Les lampions se sont éteints au Forum de l’Innovation de Kinshasa, ce vendredi 25 septembre 2015, en fin d’après-midi. Plusieurs résolutions y ont été prises, à l’issue de multiples interventions. Dans son mot de clôture, Lambert Mende, Ministre de la Communication et Médias, a lancé un vibrant aux intellectuels, universitaires, acteurs des médias, leaders d’opinions et membres de la société civile, en général, à s’approprier ces résolutions, à faire circuler davantage ces idées nouvelles afin que les points de vue se croisent utilement pour renforcer cette image d’un pays de croissance et d’innovation, en dépit des problèmes et des angoisses qui sont inhérents à toute société humaine. Dans cette édition, il y a lieu de retrouver, les deux discours d’ouverture et de clôture ainsi que sa communication, lors des échanges et discussions au Forum d’Innovation tenu à Fleuve Congo Hôtel, à la Gombe.



DISCOURS DE SON EXCELLENCE MONSIEUR LE MINISTRE DE LA COMMUNICATION ET MEDIAS A L’OCCASION DE LA cloture DU FORUM DE L’INNOVATION DE KINSHASA VENDREDI 25 SEPTEMBRE 2015



Excellence Monsieur le Vice Premier Ministre, Représentant de M. le Premier Ministre

Honorables Députés et Sénateurs,

Mesdames et Messieurs les Ministres et Chers Collègues,

Monsieur le Secrétaire Général du Gouvernement,

Messieurs les Ambassadeurs et Membres du Corps Diplomatique,

Distingués Invités,

Mesdames et Messieurs en vos rangs et titres respectifs,

Il y a 24 heures, dans le discours que j’ai prononcé lors de la cérémonie d’ouverture, j’indiquais l’objet et les objectifs de ce Forum de l’Innovation. Il s’agissait de rechercher les voies et moyens pour dégager un consensus le plus large possible quant à la nécessité de façonner une image de marque de notre pays.

Durant ces deux journées, la mobilisation et la fédération des intelligences, des expériences et des savoir-faire autour des valeurs patriotiques ont effectivement permis de dessiner de la République Démocratique du Congo une image avant-gardiste et plus positive que d’habitude. Une image qu’au nom du Gouvernement je voudrais inviter chacune et chacun ici à promouvoir pour une attractivité accrue de notre pays.

Au regard de la vivacité des débats et de la pertinence des résolutions qui viennent de nous être présentées, je peux affirmer avec fierté que le Gouvernement a été bien inspiré d’organiser ce forum qui aura été un lieu de partage d’idées positives nouvelles, un lieu d’apprentissage de la préservation et de la défense de nos Intérêts Nationaux.

Je voudrais inviter les intellectuels, universitaires, acteurs des médias, leaders d’opinions et membres de notre société civile en général à s’approprier ces résolutions, à faire circuler davantage ces idées nouvelles afin que les points de vue se croisent utilement pour renforcer cette image d’un pays de croissance et d’innovation en dépit des problèmes et des angoisses qui sont inhérents à toute société humaine. Ces problèmes sont manifestement décuplés par une tendance à discréditer la République Démocratique du Congo qui s’observe dans le chef de quelques nostalgiques de l’impérialisme néocolonial qui sévissent dans les rédactions des médias globaux qui inspirent nos intellectuels, en ce compris les hommes et femmes des médias.

Mais il nous a été donné de comprendre que cette tendance à donner une fausse image négative de notre pays est aussi le fait d’un certain nombre de nos compatriotes qui pour des raisons bassement égocentriques, se laissent aller à noircir délibérément le tableau. Ce Forum a été le lieu de leur faire savoir que cette participation de la sorte à ce qu’on appelle le Congo Bashing est une entreprise suicidaire généralisée car ils ne compromettent pas l’image d’un régime politique qu’ils ont toute latitude de combattre par des voies démocratiques et loyales mais ils condamnent toute la Nation à un isolement qui risque de la tuer à petit feu malgré les atouts dont elle dispose.



Je forme le vœu que les acquis de cette prise de conscience et les résolutions prometteuses qui en résultent se diffusent à l’ensemble de notre société et que cette flamme désormais allumée ne s’éteigne plus jamais pour que brillent à nouveau sur notre firmament les soleils des indépendances.

Je vous remercie.

Lambert MENDE OMALANGA

DISCOURS DE SON EXCELLENCE MONSIEUR LE MINISTRE DE LA COMMUNICATION ET MEDIAS A L’OCCASION DE L’OUVERTURE DU FORUM DE L’INNOVATION DE KINSHASA JEUDI 24 ET SEPTEMBRE 2015

Excellence Monsieur le Vice Premier Ministre, Représentant de M. le Premier Ministre

Honorables Députés et Sénateurs,

Mesdames et Messieurs les Ministres et Chers Collègues,

Monsieur le Secrétaire Général du Gouvernement,

Messieurs les Ambassadeurs et Membres du Corps Diplomatique,

Distingués Invités,

Mesdames et Messieurs en vos rangs et titres respectifs,

Je voudrais, avant tout, vous remercier tous pour votre présence qui nous fait honneur à ce forum de l'innovation, le tout premier du genre organisé sous l'égide de Son Excellence Monsieur le Président de la République, avec le soutien appuyé du Premier Ministre. Je remercie également tous les organes de la presse nationale et internationale ici présents, particulièrement notre partenaire le quotidien français Libération qui nous a accompagné par ses précieux conseils dans l'organisation de ce Forum.

Mesdames et Messieurs,

A l'occasion de la 69ème session de l'Assemblée Générale des Nations-Unies, devant le monde entier, le Président Joseph Kabila Kabange annonçait, avec une fierté légitime, la renaissance de la République Démocratique du Congo en déclarant (je cite): "la République Démocratique du Congo est de nouveau un pays debout. Un pays où la paix retrouvée se consolide chaque jour davantage. Un pays dont l'économie est l'une des plus dynamiques du continent, avec un taux d'inflation proche de zéro, un taux de croissance au-dessus de la moyenne africaine depuis près d'une décennie et des réserves de change en constante augmentation. Un pays en pleine reconstruction où routes, écoles, hôpitaux et infrastructures diverses sont construits en nombre et en rythme sans précédent".

De tels exploits, matérialisation de l'appel de nos pères de l'indépendance à rendre le Congo plus beau qu'avant, méritent d'être salués et encouragés, surtout lorsqu'on sait que jusqu'il y a peu, il était devenu un lieu commun de classer la RD Congo parmi les États faillis. Il n’est pas inutile par ailleurs de noter que ces performances sont obtenues dans un contexte international caractérisé par une crise sécuritaire et financière cyclique, et par des défis de tous ordres sur le plan interne où les effets du passif de la gouvernance antérieure sont encore patents, en plus des conflits sous diverses formes et des guerres de prédation qui n'ont pas fini d'agresser le tissu sociopolitique et économique de notre pays.

Mais, force est de reconnaître que les Congolais qui bénéficient avec bonheur de ces réalisations et vivent au jour le jour les améliorations du positionnement de leur pays dans le concert des nations et son entrée dans la modernité donnent parfois le sentiment d'être de simples consommateurs qui se limitent à constater, mais ne s'engagent pas suffisamment dans la promotion et la valorisation de ces acquis. Certains esprits chagrins, nostalgiques ou autoflagellateurs qui ne croient en rien si ce n'est à leurs intérêts particuliers ont dès lors beau jeu donner de leur pays une image systématiquement négative à travers des clichés véhiculés gratuitement ou par procuration via divers supports peut-être parce qu’ils ne trouvent pas leur compte personnel dans la nouvelle situation.

Mesdames et Messieurs,

La responsabilité, mieux le devoir du gouvernement est non seulement de poursuivre, d'amplifier ces performances et ces transformations tangibles pour rencontrer davantage les préoccupations du peuple congolais, mais aussi d'élaborer des stratégies nouvelles susceptibles de donner corps à un consensus dans la préservation desdits acquis et dans la défense des Intérêts Nationaux, sans oublier la nécessité, mondialisation oblige, d'assurer une visibilité et une attractivité accrues de notre pays à l'extérieur.

C'est la raison essentielle qui a milité en faveur de l'organisation de ce Forum de l'Innovation, un forum citoyen qui se veut un cadre d'échanges entre tous ceux qui croient en ce pays, ceux qui ont la possibilité et la responsabilité d'agir afin de façonner et de rendre tangible une image de marque forte, positive et cohérente de notre pays qui fasse consensus par la prévention et l'élimination des clivages susceptibles de la menacer et de rompre ledit consensus. Il ne s'agit pas d'une simple campagne de communication ou d'une opération de charme, si j'ose dire. Il s'agit plutôt d'un véritable plan stratégique de promotion politique nationale, avec une participation collective des Congolais issus de toutes les sphères de la société dans le but de renforcer l'attractivité de leur pays, de renforcer son influence politique, diplomatique et culturelle aux plans interne et international. Il nous faut sortir des sentiers battus (surtout par les autres), nous approprier davantage le destin de notre nation. Cette bataille doit plus que jamais cesser d’être l'affaire du seul gouvernement ou des spécialistes en marketing œuvrant en synergie avec lui. Elle doit prendre la forme d’une action concertée de tous les Congolais.

Je suis convaincu que ce Forum de l'Innovation de Kinshasa servira de détonateur pour en finir avec les clichés infâmants et autres idées reçues, résister aux vents dominants et permettre désormais à tous les Congolais de porter plus haut les couleurs de notre pays qui, sous le leadership du Président KABILA est en train de retrouver sa place véritable au cœur de l'Afrique et dans le monde.

Je vous remercie.

Rallumer les soleils des indépendances

(Communication de M. Lambert Mende Omalanga au Forum de l’Innovation de Kinshasa, le 24 Septembre 2015)



Depuis les années 60, notre pays, la République Démocratique du Congo a été, comme d’autres en Afrique, balloté par des impostures et des échecs désespérants pour ses populations au point d’accréditer l'idée d'une sorte de malédiction congénitale. Des élites vautrées dans le bain amniotique de la pensée néocoloniale y ont exercé un leadership sans autonomie et conduit des politiques aux antipodes des Intérêts Nationaux pour se maintenir au pouvoir en échange de la limitation de l’auto détermination de leur peuple ainsi englué dans la domination étrangère.

Les premières décennies de l’indépendance seront caractérisées par le développement des inégalités, l'implosion des solidarités traditionnelles, la montée des injustices, les rébellions et les guerres civiles ou d’agression. Autant d’échecs qui sont le fruit des turpitudes des porteurs de la pensée dominante qui ont pris en otage l'espace politique sans avoir le courage d'assumer pleinement les aspirations légitimes des populations, de peur de heurter les puissants intérêts à l’étranger.

Les leaders nationalistes comme Patrice-Emery Lumumba qui imposèrent alors l’accession du pays à la souveraineté nationale et internationale furent dénoncés sans vergogne comme des personnages sulfureux et dangereux parce qu’ils osaient revendiquer des droits égaux avec les "maîtres" du monde et prétendaient vouloir forger un nouveau destin pour leurs peuples. Des faiseurs d’opinion nationaux ayant pignon sur rue dans certaines confessions religieuses notamment avaient embouché les trompettes pour discréditer ce visionnaire en invitant leurs paroissiens à prier pour que Lumumba disparaisse à jamais.

Il est symptomatique que plus de cinquante après ces péripéties, surgissent des mêmes horizons des diktats refusant aux représentants de notre peuple le droit de signer des contrats avec un pays comme la Chine au motif que notre coopération traditionnelle avec l’Occident serait tellement désintéressée, généreuse, pacifique, humaniste et démocratique, qu’elle n’a pas d’alternative ; ce qui reste à démontrer car comme l’a rappelé fort opportunément Aminata Traoré dans le Monde Diplomatique, « les Européens exigent des dirigeants africains démocratiquement élus qu’ils imposent à leurs peuples des mesures assassines au nom d’une dette extérieure contractée à leur insu pour des dépenses non conformes à leurs besoins prioritaires ». Il est donc indispensable pour nous de savoir à quoi nous en tenir pour mieux nous organiser et mieux agir.

Beaucoup parmi nous continuent, hélas, à croire au mythe de l’impérissable mission civilisatrice des anciens maîtres auxquels ils font allégeance. Formatés par des officines étrangères qui manœuvrent sans cesse pour fabriquer et promouvoir des agents à leur solde ils se caractérisent par leur renonciation volontaire au rôle de « définisseur de situations ou de problèmes » qui incombe pourtant à tout intellectuel digne de ce nom au profit de « la Communauté Internationale » qu’ils évoquent à tout bout de champ. La Communauté Internationale qui est devenue un concept fourre-tout dans lequel sont alignées les chancelleries étrangères et les institutions désincarnées spécialisées dans la production de statistiques témoignant de notre irrémédiable incapacité à nous prendre en charge. Leurs pratiques à contre-courant des Intérêts Nationaux sont adossées sur un argumentaire faussement rationnel et des petits arrangements avec la vérité qui sont le lot habituel des élites compradores.

Face à cette histoire qui se répète, on ne peut qu’éprouver le même vertige exprimé dans l’excellent ouvrage du grand romancier ivoirien Ahmadou Kourouma publié en 1970 aux éditions du Seuil à Paris sous le titre Les soleils des indépendances, un véritable hymne à la vie, à la dignité, à la prospérité et à la grandeur de l'Afrique qui a inspiré l'intitulé de ma communication de ce jour « rallumer les soleils des indépendances » et dont le but est de nous inviter à développer en nous les capacités de combattre à la fois les fantômes du passé tout comme les dérives du présent qui ont entrainé le naufrage des espoirs nés de la décolonisation. Ce roman d’Ahmadou Kourouma a merveilleusement peint cette période charnière entre la lumineuse période de foi et de lutte pour plus de liberté et de total épanouissement et celle de la dégringolade des Africains dans les abysses des servitudes et de l’exploitation. Celles-ci ne sont pas sans nous rappeler les mains coupés de nos ancêtres par les sbires au service de Léopold II, le roi des Belges qui saigna à blanc le Congo au prix de quelque 10 millions de morts en 23 ans de règne, un épisode sur lequel Marc Witz, Roger Casement, Joseph Conrad, Edmund Morel, Mark Twain et Conon Doyle nous ont légué des témoignages émouvants.

Mais c’est en vain que l’on chercherait le moindre acte de repentir ou de réparation dans l’historiographie officielle de nos anciens maîtres qui héritèrent de ce bien privé de leur Roi qu’avait été notre pays en 1909 et y instaurèrent une exploitation coloniale des plus inhumaines.

Lorsque Patrice Lumumba dénonça l’humainement inacceptable condition de ses frères et sœurs tout au long de cette période, il s’est trouvé des compatriotes pour trouver ses accusations « excessives ». Et il semble qu’ils aient fait des émules qui, au sein de la classe politique et la société civile actuelles, ne conçoivent leur rôle qu’en termes de pérennisation des relations de type néocolonial dans notre pays.

Il s’impose dès lors d’innover en inventant et en cristallisant un autre rapport à la politique qui place le peuple congolais et lui seul au centre de l’action publique afin mobiliser les Congolais en quête de leur mieux-être et générer une représentation plus responsable d’eux-mêmes.

Il est question de lancer un mouvement qui aboutisse à la conception de cette nouvelle vision qui apporte un mieux dans nos agir individuel et collectifs. Ce qui n’est possible que si ce mouvement s’inscrit dans un projet de société et dans une perspective durable. Il s’agit de construire un consensus socio-économique sur la vie dans notre pays et de mettre à jour un leitmotiv catalyseur de créativités positives. Le rôle joué par les pères des indépendances africaines qui ont lutté pour l’avènement d’un meilleur monde en Afrique constitue le premier filon de cette quête. Hantés par l’idée d’une vie meilleure, d’une société libérée des entraves de la colonisation et disposée à se lancer dans la voie du développement, ils ont su canaliser merveilleusement les énergies de leurs compatriotes en faveur des Intérêts Nationaux.

Il est devenu un lieu commun de dire que l’indépendance de 1960 a été pour une large part un leurre, particulièrement sur le plan économique dont les leviers étaient demeurés totalement extravertis. Nos populations qui avaient cru pouvoir s’ouvrir à une véritable émancipation ont vite déchanté. En RD Congo, la neutralisation politique et l’assassinat de Patrice Emery Lumumba a été le point de départ de l’extinction de la flamme de l’émergence allumée par les pères des indépendances. Elle avait été précédée comme on le sait par une vigoureuse campagne de diabolisation et de dénigrement, notamment à travers les sermons inspirés de Bruxelles d’une Eglise chrétienne qui présentaient le chef de la première majorité parlementaire comme un chien enragé à abattre à tout prix.

Pour rallumer aujourd’hui les soleils – ou les espoirs - des indépendances, il faut donc dénoncer le néocolonialisme ; ramener à la surface les valeurs positives intrinsèques partagées par nos populations pour les adapter à notre nouvelle vision sociétale fondée sur les impératifs d’une indépendance complète (politique et économique) effective et innover.

Innover pour la classe politique, c’est s’écarter des sentiers battus du mimétisme qui pousse à copier servilement les pratiques en vigueur chez les anciens colonisateurs et proposer des formules susceptibles de mobiliser les énergies de tout le peuple pour construire un développement autocentré ; innover pour les opérateurs économiques c’est avoir l’audace de rompre avec l’économie de prédation concentrée quasi exclusivement autour du commerce d’importation et se lancer dans les investissements et la création des biens ; innover pour les hommes et les femmes des médias nationaux s’est cesser de servir de simple relais des dépêches des homologues étrangers sur des faits qui concernent notre pays ; innover pour la société civile, c’est prendre le risque de ne plus servir de simple caisse de résonnance de la perception de notre pays par leurs puissants donateurs.

C’est à ce prix que la RD Congo, qui s’est libérée de la dictature, pourra à nouveau caresser les rêves perdus aux lendemains des indépendances sans s’égarer dans la naïveté et les illusions qui, au vingtième siècle, lui avaient fait perdre pied. Si la vie des individus est un combat, comme nous le savons tous, il en est autant de la vie des nations qui n’agissent jamais autrement que par intérêt. L’ordre économique mondial, bien que désormais idéologiquement unipolaire a cependant maintenu une dichotomie entre un capitalisme du centre et un capitalisme périphérique. Ce dernier étant essentiellement caractérisé par des échanges inégaux. Pour innover, nous devons redéfinir clairement notre place et de notre rôle dans le monde, lesquels ne doivent plus se réduire en un statut de gardiens et de faire-valoir à la solde de nos maîtres d’hier.

Un prêtre jésuite, Matungulu Otene a observé que dans la plupart de nos langues bantoues, le verbe « avoir » qui structure mentalement les convoitises à la base des grands affrontements d’intérêts, est pratiquement absent et se trouve substitué par l’expression relationnelle « être avec », plus proche du domaine de la spiritualité que de celui de la politique. Ainsi, lorsque les colons belges organisaient l’économie congolaise pour répondre à leurs propres besoins, nombre de Congolais avaient tendance à ne penser qu’au confort d’« être avec » eux, les gratifiant même très généreusement du qualificatif affectueux de « Ba Noko » (nos oncles). Des oncles qui ne se sont nullement gênés de piller systématiquement et sans vergogne l’héritage de leurs « neveux ».

C’est donc le lieu de changer de perspective et de ne plus laisser à nos désormais partenaires de la Communauté internationale le soin de veiller à nos intérêts à notre place. Ces partenaires extérieurs veillent à leurs intérêts et nous devons veiller aux nôtres, les relations entre nations ne relevant pas de la charité chrétienne. C’est du reste le B.A.BA de la coopération entre les nations. Ce n’est que par la conversion culturelle que les Africains commenceront efficacement la reconquête de leur dignité.

Il est malheureux que nous n’ayons pas la même perception des choses à ce sujet, puisque face à la réalité de cette confrontation, les divergences entre nous-mêmes sur les fondamentaux sont autant de fissures dans la ligne de défense de nos Intérêts Nationaux. Ces fissures, les forces adverses en face de nous auront toujours beau jeu de les entretenir et les aggraver. On peut s’en rendre compte à travers la délectation et la dérision que l’on perçoit notamment dans les dépêches de la presse dite globale lorsque, rendant compte de nos dialectiques politiques, elle cherche à réduire à néant par la caricature les espoirs suscités par l’indépendance. C’est la même dérision qui servait, avant l’indépendance, à avilir l’humanité du colonisé dans son âme. Dommage que nombre d’Africains aient intériorisé cette stratégie de la dérision. Les expressions comme « muzungu ni mungu » (« le blanc est un dieu » en swahili) dont on retrouve l’équivalent dans certaines de nos langues en font foi. En Afrique de l’Ouest il est fréquent d’entendre dire « Dieu est grand mais toubab (le blanc) n’est pas petit ». Ce statut de deus ex machinaest ainsi reconnu au colonisateur à force de matraquages idéologiques. Dans ces conditions, il est difficile de rester soi-même et de se considérer comme partenaire des anciens maîtres.

C’est pour éteindre les soleils des indépendances que les officines néocolonialistes ont éliminé des leaders comme Lumumba, qui s’entêtaient à redonner à leur peuple un rôle central dans la définition de la situation et des problèmes. Aujourd’hui, nous devrions perpétuer leur mémoire et mériter leur sacrifice en refusant tout schéma et toute attitude qui en fin de compte reviendrait à en édulcorer les résultats. L’assassinat de Patrice Lumumba et d’un grand nombre de ses disciples comme Finant, Elengesa, Lumbala, Mbuyi, Muzungu, Mbuyi, Nzuzi et ensuite Pierre Mulele qui provenaient de tous les horizons de notre vaste pays a provoqué des vigoureuses réprobations tant en RD Congo même qu’en Afrique et dans un certain nombre de pays occidentaux. Il ne s’agissait donc pas d’une confrontation ethnique ou raciale, mais bien idéologique. Sur ce plan idéologique, l’espace africain se distingue de l’espace européen et américain marqués par le clivage gauche – droite. La plupart des pays africains qui avaient dans les années ’60 opté pour la voie socialiste en sont encore aujourd’hui à se rechercher idéologiquement. C’est une illustration du fait que les idéologies professées sur papier en Occident, n’ont pas nécessairement pris ancrage sous nos tropiques, étant donné le contexte politico-économique néocolonial qui a fini par transposer sur le terrain politique l’approche dichotomique d’une démocratie du centre différente de celle de la périphérie. Si en Occident (centre) les peuples ont le droit de s’exprimer et de décider des choix de la politique à mener par leurs gouvernants, en Afrique (périphérie), la tendance est de considérer « démocratique » le schéma que l’Occident définit comme tel. Là aussi il faut innover et cesser de se regarder avec les yeux des autres.

Ainsi, la constitution de la RDC que certains compatriotes et leurs soutiens extérieurs brandissent contre des soupçons de ce qu’on appelle « glissement » souvent sans se rendre compte des conséquences dangereuses et, somme toute, inconstitutionnelles des recettes que les uns et les autres proposent contre ledit glissement, configure administrativement notre pays en 26 provinces qui devaient être effectives trois ans après l’entrée en vigueur de la constitution. Mais s’abritant derrière les oukases de quelques chancelleries occidentales, il y en a qui, 9 ans après, trouvent que le passage à 26 provinces est « prématuré ».

La même constitution consacre le libre choix des dirigeants par le peuple à tous les niveaux. Mais, prenant appui sur des options prises illégitimement par quelques partenaires étrangers, d’aucuns tentent d’imposer la limitation de cet exercice du droit des citoyens aux seules élections législatives et présidentielle au détriment des élections locales qui seraient « moins importantes » (sic !).

L’innovation dont le pays a besoin aujourd’hui repose sur la recherche des voies adaptées à nos réalités pour trouver des solutions appropriées à nos problèmes sans pour autant tomber dans le piège de l’autarcie. Elle se situe aux antipodes de ce formalisme de façade sur fond de principes fallacieux destinés à servir de paravent à des prédateurs impénitents dans lequel certains tentent d’entraîner le pays. Prétendre que la controverse oppose les partisans d’un repli identitaire et ceux qui s’y opposent, comme on l’a entendu est une falsification dont l’objectif est d’oblitérer le vrai débat.

Les connexions idéologiques entre formations politiques ou organisations sociales congolaises et occidentales sont possibles mais ils doivent être affranchis de la sève néocoloniale qui, depuis les années ’60, continue de nourrir les relations entre acteurs congolais et leurs collègues occidentaux. Nous voulons véritablement être pour nos amis occidentaux, des partenaires et pas des vassaux. Notre lutte est bien celle-là. –

Je vous remercie.

Lambert MENDE OMALANGA

Ministre de la Communication et Médias

Porte-parole du Gouvernement


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