La nation congolaise a commémoré les journées du 16 et 17 janvier, les disparitions tragiques de ses deux héros nationaux, Patrice-Emery Lumumba et Laurent-Désiré Kabila. Au delà des cérémonies officielles organisées ici et là, Forum des As a approché des hommes politiques et des intellectuels congolais afin de pénétrer de manière critique la pensée politique de ces deux personnages. Les différents interlocuteurs définissent ces deux héros comme de véritables combattants de l’intérêt national et retiennent d’eux la lutte acharnée pour la libération de la nation congolaise du joug impérialiste. Interrogé, Michel Okongo, président du parti politique « Unité des valeurs » et auteur de plusieurs réflexions sur P.E. Lumumba et L.D. Kabila estime « qu’au delà du traditionnel rituel, ces journées devraient faire l’objet des colloques et des séminaires de formation civique afin d’enseigner davantage au peuple congolais le sens de la patrie ». Ci-dessous l’intégralité de l’interview réalisée avec ce juriste de formation et de carrière. FDA : comment appréciez-vous la pensée idéologique de Patrice- Emery Lumumba et de M’zee Laurent-Désiré Kabila ? Michel Okongo : je voudrais avant tout préciser qu’on a affaire ici à deux personnages tout à fait distrincts. D’une part, on a Patrice-Emery Lumumba qui est l’un des pères de l’indépendance de notre pays, de l’autre Laurent-Désiré Kabila qui a libéré le pays de la dictature mobutienne et qui avait beaucoup combattu contre la domination occidentale. Ils ont, tous deux, marqué l’histoire politique de notre pays par leurs déclarations et actions politiques. Quelles sont, à votre avis, les idées forces de Patrice-Emery Lumumba et de Mzee Laurent-Désiré Kabila qui ont le plus impacté le jeu politique en RDC ? Patrice-Emery Lumumba pensait que l’histoire de la RDC devra être écrite non pas à l’Est et à l’Ouest, mais ici sur le sol congolais, par les Congolais. Cela signifie simplement que le combat pour la libération du Congo ne doit ni être décidé ni dépendre de l’extérieur du pays. Il doit dépendre plutôt des Congolais. C’est ce qui est en train d’être fait actuellement. Laurent-Désiré Kabila, lui, avait fait preuve d’un courage légendaire. Il ne se lassait d’inviter le peuple congolais à se prendre en charge. L’exhortation appelant les Congolais à ne jamais trahir leur propre pays continue de résonner comme un commandement sacré. Après une analyse de fond, j’estime que l’on a d’une part, un héros national et de l’autre un martyr. Je pense qu’il est temps que l’on réécrive l’histoire de notre pays. C’est un débat intellectuel qui est lancé. EXIGER DE LA BELGIQUE, LES RESTES... Quelle lecture faites-vous de la manière dont les commémorations de ces deux héros ont été organisées à travers le pays ? C’est une fois de plus l’occasion pour l’Etat congolais d’exiger de la Belgique les restes de Lumumba ». Ce qui est utile pour notre pays en ces jours mémorables, c’est de rendre un vibrant hommage non seulement à ces deux immortels. Les deux jours fériés devraient faire l’objet des moments de grandes réflexions scientifiques et de formation civique afin d’enseigner davantage au peuple congolais le sens de la patrie. Dans un pays où les choses évoluent normalement, au-delà du recueillement, lorsqu’ il faut célébrer les héros, on organise des journées portes ouvertes, des séminaires et colloques d’éducation civique pour enseigner à la population et léguer aux générations à venir, la vraie signification de ces journées. Nous déplorons la tendance observée actuellement à Kinshasa où les dates du 16 et 17 janvier sont devenues des jours de jouissance où des champagnes coulent à flot, des journées de danse et autres manifestations festives. Je demande aujourd’hui que le sang de ces héros crie à cet effet. Il s’agit-là des jours mémorables où on devrait enseigner aux Congolais le patriotisme et le nationalisme. Je souhaiterais que l’Etat congolais puisse en même temps reconnaître d’autres personnalités anonymes qui ont payé de leur vie pour ce pays et penser à leurs familles. C’est aussi pour nous l’occasion d’exiger de la Belgique les restes de Lumumba afin de lui réserver une inhumation digne de son rang. Les générations futures nous poseront des questions là-dessus. Les idées développées par ces deux héros ont-elles porté des fruits aujourd’hui dans la pratique politique en RDC ? Je dirai non. L’élite politique congolaise n’a pas su maintenir la flamme allumée. De par nos comportements, nous avons fait passer l’égoïsme au devant de toute chose. Nous avons fait passer nos ambitions politiques au devant des intérêts de notre pays. Les personnages dont nous parlons ont à leur tour su passer l’intérêt national avant tout. Aujourd’hui, malheureusement, leurs pensées n’ont jamais été suivies d’actes, des faits concrets. Je suis scandalisé de voir que certaines personnes ont le culot de se dire encore Lumumbiste et Kabiliste. C’est du populisme et de la supercherie. Quelle est la responsabilité de l’Occident dans la disparition tragique de ces deux héros nationaux ? Ce qui compte aujourd’hui pour le peuple congolais, c’est le courage de se remettre lui même en cause. Je crois que cette époque où l’on cherchait des boucs émissaires partout est révolue. L’heure est venue pour le peuple congolais de devenir maître de son propre destin. Des grandes questions que nous devons nous poser à ce stade sont celles de savoir qu’est-ce que nous devons faire pour renforcer la conscience collective nationale et pour sécuriser davantage notre territoire national. En menant une réflexion critique en tant qu’intellectuel, pourriez-vous nous dire quelles sont les limites, sinon les égarements dans la démarche politique de ces deux personnalités ? Je crois que nous avons tous le devoir de respect et de considération vis-à-vis de ces deux personnages. Mais en intellectuel, je vais m’efforcer quand même d’émettre une analyse objective sur leurs actions politiques. Je pense que Lumumba pouvait éviter le pire à ne pas s’hasarder à son tour de révoquer Kasa-Vubu en 1961. Ça aurait été mieux qu’il puisse porter l’affaire au niveau du Parlement en vue d’une solution politique consensuelle. Lorsqu’on se bat pour une cause, il faut s’assumer jusqu’ au bout. Parlant du Mzee Laurent-Désiré Kabila, ce dernier a manqué de dire la vérité aux Congolais lorsqu’on lui a reproché de s’être entouré des étrangers. Cependant, il a été par la suite le premier à les dénoncer lorsqu’il a remarqué qu’ils commençaient à constituer un danger pour sa survie politique. Un message à la population congolaise à cette occasion Je demande d’abord à tous les Congolais d’avoir une pensée pieuse en mémoire de à ces deux personnages. Aux politiques et intellectuels, je demande que l’histoire politique de la RDC soit réhabilitée. Nous devons tirer profit de l’héritage politique de ces deux grands esprits en privilégiant l’intérêt général dans toutes les actions à entreprendre. Nous sommes à une phase de notre destin où le peuple congolais doit se montrer davantage nationaliste et patriote vis-à-vis de son pays. Un Congolais ne doit pas être un danger pour un autre citoyen congolais. C’est une règle que nous devons tous apprendre à observer.
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