Protection des minorités en RDC
Les autochtones pygmées expulsés du Parc national de Kahuzi Biega réclament justice
C’est depuis les temps immémoriaux que les peuples autochtones pygmées occupaient les espaces qui sont aujourd’hui transformés en parc, notamment celui de Kahuzi Biega au Sud-Kivu. C’est sans consultation et enquête préalables que les autorités congolaises, par Ordonnance-Loi n°70-316 du 30 novembre 1970, ont pris la décision de transformer ladite réserve en Parc national de Kahuzi Biega (PNKB), devenu patrimoine mondial avec une superficie de 60.000 hectares, en restreignant les droits coutumiers des peuples autochtones (PA) tels que les droits d’habitation, de chasse, de cueillette, de ramassage, d’usage, qui du reste, sont des droits fondés sur leur mode de vie.
Comme si cela ne suffisait pas, par l’Ordonnance n°75/238 du 22 juillet 1975, portant modification des limites du PNKB, de 60.000 hectares à 600.000 hectares, le gouvernement congolais par le biais de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), a dépouillé complètement les peuples autochtones pygmées, de tout espace de vie et d’épanouissement, sans consultation ni consentement préalables. Cette situation a conduit aux expulsions cavalières des autochtones pygmées dont le dernier a quitté cette réserve en 1985, en passant outre les dispositions de la constitution et de la Loi n°77-001 du 22 février 1977, sur l’expropriation pour causes d’utilité publique. Conséquence, 66 requérants peuples autochtones pygmées parmi les milliers victimes de l’expulsion, ont décidé d’initier une action en justice contre la RDC et l’ICCN, en vue de voir les cours et tribunaux trancher ce litige qui n’a que trop duré.
C’est donc pour dénoncer ce cas d’injustice dont ils sont victimes, qu’une représentation des peuples autochtones pygmées a animé un point de presse mardi 22 octobre 2013 dans la salle des réunions de la paroisse Notre Dame de Fatima de Gombe, en collaboration avec l’ONG Environnement, ressources naturelles et développement (ERND), sous le thème : « Justice équitable aux peuples autochtones : Les autochtones pygmées expulsés du PNKB au Sud-Kivu depuis 1970, réclament à la justice congolaise, un procès équitable pour l’accès à leurs terres traditionnelles dont ils ont été dépossédés ».
A la recherche de leurs droits, 66 requérant peuples autochtones pygmées parmi les milliers de victimes de l’expulsion dans le PNKB, ont en effet initié une action en justice contre la RDC et l’ICCN, en vue de voir les cours et tribunaux condamner ces derniers, à faire réintégrer les victimes de l’expulsion, dans leurs terres et espaces naturels, tout en réparant tous les préjudices subis par eux, du fait de cette expulsion.
Genèse de l’affaire
Selon maître Innocent Ntakobanjira, Conseiller technique au sein de l’ENRD, le premier juge saisit dans cette affaire au Tribunal de grande instance (TGI) d’Uvira, siège secondaire de Kavumu, a rendu jugement d’incompétence, pour la simple raison qu’il est superfétatoire d’aborder la question relative à l’expulsion, à la dépossession des PA dans le PNKB et de conséquences qu’elle a entraîné sans entamer l’Ordonnance portant extension des limites du PKNB, en l’occurrence l’Ordonnance n°75/238 du 22 juillet 1975.
Contestant cette décision qui n’aborde pas le fond du litige et où le juge s’abstient de dire le droit sur base de la demande de requérants PA pygmées, les 66 demandeurs parmi les victimes de l’expulsion, ont porté pour mal juger leur dossier, devant le juge de la Cour d’appel de Bukavu, en second degré, en vu de voir celui-ci corriger les erreurs commises par le premier juge (TGI Uvira, siège secondaire de Kavumu) et de faire droit aux différentes demandes postulées par les requérants, dont principalement la réintégration dans leurs terres traditionnelles.
Malheureusement, le juge d’appel du deuxième degré, a reconduit la décision du premier juge. Qu’en l’espèce, les deux actes à savoir : les ordonnances-loi n°70-316 du 30 novembre 1970, avec une superficie de 60.000 hectares et celle n°75/238 du 22 juillet 1975, portant modification des limites du PNKB à 600.000 hectares étant des actes législatifs, échapperaient au contrôle de la cour d’appel, leur irrégularité ou inconstitutionnalité n’est réservée qu’à la seule compétence de la Cour constitutionnelle.
De ce qui précède, les différentes victimes de la dépossession des terres des PA dans le Kahuzi Biega, dont une délégation composée de Chefs Jean-Pierre Kaneto Mwendanabo (village de Bulolo) ; Ntavuna Cizungu (Représentant des pygmées au Sud-Kivu) ; Balume Cibulula (village chibuga) ; Kabudesiya M’Muverhuza et des mamans Bifuko Mawazo M’Mbale (village Kamakongo) et Salome Teso M’Miraso (groupement Miti, Kabare/Nord) séjourne à Kinshasa, veulent porter leur cause devant la Cour suprême de justice, qui par voie de cassation, pourra casser toutes les décisions rendues par les juridictions inférieures, notamment le TGI d’Uvira, siège de Kavumu et la Cour d’Appel de Bukavu.
Pour ce faire, ils demandent aux cours et tribunaux de la RDC, de reconnaître les droits qu’ils ont sur ces terres, les réintégrer dans leurs terres expropriées, et allouent des dommages et intérêts pour tous les préjudices subis, tout en facilitant l’accès aux services sociaux de base (éducation, santé, emploi, habitat…
Depuis qu’ils ont été dépossédés de leurs terres du PNKB, leurs conditions de vie se sont amenuisées, à telle enseigne que les hommes ne travaillent plus, les enfants ne vont plus à l’école, les femmes n’ont plus d’espace pour cultiver les champs, afin de subvenir aux besoins de ménage. Tout ce peuple regrette aujourd’hui d’être dépossédé de leur terre, alors que celle-ci constituait leur pharmacopée.
La RDC ayant souscrit aux engagements internationaux, notamment dans la protection des minorités, en l’occurrence les peuples autochtones, les victimes de cette expropriation estiment que les autorités du pays entendront leur voix et les remettront dans leurs droits. Sinon, comment peuvent-ils vivre comme des étrangers dans leur propre pays, alors qu’ils disposent de leurs terres aujourd’hui spoliées ? Pourquoi d’autres congolais sont dédommagés dans ce genre de situation, sauf eux ? Pourquoi cette discrimination à leur égard ? Autant des questions qu’ils ne cessent de se poser et pour lesquelles ils attendent des réponses appropriées de la part des autorités congolaises, qui semblent commettre jusque là, l’infraction de non assistance en personne en danger.
A noter que l’ONG ENRD est membre de la société civile environnementale qui œuvre dans la protection des droits PA ; les questions de changement climatique ; de réhabilitation des infrastructures communautaires. Elle a été créée en 2003 au Sud-Kivu après des études et enquêtes sur les PA, lesquelles ont sollicité l’expertise de l’ENRD qui collabore avec cette catégorie de la population, dans le cadre du projet PAJA, qui consiste à plaidoyer pour la protection des droits administratifs et judiciaires des PA.
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