Bercy de Fally IPUPA. Pour les uns, l’artiste a gagné son pari ; pour les autres, les « combattants » n’ont certes pas atteint leur objectif, mais ils ont quand même le mérite d’avoir réussi à se faire entendre. À ce dernier propos, une question me taraude l’esprit : dans la situation qui est celle du Congo, que doit-on prioriser: faire parler de soi [en bien ou en mal] ou gagner la guerre de l’opinion ?













De nos jours, l’on ne peut mener une guerre et/ou militer pour une cause de manière efficace en se passant de l’opinion publique. Les gouvernements, les grandes armées et institutions du monde l’ont bien compris. Sans conquête de l’opinion publique, il est difficile de gagner une guerre ou de faire triompher une cause. C’est pourquoi dans les pays occidentaux les sondages d’opinion sur les questions d’importance capitale sont souvent scrutés à la loupe aussi bien par les décideurs politiques que par les organisations concernées par celles-ci.
Dans un monde marqué par l’explosion des systèmes de communication, où les gens subissent quotidiennement l’assaut permanent de milliers d’informations qui s’entrechoquent, se télescopent dans la presse, à la télévision et dans les réseaux sociaux, se contenter d’informations distillées dans les médias de manière assez alambiquée pour flatter son égo est une erreur monumentale. Tout Français qui a suivi les médias de son pays ce weekend a retenu une seule information : des « opposants » congolais opposés au concert de la star congolaise Fally Ipupa ont vandalisé des biens privés à la Gare de Lyon. Point. Est-ce la meilleure façon de vendre la « cause » du Congo en France ? Je doute fort. Mais les «combattants» et leurs soutiens pensent sûrement le contraire. C’est leur droit.
Mais la réalité est qu’ils ont perdu la bataille de l’opinion en France. Côté congolais, on remarque également un recul net du soutien apporté à ce mouvement. Même les gens qui sont contre le retour des concerts en Europe s’opposent désormais à ce qui reste du mouvement « combattant ». Que de se demander pourquoi, la plupart d’entre eux se sont enfermés dans un dogmatisme qui ne dit pas son nom. C’est leur droit.
Il n’empêche qu’un changement de stratégie et/ou une certaine remise en question s’impose. Mais connaissant la nature du congolais et le « kibo ngayi » qui le caractérise, je ne m’attends pas à ce que la plupart des « combattants » se remettent en question ou questionnent leur stratégie. Comme les Talibans et autres Kingakatiens, ils sont persuadés d’avoir TOTALEMENT raison. Comme les « Talibans », ils agressent et diffament ceux qui ne pensent pas comme eux. Voilà pourquoi je ne cesse de dire que le mal est et reste congolais. Ba misusu baza mabe, ebongo yo, bino? Ce pays est malade de ses enfants...
Les « combattants » doivent comprendre qu’un combat sans communication efficace (destinée à gagner l’opinion publique à la cause) est voué à l’échec. La communication, c’est une affaire d’image avant tout, et l’image est un pilier essentiel dans toute communication. Elle peut être trompeuse, mais si elle est bien « travaillée », elle triomphera face à la vérité des faits. L’image façonne les perceptions. On peut parler de vous tous les jours, mais si le message qui est distillé à votre sujet est négatif, c’est votre image qui en pâtira et vous finirez par avoir le monde contre vous. Si le message est positif, c’est l’effet contraire qui se produira. La diffusion en boucle par les médias d’images angoissantes de la Gare de Lyon participe d’une mise en scène qui fait le jeu de certains groupes identitaires français dont les positions sur les immigrants, pour ne pas dire les Noirs, sont bien connues. Il ne faut donc pas être naïfs et verser dans un triomphalisme stupide propre aux nègres émotifs.








La plus grande réussite du Rwanda réside dans l’image que le régime de Paul Kagame a réussi à forger au fil des ans et à imposer au monde entier. Cette image est le fruit d’une communication extrêmement efficace menée de main de maître par Kagame et les siens avec le soutien de certaines firmes de com. C’est donc sans fausse modestie que le leader du FPR déclara à un journaliste britannique en 1998: « Nous avons mené la guerre de la communication et de l’information mieux que quiconque. Nous avons trouvé une nouvelle façon de faire les choses ». On ne saurait mieux dire...
Bref. Le succès du Rwanda, c’est sa communication. C’est grâce à une communication redoutable que le régime rwandais a pu conquérir les cœurs et les esprits à sa cause. C’est [entre autres] parce que le Rwanda a gagné la bataille de l’opinion que le Congo peine à se faire entendre sur la scène internationale. C’est [entre autres] parce que le lobby tutsi pro-FPR a gagné la guerre de l’opinion que les Congolais peinent à faire entendre raison au reste du monde quant au drame que connaît leur pays. Et lorsqu'un journaliste ose interviewer un fin connaisseur de la région des Grands Lacs (on peut penser au cas Jacques Matand) sur la vérité des faits dans cette région, Kigali s'arrange pour que cela ne se reproduise plus jamais. Pourquoi ? Parce qu'il faut à tout prix éviter que le monde comprenne ce qui se passe au Congo; seule manière d'empêcher qu'une certaine opinion publique se montre sensible à la situation des Congolais. Combien l'ont compris ?
Nous pouvons crier, vociférer et casser, mais tant que nous n’aurons pas l’opinion publique avec nous, il nous sera difficile de renverser les rapports de force en notre faveur face à des gens qui auront toujours avec eux l’opinion publique ou une partie de celle-ci. Petit conseil pour finir : le plus important en stratégie est la compréhension de l’adversaire et non l’expression de ses propres frustrations. À bon entendeur...
Je bois mon lait nsambarisé...
PATRICK MBEKO
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