Les associations britanniques s’alarment de plusieurs tentatives de suicide chez des migrants qui pourraient être envoyés au Rwanda pour le traitement de leur demande d’asile. Londres et Kigali ont en effet signé le mois dernier un accord prévoyant d’externaliser l’asile sur le continent africain. Un premier vol est prévu le 14 juin, selon le Home Office. Les associations britanniques multiplient les recours en justice pour annuler ces expulsions.


Les exemples commencent à affluer dans la presse britannique. Une Iranienne qui a tenté de se suicider a été sauvée in extremis. Hospitalisée en urgence, elle n’aurait pas supporté son expulsion prochaine vers le Rwanda pour le traitement de sa demande d’asile. Même désespoir chez un Yéménite de 40 ans qui a lui aussi tenté de mettre fin à ses jours. Dans une vidéo adressée au Premier ministre Boris Johnson, il a déclaré « n’avoir pas d’autre choix ». Le jeune homme avait appris à son arrivée sur le sol britannique qu’il risquait d’être renvoyé à 7 000 km de là.

Un Afghan de 32 ans, arrivé enfant au Royaume-Uni a lui aussi tenté de se supprimer en apprenant qu’il risquait un envoi vers Kigali. Autant d’histoires qui font écho au suicide d’Hassan à Calais en France, le mois dernier. « Très fatigué », selon ses amis, Hassan a mis fin à ses jours avant même de tenter la traversée de la Manche vers l’Angleterre. « Il ne parlait pas beaucoup. Peut-être que les dernières nouvelles disant que le Royaume-Uni prévoyait d’envoyer les migrants comme nous au Rwanda n’a fait qu’ajouter à son désespoir », avait déclaré un de ses compagnons de route.
Actions en justice

Londres a signé le 14 avril un accord de 144 millions d’euros avec le Rwanda pour que Kigali accueille sur son sol des migrants de diverses nationalités arrivant du Royaume-Uni. Cet accord avec le Rwanda n’est pas étonnant. Priti Patel, la ministre de l’Intérieur promettait depuis des années d’externaliser le traitement des demandes d’asile vers des pays tiers. Concrètement, l’accord ne concernerait que des « jeunes hommes » arrivés illégalement sur le sol britannique depuis le 1er janvier 2022. Ces derniers seraient envoyés par avion sur le territoire rwandais. Les migrants verraient alors leurs demandes d’asile traitées dans ce pays d’Afrique de l’Est et seraient encouragés à s’y installer.

Le premier vol est prévu le 14 juin, selon le Home Office, même si des recours sont examinés en ce moment même pour empêcher le premier décollage. PCS (Public and Commercial Services Union), le syndicat du personnel du ministère de l’Intérieur, et plusieurs organisations caritatives de réfugiés ont lancé des actions en justice.
« Les actions de Priti Patel poussent les victimes du monde entier à se suicider par désespoir »

Pour Clare Moseley, directrice générale de l’association caritative Care4Calais, les tentatives de suicide ne sont pas surprenantes. « Le but de ce plan rwandais est d’agir comme un moyen de dissuasion encore plus terrifiant pour les réfugiés », explique-t-elle. « [Cet accord] n’est pas l’acte d’une nation civilisée ou compatissante. Il n’est pas étonnant que les actions de Priti Patel poussent les victimes du monde entier à se suicider par désespoir. »



Même son de cloche de la part de Enver Solomon, directeur général du Conseil britannique des réfugiés. « Nous avons reçu un certain nombre de rapports inquiétants de nos services travaillant directement avec les demandeurs d’asile en ce qui concerne l’impact dévastateur de cette menace d’expulsion sur eux », a-t-il déclaré. « Nous entendons des histoires tragiques sur l’impact grave que cet accord a sur la santé mentale des exilés, y compris des rapports qui font part d’actes d’automutilation. »

Le Premier ministre Boris Johnson – attendu à Kigali fin juin pour le sommet du Commonwealth – et Priti Patel, comptent maintenir cette date malgré les appels de détresse des associations et les actions en justice. « Je ne me laisserai pas dissuader et resterai pleinement engagée à mettre en œuvre ce qu’attend le public britannique », a déclaré la ministre de l’Intérieur cette semaine.
28 000 traversées de la Manche en 2021

Selon la presse britannique, qui cite le Home office, des demandeurs d’asile sélectionnés pour être transférés à Kigali ont été placés en centre de détention. Les autorités refusent de communiquer sur le nombre de personnes concernées. D’après le journal The Guardian, parmi les personnes retenues figurent un groupe de Soudanais ayant traversé la Manche le 9 mai en kayak, des Albanais et au moins un Afghan débarqué mi-mai au Royaume-Uni sur un canot.




En outre, comme l’a déclaré le ministre de la Justice Dominic Raab, cet accord Londres-Kigali ne « règlera pas le problème » des arrivées illégales au Royaume-Uni. Seule une centaine de personnes seront envoyées chaque année au Rwanda, a précisé le ministre. Une goutte d’eau au regard des milliers de débarquements annuels.

En 2021, 28 500 personnes ont traversé la Manche, et depuis janvier ils sont 9 000 à avoir atteint les côtes britanniques à bord d’embarcations de fortune. Force est de constater que le projet, visant à dissuader les traversées de la Manche selon le gouvernement, n’a pour l’heure pas atteint ses objectifs. Un peu plus de 1 250 personnes ont fait la traversée pour le seul mois de mai 2022, affirme le quotidien britannique The Telegraph.


 

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