Le Phare s’est fait l’écho, dans son édition d’hier jeudi 13 février 2014, de nouvelles dispositions réglementant les voyages des Congolais entre Bukavu et Bujumbura. La nouveauté relevée pour la circonstance est que nos compatriotes sont appelés à exhiber un passeport, un tenant lieu de passeport ou un laissez-passer de la CEPGL, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, alors que les Burundais pourraient passer la frontière sur présentation d’un simple jeton, délivré gratuitement par les autorités de leur pays. Pendant que l’indignation grogne au sein de la communauté nationale, on vient d’apprendre que ces mesures touchent tous les postes frontaliers de la RDC avec ses voisins. Pour la traversée du Beach Ngobila entre Kinshasa et Brazzaville par exemple, un Congolais de Kinshasa devrait disposer, en plus du laissez-passer habituel et du certificat de vaccination, d’un passeport. Une Congolaise mariée devrait justifier, en plus de toute cette paperasse, d’une autorisation maritale tandis qu’un enfant devrait être couvert par une autorisation parentale.


Des millions de compatriotes vivant du petit commerce entre la RDC et l’Angola, le Congo/Brazzaville, la République Centrafricaine, le Sud-Soudan, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la Tanzanie et la Tanzanie croient tomber des nues. Et pourtant, c’est la dure réalité. Il ne leur suffit plus de se présenter avec un laissez-passer ou un jeton pour se retrouver dans le territoire de l’un des 9 pays voisins. Il leur faut désormais supporter la lourde facture devant mener à l’acquisition d’un passeport : les frais de délivrance d’une attestation de naissance et d’un certificat de bonne vie et mœurs auprès de l’administration municipale, d’un casier judiciaire à l’Inspection générale de la Police judiciaire des Parquets, du certificat de nationalité au ministère de la Justice, etc. Combien de passeports devraient s’acheter, par an, les compatriotes qui font deux à trois navettes par semaine entre la RDC et les pays voisins, quant on sait que les cases de ce document se remplissent à vue d’œil ?

Bref, l’Etat congolais a terriblement compliqué les sorties de ses citoyens vers les pays voisins, alors que les ressortissants desdits pays ne sont soumis à aucune restriction. Jusqu’à preuve du contraire, il est laissé aux Angolais, Congolais de Brazzaville, Centrafricains, Sud-Soudanais, Ougandais, Rwandais, Burundais, Tanzaniens et Zambiens, la latitude de franchir allégrement nos frontières muni d’un simple jeton ou laissez-passer, à obtenir sans débourser le moindre sou.

Lutte contre le trafic d’être humains ?

Du côté de la frontière entre la RDC et le Burundi, sur l’axe Bukavu-Bujumbura, les restrictions imposées aux Congolais sont justifiées par la nécessité d’éviter l’insécurité lors des élections prévues dans ce dernier pays en 2015. Ce qui fait tiquer, est que Kinshasa, qui organise des élections locales, municipales, urbaines, législatives provinciales, sénatoriales, législatives nationales et présidentielle entre 2013 et 2016 maintient ses frontières largement ouvertes aux étrangers détenteurs de jetons.

Maintenant, l’on apprend que le durcissement des conditions de sorties de nos compatriotes vers les pays voisins serait liée à la nécessité de lutter contre le trafic d’êtres humains. A ce sujet, il y a lieu de douter de l’éradication ou de la limitation de la saignée. Car, il est démontré que les Congolaises vendues à l’étranger sortaient du pays à la régulière, munies des passeports nationaux et des visas des Etats d’accueil en Europe, en Asie ou en Amérique. 

En clair, le passeport n’a jamais constitué un remède contre le trafic d’être humains. Ne parlons même pas des « Ngulu » (immigrés clandestins) sortis du pays depuis des décennies et qui continuent de partir pour l’étranger, en quête de l’eldorado, avec passeports et visas. Artistes-musiciens, footballeurs, basketteuses et basketteurs, journalistes, militaires et policiers en formation, diplomates, hommes et femmes d’affaires, élèves, étudiants, handballeuses et handballeurs, volleyeuses et volleyeurs, pasteurs, évangélistes…en exil économique à l’étranger, le plus souvent sans « papiers », franchissent les frontières nationales avec des passeports dans leurs valises.

D’où, l’obligation d’obtenir un passeport avant de se rendre dans un Etat voisin est sans effet sur le trafic d’êtres humains.

Les Congolais exclus du commerce transfrontalier ?
Ce qu’il faut plutôt craindre, c’est l’exclusion des Congolais du commerce transfrontalier. Désormais, les agriculteurs du Nord-Kivu devraient faire des économies pour acquérir des passeports devant leur permettre d’aller vendre les produits de leurs champs (bananes, haricots, pommes de terre, manioc, légumes) en Ouganda, au Rwanda ou au Burundi. C’est pareil pour les débrouillards de Kinshasa spécialisés dans le petit commerce entre Kinshasa et Brazzaville.

A-t-on pensé au sort des compatriotes fréquentant les marchés de Lufu, Yema ou Kahungula entre la RDC et l’Angola, ou encore ceux de Zongo, en face de Bangui, ou de Kasumbalesa, à la frontière zambienne. Ce qui va arriver est que pendant qu’agriculteurs, pêcheurs, éleveurs et autres débrouillards congolais seraient distrait par des formalités de passeront, leurs homologues d’Angola, du Congo/Brazza, de la RCA, du Sud-Soudan, du Rwanda, du Burundi, de Tanzanie et de Zambie pourraient opérer en situation de monopole. 

En fait, la RDC est en train d’empêcher ses citoyens d’équilibrer les échanges commerciaux transfrontaliers, et de devenir totalement dépendants des autres. Dans un Etat où le chômage bat son plein et où la majorité des produits de consommation courante viennent de l’étranger, un terrible coup de frein est donné à la production agricole et artisanale interne. Les débouchés extérieurs sont pratiquement fermés aux Congolais, qui devraient désormais tout attendre de leurs voisins, libres de leurs mouvements comme l’air.

Tout ceci exige, du gouvernement congolais, des explications, au risque de pousser de nombreux compatriotes à croire que la RDC a choisi de faire le jeu de ses voisins, au détriment de ses citoyens. Kimp

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