Tel un enfant qui a sali sa chemise blanche d’uniforme avec une pâte chocolatée, plus il frotte pour faire disparaître la tâche; plus elle s’étend. Ainsi en est-il de la gestion désastreuse de la communication de l’Union Sacrée en vue de contenir la déflagration de la bombe lâchée par les propos maladroitement sincères du speaker de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso.


Le contorsionnisme rhétorique des partisans de « l’Etat de droit » et du « peuple d’abord » se transforme en un cocktail de cacophonie et de contradictions. Même la très bavarde et surmediatisée Inspection générale des finances (IGF) s’enferme dans un mutisme assourdissant. Les députés avisés comme Delly Sessanga, Ado Ndombasi ou Jean Baptiste Kasekwa n’ont pas attendu longtemps pour prendre leurs distances avec ce qu’ils considèrent comme une « escobarderie ».


Cependant, dans une quinzaine de jours, le deuxième lot de 250 SUV Hyundai Palisade sera livré et ces véhicules finiront par être distribués aux députés nationaux. Assurés de la crédulité d’un peuple naïf friand d’informations sensationnelles et divertissantes, il suffira d’un nouveau fait divers pour que l’opinion tourne la page.

Il est vrai qu’un peuple qui oublie son passé est condamné à le revivre. L’acquisition des véhicules Hyundai Palisade par Félix Tshisekedi pour s’assurer de la loyauté des députés nationaux rappelle tristement un épisode similaire de corruption massive et silencieuse de Joseph Kabila en avril 2009.

A l’époque, la majorité parlementaire avait été soumise à une épreuve de loyauté. Pour avoir dénoncé l’entrée de l’armée rwandaise sur le territoire congolais sans l’aval du Parlement, Vital Kamerhe, alors président de l’Assemblée nationale, avait été secoué; en dépit du soutien de l’opinion, très hostile au Rwanda, Vital Kamerhe avait fini par rendre son tablier et l’élection d’un nouveau bureau s’était imposée. Les sondages plaçaient le candidat de Joseph Kabila en ballottage défavorable face à François Mwamba du MLC et Jean Baudouin Idambituo soutenu par Vital Kamerhe.
Kabila s’était alors souvenu que les députés nationaux avaient obtenu un crédit véhicule adossé à leurs émoluments auprès de deux banques commerciales privées depuis 2008. La durée du prêt étant de 3 ans, l’encours restant dû représentait encore un lourd fardeau pour les honorables députés, qui étaient amputés de 30% de leurs émoluments mensuels pour rembourser le crédit.

C’est alors que Joseph Kabila leur fit la promesse d’éponger anticipativement leurs engagements en échange du soutien à la candidature de son candidat, Evariste Boshab. A l’issue d’une plénière marathon inédite de plus 17 heures, ce dernier avait infligé une défaite sans appel à ses compétiteurs, avec 329 voix sur 484 votants.

Respectueux de sa parole, Joseph Kabila avait ordonné au Trésor public d’apurer intégralement les engagements de tous les députés nationaux. Pas seulement ceux de son alliance pour la majorité présidentielle, mais tous les députés nationaux y compris ceux de l’opposition, Vital Kamerhe inclu.
Ainsi, aucun ne cria à la corruption. Soumis à l’omerta, fortement solidaires quand il s’agit de leurs avantages personnels, les élus du peuple s’accordèrent dans l’unité de silence et de jouissances. L’entourloupette s’exécuta en douceur, sans tambours ni trompettes.

Douze ans plus tard, l’histoire se répète mais le remake échoué lamentablement, faute de casting et de boulimie aveugle. Le temps et le contexte ont changé. Il y a maintenant la vigilance citoyenne des mouvements citoyens, le rôle incontournable des réseaux sociaux dans le partage des informations, l’intransigeance de la population à l’égard d’un pouvoir qui s’est engagé à éradiquer les antivaleurs.

Malheureusement, les mauvaises pratiques ont la peau dure. La misère s’intensifie dans l’indifférence des politiciens. Les jours passent et se ressemblent au Congo de Lumumba.
L’armée rwandaise peut s’y balader sans l’avis de la représentation nationale au nom du bon voisinage, mais l’inverse est inimaginable. Nous sommes toujours ce pays qui reçoit une aide de 180.000 euros de l’Union européenne pour les victimes de l’éruption volcanique du Nyiragongo, mais qui est capable de dépenser le même montant pour la maquette du marché central de Kinshasa. Nous sommes toujours ce Congo de Mzee Kabila qui ignore qu’à côté des Hyundai Palisade, le constructeur sud-coréen fabrique aussi des engins agricoles capables de faire du Congo le grenier de l’Afrique. Le déconnomètre fonctionne à pleins tubes, dirait Alain Juppé.

 


Opinions Par Stéphane L Manzanza, banquier et militant anti-corruption

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