’avait déjà fait en 2008 (voir S/2008/773, par. 33 et 35 à 47). Trois anciens officiers du M23 ont déclaré au Groupe d’experts qu’en 2013, la plus grande partie des revenus du M23 provenaient des taxes imposées aux ménages, des taxes sur les transports, et des revenus des entreprises et de la terre (voir annexe 19). Le Groupe n’a trouvé aucun élément susceptible de lier le M23 au commerce de minerais en 2013.



33. Trois anciens officiers du M23, les autorités congolaises et des sources de l’ONU ont déclaré au Groupe d’experts que le M23 faisait payer des véhicules aux barrières de péage à Kitoboko, Nyongera, Nyamabongo, Kibati et Bunagana; il a également vu lui-même des membres du M23 qui collectaient de l’argent à de nombreux barrages routiers. D’après trois ex-combattants du M23, le tarif se situait entre 400 à 1 200 dollars, selon la cargaison. Le Groupe a également obtenu le reçu d’un paiement de 420 dollars effectué en mai par le propriétaire d’un camion (voir S/2013/433, annexe 22). En juillet, le chef des finances du M23, Erasto Bahati (voir S/2011/738, par. 310), a rédigé une note dans laquelle il se plaignait du fait que les activités des groupes maï-maï et Nyatura bloquaient la circulation à travers le territoire contrôlé par le M23, ce qui entraînait pour lui une perte de recettes fiscales (voir annexe 20).



34. Les autorités ougandaises ont déclaré au Groupe d’experts qu’en novembre 2013, l’Ouganda avait fermé la frontière de Bunagana. Des ex-combattants du M23, des résidents locaux et des observations faites par le Groupe à Bunagana ont néanmoins confirmé que de nombreux camions traversaient tous les jours la frontière à Bunagana, ce qui procurait des revenus au M23. Bunagana est restée sous le contrôle du M23 de juin 2012 jusqu’au début de novembre 2013. Au cours de la période précédente, la prise de la ville par le M23, de janvier à juin 2012, les

douanes congolaises avaient recueilli 3,5 milliards de francs congolais (3,9 millions de dollars) au poste frontière de Bunagana au titre des taxes imposées aux camions venant de l’Ouganda (voir annexe 21). Ceci donne à penser que le Gouvernement de la République démocratique du Congo a perdu environ 650 000 dollars de revenus par mois au cours de l’occupation de Bunagana par le M23.



35. Deux anciens officiers du M23 ont déclaré au Groupe d’experts que la taxe imposée aux ménages consistait soit en un paiement de 800 à 1 000 francs congolais (0,89 à 1,11 dollar) par ménage et par mois, soit en un don en nature de vivres, par les ménages résidant dans les zones contrôlées par le M23. L’un de ces officiers, qui était chargé de tenir les dossiers concernant la taxe sur les ménages a déclaré au Groupe en septembre qu’en dépit du fait que les familles ne payaient pas toutes la taxe tous les mois, les montants recueillis s’étaient chiffrés à environ 3 000 dollars par mois de novembre 2012 à août 2013. Bien que de l’argent ait été collecté au titre de diverses taxes, les ex-combattants du M23 ont déclaré au Groupe qu’ils n’avaient jamais été payés durant leur période de service. L’un d’entre eux a déclaré « qu’ils étaient soutenus par l’espoir d’être payés un jour ».



36. Le M23 pillait également les biens des populations locales et leur volaient de l’argent. Selon les dires de personnes vivant dans les zones contrôlées par le M23 et de sources de l’ONU, les combattants du M23 avaient pillé les maisons et volé les habitants, en particulier entre juillet et octobre, période au cours de laquelle le M23 s’est affaibli.



37. L’assistant du chef des finances du M23 était Castro Mberabagabo Mbera. Au cours de la rébellion du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), il était chargé des finances, notamment de la collecte des recettes perçues au poste frontière de Bunagana (voir S/2008/773, par. 21 et 36). M. Mbera vivait dans le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord où il avait de la famille.



Période de l’après-M23



38. Après la défaite du M23, le 5 novembre, de nouveaux problèmes liés à la rébellion ont surgi. Le Groupe d’experts a reçu de sources de l’ONU et des autorités congolaises des informations crédibles selon lesquelles les cadres du M23 et leurs alliés continuaient à recruter au Rwanda.



39. A  la date de la rédaction du présent rapport, aucun accord n’avait été conclu entre le M23 et le Gouvernement de la République démocratique du Congo dans le cadre des pourparlers de Kampala. Le 13 novembre, le Secrétaire permanent du M23, Serge Kambasu Ngeve, a publié un communiqué indiquant qu’il était disposé à signer un accord de paix avec le Gouvernement. Le 27 novembre, Sultani Makenga a publié un communiqué de Kampala appuyant la décision du Président du M23, Bertrand Bisimwa, de suspendre Kambasu Ngeve et Jérôme Mashagiro Nzeyi pour « indiscipline et haute trahison » (voir annexe 22).



40. Depuis la défaite du M23, plusieurs groupes armés ont commencé à se rendre, et d’autres se sont déclarés disposés à le faire également, à l’exception notable des Forces démocratiques alliées (ADF). Le 20 novembre, le commandant des FARDC, le général Didier Etumba, a lancé un appel à tous les groupes armés pour qu’ils se rendent (voir annexe 23). Au 30 novembre, environ 2 230 combattants du groupe Nduma défense du Congo (NDC), de l’Alliance pour un Congo libre et souverain (APCLS), de la Coalition des patriotes congolais (PARECO), du groupe maï-maï Hilaire Raia Mutomboki et d’autres petits groupes maï-maï se sont rendus aux FARDC dans le Nord-Kivu (à Beni, Bweramana et Kanyaruchinya) et dans le Sud-Kivu (à Nyamunyunyi). Le Gouvernement congolais a mis en place un nouveau programme de désarmement, démobilisation et réintégration, mais le Groupe d’experts est préoccupé par l’absence de clarté concernant ce programme, considérant l’échec des programmes d’intégration dans le passé (voir annexes 24 et 25, S/2009/603, par. 12, et S/2011/738, par. 278 à 331).



41. Le Groupe d’experts est également préoccupé par des informations concernant d’importantes quantités de restes explosifs de guerre dans la zone précédemment occupée par le M23, notamment l’arsenal du M23 à Tshanzu (voir annexe 11). Le Centre de coordination des Nations Unies pour le déminage évalue actuellement les restes explosifs de guerre dans cette zone.





VII. Recommandations

Le Groupe d’experts formule les recommandations suivantes :

Conseil de sécurité

240. Le Groupe d’experts recommande au Conseil de sécurité de proroger d’un an le mandat de la Brigade d’intervention de la MONUSCO, pour appuyer les opérations menées par les FARDC contre les groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo.



Etats Membres dans la région des Grands Lacs

241. Le Groupe d’experts recommande aux Etats Membres dans la région des Grands Lacs de donner la priorité à la mise en application de l’Initiative régionale de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, de renforcer et d’harmoniser les sanctions prévues pour le trafic d’ivoire et de coordonner les efforts menés pour identifier et démanteler les réseaux de trafic de l’ivoire.



Conférence internationale sur la région des Grands Lacs

242. Le Groupe d’experts recommande à la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs de créer une commission chargée de mener des enquêtes sur le trafic transfrontière de minerais et d’y mettre fin, conformément à la Déclaration de Lusaka de 2010, et de coopérer avec les États Membres pour harmoniser les taxes sur l’or dans la région afin de décourager la contrebande.

Gouvernements rwandais et ougandais

243. Le Groupe d’experts recommande aux Gouvernements rwandais et ougandais d’établir une liste actualisée des membres du M23 qui se sont réfugiés sur leur territoire, et de partager avec le Comité les informations dont ils disposent à cet égard, notamment des renseignements biographiques concernant des personnes

visées par les sanctions, afin de mettre à jour la liste des sanctions.



244. Le Groupe d’experts recommande également aux Gouvernements rwandais et ougandais de procéder à l’extradition des membres congolais du M23, conformément aux mandats d’arrêt internationaux, et de mener des enquêtes sur les personnes qui ont fourni un appui au M23 à partir du Rwanda et de l’Ouganda et d’engager des poursuites contre elles.

Gouvernement ougandais

245. Le Groupe d’experts recommande au Gouvernement ougandais de lui communiquer une liste des armes déposées par le M23, conformément à la demande faite par le Comité, et de montrer les progrès accomplis dans la lutte contre la contrebande d’or, la légalisation du commerce de l’or et la présentation au Comité de rapports à ce sujet.

Gouvernement de la République démocratique du Congo

246. Le Groupe d’experts recommande au Gouvernement de la République démocratique du Congo de prendre les mesures suivantes :

a) Lancer des mandats d’arrêt et d’extradition, selon le cas, contre tous les dirigeants de groupes armés qui ont commis des violations graves du droit international humanitaire;



b) Mener des enquêtes sur les commandants des FARDC qui ont collaboré avec les FDLR et d’autres groupes armés et engager des poursuites contre eux;



c) Montrer les progrès accomplis dans la lutte contre la contrebande d’or, la légalisation du commerce de l’or dans la République démocratique du Congo et la présentation au Comité de rapports à ce sujet;



d) Examiner dans les trois mois suivant leur réception les rapports des équipes qui certifient que les mines ne contribuent pas à financer le conflit;



e) Recruter et entraîner un plus grand nombre d’agents des mines et de membres de la police minière pour superviser toutes les mines certifiées;



f) Appliquer le plan d’action conclu en octobre 2012 concernant le recrutement d’enfants et d’autres violations du droit international humanitaire, notamment les sévices commis à l’encontre d’enfants;



g) Améliorer les efforts entrepris pour négocier avec les groupes armés en nommant de petites équipes de responsables chargées spécifiquement d’un groupe armé, qui auraient pour tâche d’assurer la liaison avec les autorités locales, la MONUSCO et les organismes des Nations Unies et de coordonner les mesures

prises pour amener chaque groupe à se rendre;



h) Acquérir les capacités techniques nécessaires pour pouvoir trouver plus facilement la source de tirs d’artillerie et de chars dans l’est de la République démocratique du Congo, afin de résoudre les différends entre la République

démocratique du Congo et le Rwanda concernant les allégations faisant état de tirs transfrontières;



i) Permettre aux agents des douanes, à l’Office congolais de contrôle et à la Société congolaise des transports et des ports d’avoir accès aux conteneurs transportant du matériel militaire.



Gouvernement burundais

247. Le Groupe d’experts recommande au Gouvernement burundais de mener des enquêtes sur les progrès accomplis dans la lutte contre la contrebande d’or congolais au Burundi et de faire rapport au Comité à ce sujet.



Gouvernement de la République-Unie de Tanzanie

248. Le Groupe d’experts recommande au Gouvernement de la République-Unie de Tanzanie de lui communiquer les statistiques concernant la production et le commerce de l’or, et de faire rapport au Comité sur les progrès accomplis dans la lutte contre la contrebande d’or congolais.

Donateurs internationaux

249. Le Groupe d’experts recommande aux donateurs internationaux de prendre les mesures suivantes :

a) Financer et superviser sur le plan technique le plan de démobilisation et les centres de démobilisation des groupes armés congolais dans l’est de la République démocratique du Congo;

b) Appuyer et superviser sur le plan technique la réforme du secteur de la sécurité dans la République démocratique du Congo;

c) Financer le marquage des armes et la création d’un inventaire électronique de toutes les armes et munitions appartenant à la République démocratique du Congo;

d) Financer les déploiements au titre du désarmement, de la démobilisation, de la réintégration, du rapatriement et de la réinstallation avant et durant les opérations de la Brigade d’intervention de la Force contre les FDLR, dans les régions où ces forces sont déployées, afin de faciliter les redditions;

e) Fournir un appui technique et financier au Mécanisme conjoint de vérification élargi.

Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation

en République démocratique du Congo

250. Le Groupe d’experts recommande à la MONUSCO de fournir une assistance au Gouvernement de la République démocratique du Congo pour l’enregistrement et le traçage des armes et des munitions prises aux groupes rebelles, de lui communiquer les données correspondantes et d’accroître les activités de supervision

et de protection des droits de l’homme avant et pendant les opérations menées par la Brigade d’intervention de la Force contre les groupes armés.

Sociétés

251. Le Groupe d’experts recommande aux sociétés de faire preuve d’une diligence raisonnable dans leurs achats de minerais dans la région des Grands Lacs, et d’investir dans des systèmes de traçabilité.


Le direct
LIENS COMMERCIAUX

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