Elle se veut réaliste, face à la crise politique qui sévit dans son pays, la République Démocratique du Congo. Mme Angèle Makombo, leader de la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC) est celle qui a donné de la voix sur la question. Dans une interview parue dans le Magazine Renaissance, Makombo Angèle ressasse la situation liée à l’organisation des élections législatives et la présidentielle dans les délais constitutionnels, qu’elle estime impossible, en s’appuyant sur les avis des experts. Ce faisant, et pour éviter au pays de sombrer dans la violence, eu égard à certains propos distillés dans l’opinion, Angèle Makombo préconise une transition politique. Consciente du fait que les Congolais, en général, gardent un très mauvais souvenir de ce concept «Transition», elle a souligné que les délégués au dialogue doivent s’accorder sur un pacte républicain, et faire en sorte qu’une période d’une année soit arrêtée, pour éviter une transition interminable. Considérant que cette prise de position va à l’encontre de la ligne prônée par le Rassemblement de Genval, plateforme à laquelle adhère son parti, Angèle Makombo a déclaré pouvoir endosser ce point de vue, qui est celui de son parti, la LIDEC. Découvrez, ci-après, la quintessence de cette interview.

La Renaissance. Vous faites partie des leaders de l’Opposition qui estiment qu’il faut aller au dialogue, bien entendu, selon la Résolution 2277 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Quels problèmes envisagez-vous de traiter au cours de ces assises ?

Angèle Makambo (AM) : Je voudrais préciser que je suis de l’Opposition appartenant à une plateforme dénommée la «Convention des Républicains» qui, elle-même, fait partie du Rassemblement, la plateforme du mouvement de l’Opposition créée après la conférence de Genval en Belgique. Nous disons « oui » au dialogue, tout en mettant un bémol. C’est-à-dire pas n’importe quel dialogue qui donnerait un chèque en blanc pour faire n’importe quoi, du genre transition sans fin, etc. Mais nous voulons focaliser notre attention sur le processus électoral en panne, bloqué parce que la majorité présidentielle l’a voulu ainsi. Elle n’a rien fait pour mettre les choses en marche. Nous voulons que ce dialogue soit une rencontre brève qui ne dure qu’une dizaine de jours au maximum, sans per diem, et qu’il soit circonscrit au processus électoral. Ensuite, il faudra s’entendre sur le fait qu’au terme de ce dialogue, nous devrons avoir un calendrier électoral clair sur les différentes échéances, en particulier l’élection présidentielle. Nous insistons pour que les élections aient lieu dans les délais constitutionnels. Donc, cela veut dire que la présidentielle et les législatives devraient avoir lieu le 27 novembre 2016. C’est cela que nous voulons. Mais en même temps, nous nous rendons bien compte que cela va être quasiment impossible. C’est ce que les experts affirment. Nous sommes déjà au mois d’août, donc ces délais souhaités ne sont pas tenables. Que doit-on faire alors ?

La Renaissance. C’est la question que beaucoup se posent…

Angèle Makambo (AM) : Le mandat du Chef de l’Etat s’achève le 19 décembre 2016, donc, il faut envisager d’autres dispositions politiques dans notre pays. Et vous savez comment les Congolais s’empoignent à ce sujet, la Majorité et l’Opposition. Pour la Majorité, il faut que le Président Kabila continue au-delà de son deuxième et dernier mandat. Elle a même saisi la Cour constitutionnelle pour soumettre l’article 70 à son appréciation. Nous, nous disons «non». Il faudra qu’au terme du mandat du Chef de l’Etat, qui, en vertu de la Constitution, a eu deux mandats de cinq ans chacun, on établisse, à l’issue du dialogue, un compromis politique qui pourrait mettre en place, ce que beaucoup ont horreur d’envisager, à savoir une transition. Il faut se rendre à l’évidence. Ce sera peut-être cela. Il ne m’appartient pas à moi seule de décider que c’est cela qui doit être fait. Dans ce compromis politique, on pourra peut-être décider d’une brève période de transition. Et on devra se poser les questions de savoir qui va diriger cette transition, quel genre de gouvernement on aura. Ce sont-là, entre autres, des questions qui devront être discutées au cours du dialogue. Pour moi, personnellement, ce dialogue doit être l’occasion pour que toute la classe politique s’accorde sur un Pacte républicain. Pourquoi ? Pour décider de questions essentielles. Par exemple, devons-nous maintenir une élection présidentielle à un seul tour, conformément à l’article 71 de la Constitution tel qu’amendé précipitamment en janvier 2011, au risque d’avoir un Président élu seulement avec 30% des voix, donc avec une faible légitimité ? Ou devons-nous réviser l’article 71 pour revenir à une élection présidentielle à deux tours ?



La Renaissance. Pour être réaliste, le dialogue pourrait déboucher sur une transition. Laquelle, si elle advenait, ne serait pas la première dans ce pays. Quelle leçon tirez-vous des transitions qui se sont succédé jusque-là en RD Congo ?

Angèle Makambo (AM) : Justement, c’est bien cela que les Congolais ont une sainte horreur de cette notion-là. Dès qu’ils entendent « transition », leurs cheveux se dressent parce qu’ils ont encore fraîche dans leur mémoire la transition interminable sous Mobutu. Et c’est pour cela que je parle d’un Pacte républicain. Il faudrait qu’en toute responsabilité, la classe politique et la société civile congolaise disent non à une transition interminable. Il faudra une période brève qui doit correspondre à la période qui permettra à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), en toute objectivité, de conclure la procédure d’enrôlement des électeurs, d’avoir un fichier électoral bien établi, nettoyé, etc. Et de voir comment cette période pourra permettre de monter tout le processus électoral. C’est ainsi que les experts disent qu’au-delà de cette date limite de décembre, six mois voire un an pourront suffire. Il faut, au départ, bien décider. Il ne faut pas du tout qu’il y ait une transition interminable ou renouvelable sans fin.



La Renaissance. Dans votre mouvement dit Rassemblement, des partis n’acceptent pas que le Chef de l’Etat aille au-delà de son mandat. Ils disent que ce mandat s’arrête le 19 décembre, alors que vous, vous tenez un autre discours, le contraire…

Angèle Makambo (AM) : Nous appartenons à ce grand Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement où nous avons dit « oui » au dialogue conformément à la résolution 2277 du Conseil de Sécurité de l’ONU et à des élections dans les délais constitutionnels. Mais vous voyez bien, la situation évolue rapidement et le temps presse. Depuis la conférence de Genval en juin 2016, les analyses des experts renseignent que ce délai-là va être difficile. Alors, que fait-on ?

La Renaissance. Pour la transition, est-ce votre point de vue ?

Angèle Makambo (AM) : c’est le point de vue de mon parti, la Ligue des démocrates congolais (Lidec). Comme je suis leader de la Lidec, c’est un point de vue que j’endosse. La Lidec fait partie de la Convention des Républicains et cette dernière est membre du Rassemblement. Ici, je donne la position de la Lidec. Depuis Genval en Belgique, nous analysons la situation jour après jour, nous lisons les rapports des experts, des analystes en matière électorale et qui nous disent qu’on aura du mal à tenir les délais. Nous sommes au mois d’août. Organiser la présidentielle en novembre sera difficile, voire impossible. Et d’ailleurs, comme vous le savez, on vient à peine d’entamer la procédure d’enrôlement. Je crois que c’est le Nord-Ubangi qui est la province-pilote. Donc, il faut se rendre à l’évidence que ce sera difficile à tenir. Il faut savoir anticiper en politique. Or, dans ma famille politique, certains disent : « laissons courir. Nous verrons jusqu’où nous irons. Et en décembre, nous allons décider, nous allons recourir à l’article 64». Moi, je me dis que la population a trop souffert dans ce pays, le sang a trop coulé. La classe politique veut-elle favoriser une nouvelle effusion de sang, des viols, la désolation, la destruction parmi nos populations ? Certains diront que c’est cela qu’il faut faire. Mais moi, je ne suis pas pour la violence pour la violence. Je pense que nous pouvons, et devons anticiper et essayer en toute intelligence, en toute responsabilité, décider d’un compromis politique.
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