* Dans un plaidoyer, les évêques redoutent la tenue d’élections à la date prévue ou un scrutin bâclé, alors que les experts électoraux de l’organisation sous régionale d’Afrique australe se félicitent de l’exécution du calendrier électoral et de l’usage de la machine à voter.


A un peu plus de trois mois de l’échéance butoir du 23 décembre prochain, la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et la Troïka Politique, sécurité et défense de la Sadc y vont, chacun, de leur lecture du processus électoral en cours en RD Congo.

Dans un plaidoyer remis au Chef de l’Etat zambien Edgar Lungu, président de l’organe précité de la Sadc, les princes de l’Eglise catholique reconnaissent les avancées enregistrées dans ledit processus. En l’occurrence, l’existence d’un Fichier électoral audité, le respect des dates clef du chronogramme de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), la publication des listes provisoires des candidats aux élections présidentielle, législatives nationales et provinciales. A cela, la Cenco ajoute le renoncement du Président Joseph Kabila, à un troisième mandat consécutif, le financement progressif du processus électoral par le Gouvernement et le début d’affichage des listes électorales provisoires.









Cependant, les évêques émettent des réserves quant à la tenue d’élections véritablement libres, transparentes et apaisées. Selon les prélats catholiques, l’existence de 6 millions d’électeurs enregistrés sans empreinte digitale, la détermination de la Centrale électorale à utiliser la machine à voter, sans un consensus préalable des parties prenantes, l’exclusion de quelques principaux acteurs politiques de l’Opposition, l’éventualité de rejeter les élections biaisées aussi bien par beaucoup de Congolais que par la Communauté internationale…sont autant d’hypothèques qui pèsent sur la tenue des élections voulues transparentes, libres et apaisées par tous.

Dans leur conclusion, les évêques pensent que si les principales préoccupations qui motivent leur démarche ne sont pas évacuées positivement, il y a deux risques. Soit que les élections ne soient pas organisées à la date prévue du 23 décembre, soit qu’elles aient effectivement lieu. Mais de manière biaisée. Ce qui, selon la Cenco, risquerait de conduire le pays droit vers le chaos, avec la conséquence d’embraser toute la sous-région des Grands Lacs. D’où, le sens d’une sonnette d’alarme tirée depuis le week-end dernier à Kinshasa.


VIVEMENT L’ACCOMPAGNEMENT DE LA SADC

Quiconque pose un problème, est supposé avoir une partie de la réponse. Par rapport au doute qu’elle émet, quant à la tenue du scrutin en décembre prochain, la Cenco demande à la SADC, d’accompagner le peuple congolais et le processus électoral. Particulièrement sur les points qui paraissent, aux yeux de l’épiscopat, la pomme de discorde entre les parties prenantes. Aussi, les évêques exhortent-ils la SADC de peser lourd, afin de convaincre le Gouvernement à parachever la mise en œuvre des mesures de décrispation politique,convenues par les parties signataires de l’Accord de la Saint-Sylvestre de 2016, gages de la tenue d’élections inclusives et apaisées.

Par ailleurs, la même structure de l’Eglise catholique invite le président zambien à impliquer les différents protagonistes du processus électoral en cours, à accorder leurs violons sur la machine à voter. A défaut de recourir aux bulletins papiers, le cas échéant, conformément aux prescrits des lignes 38, 39 et 40 du calendrier électoral. A la CENI, la Cenco ne demande pas mieux que de clarifier des cas des personnes enregistrées dans le fichier électoral sans empreinte digitale. Pas seulement.

En ce qui concerne le volet logistique, les évêques demandent à la Centrale électorale de faire connaître, aussi bien à la Mission des Nations Unies pour la stabilité au Congo (MONUSCO) qu’aux partenaires de la RD Congo, les besoins réels afin de permettre à ces derniers, de contribuer au déploiement des kits électoraux sur terrain. S’ajoute à cela, l’appel de toutes les parties prenantes à la tenue effective d’élections crédibles, transparentes, inclusives et apaisées, le 23 décembre 2018.

Avant de s’envoler pour Lusaka, Mgr Fridolin Ambongo, vice-président de la CENCO avait déclaré à la presse à Kinshasa, que la Zambie avait de solides principes démocratiques qui lui avaient permis de maintenir la paix et de passer par les urnes sans anicroches. Et de poursuivre : "la RDC considère la Zambie comme un modèle pour la paix, la sécurité et le respect de l’Etat de droit ".


L’APPROBATION DE LA SADC

Pendant que la Cenco émet des doutes sur la tenue effective des élections à la date prévue, la Sadc elle, ne cache pas son approbation des étapes du processus électoral franchies à ce jour en RD Congo. A l’issue d’une mission du Forum des Commissions électorales de la SADC (ECF-SADC), organisée du 5 au 7 septembre courant à Kinshasa, il a été constaté que l’évolution des opérations électorales en RD Congo est plutôt sur la bonne voie.

En ce qui concerne l’usage de la machine à voter, par exemple, la Mission en est arrivée à la conclusion que cette imprimante a le mérite de résoudre les vrais problèmes d’ordre logistique auxquels la RD Congo se trouve confrontée. Notamment, l’obligation de réduire aussi bien les délais que le coût même des élections. C’est donc ici, que cette structure de la Sadc a loué, non sans raison, le génie créateur rd congolais pour sa trouvaille. Ce, avant de féliciter l’équipe conduite par Corneille Nangaa qui, jour après jour, ne cache plus sa détermination à réussir le pari des élections à la date prévue.

Toutefois, la Sadc a encouragé la Ceni à intensifier la campagne d’explication et de sensibilisation aussi bien des acteurs politiques que de la population, à l’utilisation de la machine à voter. Question de dissiper tout malentendu susceptible d’entraver le processus électoral en cours. Avec un regard sur le calendrier électoral, la Mission de la Sadc s’est également déclarée satisfaite de l’application sans faille, de la Feuille de route de la Ceni. C’est donc cette exécution du calendrier électoral qui renforce l’optimisme des experts de la Sadc, quant à la tenue effective des élections en décembre prochain.

Aussi, le groupe de travail de la Sadc a-t-il recommandé à la Centrale électorale rd congolaise de maintenir le cap, avec le même engagement, dans la poursuite de l’exécution des activités, conformément au calendrier électoral. A la lumière de l’évaluation mi-parcours du processus électoral en RD Congo par la Mission cette organisation sous-régionale, tout donne à penser que certaines préoccupations des évêques exprimées au président zambien, auront déjà trouvé des réponses. Ci-dessous, le texte intégral dudit plaidoyer. Laurel KANKOLE et Emma MUNTU


PLAIDOYER DE LA CENCO AUPRES DE SON EXCELLENCE MONSIEUR EDGAR LUNGU, PRESIDENT DE LA ZAMBIE

Plaidoyer de la CENCO auprès de Son Excellence Monsieur Edgar LUNGU, Président de la Zambie et Chairman de la Troïka de la SADC sur la Politique, la Sécurité et la Défense.


EVALUATION DU PROCESSUS ELECTORAL EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO


INTRODUCTION

Nous, Evêques membres de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO), en tant que parrains de l’Accord de la Saint-Sylvestre (Accord du 31 décembre 2016), sommes préoccupés par l’état actuel du processus électoral de notre pays.

Nous sommes convaincus que, seules les élections crédibles, transparentes, inclusives et apaisées constituent la solution et l’unique voie de sortie pacifique de la crise socio-politique que traverse notre pays depuis 2016.

Considérant l’importance et le rôle de la SADC dans la sous-région, nous voulons partager avec vous, en tant que Chairman de la Troïka de la SADC sur la Politique, la Sécurité et la Défense, nos préoccupations concernant l’évaluation du processus électoral en République Démocratique du Congo dans la conviction qu’avec vos collègues de la SADC, vous pouvez aider le Peuple congolais à sortir de cette crise et à gagner le pari de l’organisation des bonnes élections crédibles, transparentes, inclusives et apaisées, le 23 décembre 2018.
I. POINTS POSITIFS
- L’existence d’un fichier électoral audité ;
- Le respect des dates clé du calendrier électoral ;
- La publication des listes provisoires des candidats à l’élection des députés provinciaux ;
- La publication des listes provisoires des candidats à l’élection des députés nationaux ;
- La publication des listes provisoires des candidats à l’élection présidentielle ;
- La désignation du candidat du Front Commun pour le Congo (FCC), plateforme électorale du Président de la République en fonction ;
- Le financement progressif du processus électoral par le Gouvernement congolais
- Le début d’affichage des listes électorales provisoires.
II. INQUIETUDES
- L’existence d’environ 6 millions d’électeurs enregistrés dans le fichier électoral sans empreintes digitales, ledit enregistrement étant biométrique ;
- La détermination de la CENI à utiliser la machine à voter malgré l’absence d’un consensus des parties prenantes ;
- La tension croissante du climat socio-politique :
faible mise en œuvre des mesures de décrispation de l’espace politique (cas emblématiques : prisonniers et exilés politiques) ;
- les dénonciations par quelques parties prenantes de la manipulation de la CENI et des Cours et Tribunaux par le pouvoir en place ;
- l’exclusion du processus électoral des quelques acteurs majeurs de l’opposition ;
- les interdictions, les dispersions, les répressions des marches et manifestations publiques organisées par les partis et regroupements politiques de l’opposition et les mouvements citoyens ;
- la confiscation des médias publics au profit du pouvoir en place ;
- La persistance de l’insécurité, notamment à l’Est de la République Démocratique du Congo ;
- Le retard d’inviter les missions internationales d’observation électorale. Pour gagner en transparence et en crédibilité, l’élection requiert le regard de tous ;
- L’éventualité de rejeter des élections biaisées par beaucoup de congolais et par la communauté internationale.
III. RECOMMANDATIONS
La CENCO recommande à la SADC d’accompagner le Peuple congolais et le processus électoral particulièrement sur les points suivants :
- Que Son Excellence Monsieur le Président de la Zambie et Chairman de la Troïka de la SADC sur la Politique, la Sécurité et la Défense, puisse peser de tout son poids pour convaincre le Gouvernement congolais à parachever la mise en œuvre des mesures de décrispation politique selon l’Accord de la Saint-Sylvestre et pour la tenue d’élections inclusives et apaisées ;
- Impliquer les parties prenantes à trouver le consensus sur la machine à voter/ou à recourir aux bulletins papiers, le cas échéant, comme c’est prévu dans les lignes 38, 39 et 40 du calendrier électoral ;
- Appeler la CENI à la clarification des cas des personnes enregistrées dans le fichier électoral sans empreintes digitales ;
- Appuyer l’accréditation des Observateurs électoraux tant nationaux qu’internationaux : du 08 novembre 2018 au 10 décembre 2018 (ligne 42 du calendrier électoral) ;
- Appeler la CENI à faire connaître à la MONUSCO et aux partenaires de la République Démocratique du Congo les besoins logistiques pour contribuer au déploiement des kits électoraux sur terrain ;
- Appeler toutes les parties prenantes à la tenue effective d’élections crédibles, transparentes, inclusives et apaisées, le 23 décembre 2018.
CONCLUSION
Si les questions soulevées ci-dessus ne trouvent pas des bonnes réponses, nous risquons, soit de ne pas avoir les élections le 23 décembre 2018, soit avoir des élections biaisées. Dans l’un ou l’autre cas, faute d’élections crédibles, inclusives et apaisées, la République Démocratique du Congo risque de basculer dans la violence voire dans le chaos qui peut embraser toute la sous-région des grands-Lacs.
Kinshasa, le 07 septembre 2018
Mgr Fridolin AMBONGO
Archevêque Coadjuteur de Kinshasa
Vice-Président de la CENCO

Mgr Marcel UTEMBI TAPA 
Archevêque de Kisangani
Président de la CENCO
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