Depuis la répression de la marche organisée le 31 décembre par le Comité Laïc de Coordination (CLC), l’Eglise n’a pas caché sa colère contre le pouvoir à Kinshasa. Mais, en coulisses les tractations se poursuivent. Et le président de la CENI pourrait en faire les frais.

En République Démocratique du Congo, il est toujours difficile de faire le tri entre les informations réelles et celles qui sont diffusées. Il n’est pas rare que certaines informations soient fausses ou tronquées. C’est le cas notamment du bras de fer engagé entre l’Eglise congolaise, par le biais du cardinal Monsengwo et de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO).

Lors d’une messe en mémoire des six victimes de la marche du 31 décembre, le cardinal-archevêque de Kinshasa n’a pas mâché ses mots pour dénoncer ce qu’il appelle « la confiscation du pouvoir » et la « brutalité des forces de l’ordre ». Mgr Monsengwo aurait même déclaré: « Que les médiocres dégagent ».

On sait aujourd’hui que l’Eglise reste le seul interlocuteur organisé face à la majorité présidentielle; l’opposition étant totalement divisée et en proie à une guerre des chefs. La solution ne peut venir que d’un accord entre la CENCO et le pouvoir. Il nous revient que des pourparlers ont bel et bien lieu en coulisses. Il faut dire que le temps presse: le CLC a annoncé une nouvelle marche pacifique pour ce dimanche 21 janvier.

Sur quoi débouchera l’accord ? Il semble que l’un des points serait la refonte de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Son président, Corneille Nangaa pourrait faire les frais de cette restructuration. Issu de la société civile, cet homme de près de 48 ans, détenteur d’un diplôme de licence en Sciences économiques de l’Université de Kinshasa, a près de vingt ans d’expérience professionnelle dans le milieu des élections tant au niveau national qu’international. Directeur de programme à l’Ecole de Formation Electorale en Afrique Centrale (EFEAC), il est facilitateur Expert BRIDGE (pour « Building Resources In Democracy, Governance and Elections », c’est-à-dire « Bâtir des Ressources en Démocratie, Gouvernance et Elections ») depuis 2010.

Campagne d’intoxication ?

Corneille Nangaa a été désigné par consensus par les confessions religieuses et puis par un vote de l’Assemblée nationale confirmé par une ordonnance présidentielle. Toutefois, selon certaines sources, ce choix a été davantage porté par six confessions religieuses. Il se dit, mais c’est à vérifier, que la CENCO n’a pas admis cette désignation et ne s’est jamais sentie concernée « par ce choix imposé ». Du coup, on peut imaginer que les évêques risquent de demander le départ de l’actuel président de la CENI.

D’autant que depuis des semaines, Corneille Nangaa fait l’objet d’une campagne de dénigrement. A la fin 2017, il aurait déclaré que les élections ne pourraient pas avoir lieu avent 2019 à cause de l’enrôlement des Congolais de l’étranger, alors que la date avancée (et toujours d’actualité) est le 23 décembre 2018.

De quoi évidemment entraîner des réactions en RDC et sur le plan international. Or, la CENI a évoqué une campagne mensongère et dénoncé « cette intoxication disséminée à travers les réseaux sociaux véhiculant une fausse interview prétendue accordée par son président Corneille Nangaa ». Elle confirme que les élections auront bel et bien lieu à la date fixée, à savoir le 23 décembre de cette année, et appelle la population congolaise à soutenir le calendrier électoral.

Danger de report des élections

Alors faut-il revoir la composition de la Commission électorale nationale indépendante ? Les avis sont plus que partagés. Certains observateurs qui connaissent le Congo, pensent qu’ouvrir la porte du changement de la CENI, c’est mettre à mal des mois de travail et donner un signal contraire quant à l’organisation des élections.

« Si l’on veut aller aux élections cette année, il faut prendre la mesure du défi et aller vers les opérations proprement dites, car remplacer Nangaa est certes satisfaisant pour l’ego, mais un frein au processus, qui va donc connaitre un retard », note un proche de l’opposition.

Face à cette situation et compte tenu du fait que l’Eglise n’aurait pas soutenu la nomination de Corneille Nangaa à la tête de la Commission électorale chargée d’organiser les scrutins, beaucoup imaginent que le clergé demandera à ce qu’il se retire. Or, ce fonctionnaire international a travaillé dans le domaine de l’assistance technique électorale en tant qu’expert électoral au Niger, en Côte d’Ivoire, et collaboré entre autres avec le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) au Gabon, en République de Guinée, au Ghana, au Kenya, au Burundi, au Cameroun et à Madagascar. On peut donc comprendre le pourquoi de l’unanimité du choix porté sur sa personne pour remplacer l’abbé Malu-Malu, démissionnaire et entre-temps décédé.

Jean-Jacques Durré
Cathobel
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