La tenue lundi et mardi à Kinshasa de la 4ème session de la Commission spéciale Défense et sécurité entre la RDC et la RC au plus fort de la crise des expulsions massives des RD-Congolais du Congo-Brazzaville s’avère une dernière chance de sauver les meubles de l’explosive tension créée entre les deux pays voisins par de ces refoulements décriés de plus en plus par la communauté internationale même
Kinshasa la capitale de la RDC abrite depuis lundi jusque mardi la 4ème session de la Commission spéciale Défense et sécurité entre les deux Congo voisins. Il s’agit d’une rencontre à la fois cruciale et décisive qui va déterminer les relations que les deux pays vont entretenir après la pourriture de la crise qu’ils vivent actuellement suite à la dramatique situation des refoulements massifs des RD-Congolais du Congo-Brazzaville.
Les délégations des deux pays à ces assises sont conduites par les ministres de deux Congo en charge de l’Intérieur et de la Décentralisation, respectivement M. Richard Muyej pour la République démocratique du Congo et M. Raymond Zéphirin Mboulou pour la République du Congo.
Organisée dans le cadre de l’Hôtel Fleuve Congo de Kinshasa, la rencontre attendue avec une certaine anxiété par les deux parties, se présente en rendez-vous de la dernière chance appelée à décanter le crise risquant d’amener les deux Congo au bord de l’éclatement de leurs relations de bon voisinage. Raison pour laquelle les échanges sont scrupuleusement préparés par les deux parties afin de les faire aboutir à une réconciliation désespérément recherchée.
Ainsi fixé à ce début de semaine après plusieurs missions de bons offices menées de part et d’autres et qui n’avaient jusque-là amené aucun des deux camps à tempérer les emportements des vexations qu’ils se sont adressées, le rendez-vous de l’Hôtel Fleuve Congo est un tournant dans les turbulences actuelles des relations entre les deux Congo.
La crispation était visible dans le chef des membres des deux délégations aux assises. Celle du Congo-Brazzaville a failli faire capoter la rencontre par l’impatience qu’elle a fait piaffer aux hôtes de Kinshasa qui ont attendu quatre heures au de-là de l’heure convenu de l’accueil au beach de la SCTP.
Après les commodités protocolaires de cet accueil qui s’est effectué dans une ambiance de grande circonspection de la part de chacune des deux parties, c’est à l’ouverture des travaux qu’ont pu être entamés les inévitables joutes du vidange des récriminations que les deux délégations ne pouvaient continuer de contenir de s’adresser.
Effectivement les adresses des ministres chefs des délégations à la séance d’ouverture n’ont point occulté les divergences. Au point que les observateurs plus ou moins extérieurs aux débats notamment parmi les membres de la presse témoins de l’événement ont eu des pressentiments que les participants n’allaient pas trouvé de terrain d’entente pour la réconciliation escomptée après la sorte de lavage de linge sale en famille qui paraissait malgré tout l’objectif recherché par tout le monde.
Comment ne pouvait-on pas redouter de capotage de dialogue dès lors que le ministre du Congo-Brazzaville Zéphirin Mboulou n’affichait point l’accommodement auquel paraissait s’en tenir son homologue RD-Congolais Richard Muyej ?
Le discours de l’hôte de Brazzaville campait sur le refus d’aveu des dérapages commis par les autorités de la République du Congo dans l’indéniable bras-de-fer des expulsions opérées des ressortissants de la République démocratique du Congo. Le ministre Zéphirin Mboulou a systématiquement renié et les chiffres ahurissants des expulsions tout comme les scandaleuses méthodes utilisées.
Le chef de la délégations du Congo-Brazzaville y est allé même avec un brin d’arrogance dans sa vitupération de ce qu’il a carrément qualifié de voyoucratie de la part des RD-Congolais qui serait à la base de la répulsion avec laquelle ils sont traités par les voisins du Congo voisin. Cette arrogance également affichée par plus d’un membre de la délégation brazzavilloise était susceptible d’embarrasser le ministre hôte Richard Muyej qui, après avoir démontré dans son discours d’ouverture des travaux le choc et la déception ressentie côté RD-Congo par la surprise et la brutalité des massives expulsions, était acculé à pronostiquer un arrangement nécessaire auquel les deux parties étaient comme condamnés.
Le ministre Muyej se devait effectivement de rassurer parvenir coûte que coûte à aplanir les angles. Aussi a-t-il indiqué dans ses réponses à la presse que les experts y parviendraient nécessairement.
Il est clair que la partie RDC était résolue à éviter l’échec, alors que cette de la RC voulait camper sur ses positions de tout mettre sur le dos des RD-Congolais. L’histoire jugera de quel côté s’est trouvé le bon sens et a primé la sagesse. Au moins aux travaux des experts chaque partie a pu brandir ses dossiers pour la démonstration de la responsabilité dans le problème surgi. Voici l’adresse du ministre Muyej qui n’avait tout de même pas mâché ses mots dan la dénonciation des excès commis.
Discours du ministre Richard Muyej
Excellence Monsieur le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation de la République du Congo,
Excellence Monsieur le Ministre à la Présidence de la République chargé de la Défense nationale de la République du Congo,
Monsieur le Vice- Ministre de la Décentralisation et Affaires coutumières,
Monsieur le Vice- Ministre de la Coopération internationale,
Messieurs les Experts,
Distingués Invités,
Au nom du Gouvernement de la République Démocratique du Congo, je souhaite la bienvenue à Kinshasa à la très forte délégation de la République du Congo aux travaux de la 4ème session de la Commission spéciale Défense et Sécurité entre la République Démocratique du Congo et la République du Congo, que conduisent respectivement le Ministre de l’intérieur et de la Décentralisation, Monsieur Raymond Zéphirin Mboulou, et le Ministre à la présidence de la République, chargé de la Défense nationale, Monsieur Charles Richard Mondjo.
Excellences Messieurs les Ministres,
Lorsque les délégations de nos deux pays respectifs se sont séparées, le 06 mars 2014, à Oyo, en République du Congo, à la fin des travaux de la troisième session spéciale Défense et Sécurité, rien, absolument rien ne présageait les événements qui ont suivi, un mois seulement après, à Brazzaville, par rapport aux populations de la République Démocratique du Congo vivant dans ce pays.
La décision, pourtant légitime, d’éloigner les étrangers en situation irrégulière ou mêlée à des actes ignobles de banditisme ou à toute autre forme de criminalité, a vite loupé sa dose de régularité, puisqu’ayant violé l’esprit et le contenu de la Convention tripartite du 03 décembre 1999 entre la République du Congo, votre pays, l’Angola, un autre pays voisin, et la République Démocratique du Congo, notre pays. L’effet de surprise pour nous, la brutalité et la violence qui ont accompagné ce mouvement, ont occasionné des dérapages dommageables.
Et pourtant, les résolutions prises à l’issue de la session d’OYO faisaient remonter à nos esprits à tous, la convivialité et l’esprit de fraternité que laissait transpirer le texte de la convention sus-évoquée.
Je me permets, à titre de rappel, d’en épingler quelques-unes :
« Concernant l’examen des questions de migrations, la partie RDC a transmis à la partie RC les derniers amendements relatifs au projet de Convention sur la circulation et l’Etablissement des personnes et des biens. La partie RC en a pris acte et transmettra à la partie RDC ses observations par voie diplomatique.
S’agissant de la lutte contre l’immigration clandestine, la Commission s’est félicitée de la baisse progressive de ce phénomène.
Concernant les conditions de trafic et de traversée sur le fleuve, le traitement des ressortissants des deux Etats, les deux délégations se sont félicitées de la baisse significative des observations antérieures.
En ce qui concerne les problèmes relatifs aux réfugiés ressortissants de la RDC vivant en République du Congo, la troisième Commission Tripartite République du CongoRépublique Démocratique du Congo-Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, tenue à Brazzaville, le 14 février 2014, a décidé de l’arrêt des opérations de rapatriement au 30 juin 2014, pour des raisons de contraintes budgétaires, évoquées par l’UNHCR.
Sur la sécurité le long de la frontière commune, les deux parties ont relevé avec satisfaction l’absence d’incidents nouveaux le long de la frontière commune...
S’agissant des îles querellées, des contacts sont pris régulièrement au niveau des commissions des frontières des deux Etats pour que la question soit abordée en toute responsabilité.
• Excellences Messieurs les Ministres,
• Messieurs les Vice-Ministres,
• Messieurs les Experts,
• Distingués Invites,
Après l’adoption de commun accord de ces résolutions, le Gouvernement de la République Démocratique du Congo est en droit de chercher à comprendre pourquoi le Gouvernement de la République sœur du Congo a provoqué des mouvements si indélicats qui ont entrainé le retour de plus de 130.000 de ses ressortissants sans en avoir prévenu au préalable le pays d’accueil et pays d’origine de ces expulsés et autres retournés forcés, et cela, en violation flagrante de la Convention sur l’établissement et la circulation des personnes et des biens, ci-haut évoquée.
Pourquoi, brusquement, ces expulsions massives sans aucun respect des droits humains, en faisant subir des exactions de tous ordres à ceux qui, hommes, femmes et enfants, croyaient être parmi leurs frères et sœurs, de par les liens historiques et de consanguinité existant entre les deux peuples ?
Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo voudrait aussi connaitre les motivations qui ont poussé les services de migration de la République du Congo à fouler aux pieds, de manière unilatérale, les accords existants, en refusant l’accès sur votre territoire à des ressortissants de mon pays, détenteurs des laisser-passer réguliers, ce qui a évidemment provoqué une réaction prompte de mon Gouvernement par l’application des mesures de réciprocité.
A titre illustratif, je cite les cas Kahasha Ehishu, LPI n°0674801a, Ngonde Rapha, LPI n°0857863a, Senga Numbi, LPI n°0857854a, Mwamba Matandi, Passeport de service n° SB 0016101, refoulés en date du 19 mai 2014 au Beach de Brazzaville aussitôt qu’ils venaient d’y accoster.
Revenant à ces expulsions et départs forcés, il faut souligner qu’ils ont été soutenus par une intense campagne médiatique de haine contre les populations de la République Démocratique du Congo, aggravant, du coup, une crise de confiance en République du Congo entre les populations de ces deux pays.
L’appel constant à l’apaisement de notre Chef de l’Etat, Son Excellence Joseph Kabila Kabange, a évité chez nous l’éclosion du sentiment de vengeance qui risquait d’affecter davantage nos relations.
Excellences Messieurs les Ministres,
Face à ce que d’aucuns considèrent comme une crise dans les relations entre nos deux pays, le Président de la République Démocratique du Congo, Son Excellence Joseph Kabila Kabange, n’a ménagé aucun effort pour chercher à y trouver les solutions concertées dans l’intérêt bien compris de nos deux peuples et de nos deux Etats.
Ainsi, a-t-il autorisé l’envoi d’un total de six missions à Brazzaville dont deux conduites auprès de son homologue congolais, Son Excellence Dénis Sassou Nguesso, respectivement par le Ministre des Affaires étrangères, Coopération internationale et Francophonie, et le Président du Sénat.
Tous les espoirs suscités de ces rencontres n’ont, cependant, pas encore arrêté la détermination de Brazzaville à expulser sans désemparer et toujours dans les mêmes conditions inhumaines les ressortissants de mon pays, ou à créer des conditions de retour forcé de nos compatriotes.
Les derniers chiffres en notre possession font état d’un total de 136.804 Congolais de la RDC expulsés et retournés forcés dont 46.154 hommes, 33.574 femmes et 57.076 enfants accueillis au pays par le Beach Ngobila, le port de Maluku, et d’autres entrées dans les provinces du Bandundu, du Bas-Congo et de l’Equateur.
Pas plus tard que le jeudi 29 mal, ils étaient arrivés, par les mêmes voies, au nombre de 315 dont 139 hommes, 88 femmes et 88 enfants. Le vendredi 30 mal 2014, ils étaient à 475 dont 225 hommes, 115 femmes et 135 enfants. Le samedi 31 mai, ils étaient à 454 personnes dont 186 hommes, 145 femmes et 135 enfants.
Hier, dimanche 1e 1er juin 2014, le Beach Ngobila a enregistré 199 expulsés et retournés forcés dont 85 hommes, 47 femmes et 67 enfants.
Les Provinces du Bandundu, du Bas-Congo, de l’Equateur ne cessent pas, non plus, de recevoir des refoulés et retournés forcés chaque jour qui passe.
Ces refoulements des Congolais de la République Démocratique du Congo dont certains ont été contraints d’abandonner leurs biens se déroulent dans des conditions dont le moins que l’on puisse en dire est qu’elles sont inacceptables.
• Excellences Messieurs les Ministres,
Vous m’autorisez de penser que votre arrivée à Kinshasa, à la tête de cette forte délégation congolaise, souhaitée par toutes nos deux parties et le Parlement panafricain, va permettre, après plusieurs occasions manquées, de décanter la crise née de ces expulsions.
La rencontre de ce jour devrait à mon entendement, permettre aux Experts des deux parties d’une part, d’évaluer l’opération des expulsions massives des Congolais de la RDC vivant en RC et d’en tirer les conséquences; et d’autre part, d’évaluer le niveau d’exécution des accords qui nous lient en matière de défense et sécurité et de réactiver la coopération interservices, au regard des engagements mutuels pris à la suite des différentes rencontres bilatérales.
• Excellence Monsieur le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation de la République du Congo,
• Excellence Monsieur le Ministre à la Présidence de la République chargé de la Défense nationale de la République du Congo,
• Monsieur le Vice-Ministre de la Décentralisation et Affaires coutumières,
• Monsieur le Vice-Ministre de la Coopération internationale,
• Messieurs les Experts,
• Distingués Invites,
Je ne peux terminer ce mot sans exprimer tous mes espoirs de voir nos deux délégations s’employer activement à mettre un terme aux problèmes frontaliers et de coexistence qui sont susceptibles de nuire à l’image des relations excellentes et historiques existant entre nos deux pays.
Je vous remercie.
Des acrimonies sur fond des complexes culturels et idéologiques surannés !
C’est un exercice sans doute le plus ardu auquel auront été amenés des experts des deux Congo pour trouver un arrangement de la crise surgi autour des expulsions des RD-Congolais. La bonne foi y a été mise à l’épreuve et il a certainement fallu des nerfs solides er une capacité de maîtrise de ses sentiments ainsi qu’un haut sens et de l’Etat et des responsabilités devant l’histoire pour chercher à concilier les positions dans ce très sensible dossier et parvenir à clôturer les travaux sur une note acceptable du communiqué final obligatoire de ce genre d’assises.
Pour se faire tant soit peu une idée sur l’enjeu en cause et sa haute sensibilité, il est sans doute utile d’évoquer quelques signaux indicatif du parcours des relations aux soubresauts tumultueux qui ont longtemps caractérisé les deux Congo dont on eût dit que qu’ils ont été prédisposé à se choisir un destin similaire aux ceux Corées condamnés à s’affronter en frères ennemis plutôt qu’à se réconcilier fraternellement comme les deux anciennes Allemagnes qui ont administré une admirable leçon de réunification.
Pour les deux Congo, c’est depuis la décolonisation que les acrimonies ont commencé à les opposer. La veille de l’indépendance de la RDC, in épisode suffisamment significatif en témoigne. Le tout premier Premier ministre de la RDC, feu Patrice Lumumba, eut maille à partir avec le premier homme fort du Congo-Brazzaville, le futur président Abbé Fulbert Youlou.
Ce dernier avait cherché à rencontrer Lumumba la veille de l’indépendance du Congo-Kinshasa pour lui proposer que le nouvel Etat du Congo Kinshasa change d’appellation en laissant ce nom Congo au pays de Fulbert Youlou. Lumumba repoussa avec colère une telle proposition en faisant savoir à son initiateur que c’était son pays qui n’vit ni la grandeur du Congo démocratique ni ses potentialités qui devait trouver une autre appellation. Ainsi éconduit par son hôte, Youlou s’en retourna ruminer sa déception sans pardonner Lumumba jusqu’à l’effacement de ce dernier ayant emporté dans l’au-delà le souvenir de l’incartade.
Plus tard quand le premier ministre Adoula outré par les attaques du régime alors en place à Brazzaville fit expulser ses ressortissants, les récriminations se ravivèrent entre les deux rives des deux capitales les plus rapprochées du monde.
Sur les péripéties des turbulences entre les deux pays soue les régimes de Mobutu voué aux gémonies de l’autre côté du fleuve pour son arrimage au capitalisme et celui chanté de léniniste-marxiste de Ngouabi, on peut en dire de tonne de ces mêmes acrimonies.
Des épisodes de rupture ont émaillé notamment avec des crises telles celle de Mulele. Et toujours de l’autre côté du Pool, l’opinion se confortera dans un complexe idéologique de supériorité vis-à-vis des voisins du côté gauche du fleuve. Mobutu arrogant à sa manière se fera beau jeu de vouloir toiser les prétentions de ces complexes de supériorité en s’enorgueillissant de l’indéniable supériorité des talents artistiques de ses compatriotes que les voisins du Congo d’en face s’échineront à imiter, notamment dans la musique.
Dans cette rivalité qui ne dira jamais clairement son nom, le presse des deux pays se mêlera avec des mémorables diatribes sur les ondes dans une sabordage réciproque en règle entre les régimes des deux Congo. Du côté de Kinshasa un journal se permettra de qualifier le Congo-Brazza de « petit Cuba d’en face » à toiser comme au beau temps
De la guerre froide. La réplique ne manqua pas de l’autre côté où l’on emballa l’opinion dans le défi de transformer ce pays de petit Congo à grand Congo. Devait-on y viser de renverser les vapeurs qu’on ne s’y prenait pas autrement. Etait-ce un rêve de la grenouille voulant se faire aussi grosse que le boeuf ? Sûrement pas, puisque depuis le du président Sassou Nguesso aux affaires à Brazzaville, la convivialité sereine allait revenir entre les deux rives et cela pour longtemps. Et son homologue Joseph Kabila s’est aussi inscrit dans sa vision.
Mais comment, pourquoi et d’où donc sont venues resurgir les velléités des vieilles acrimonies qui emportent aujourd’hui des retrouvailles scrupuleusement remodelées avec patience par les dirigeants actuels ?
Les experts à l’actuelle 4ème session de la Commission spéciale de Défense et sécurité entre les deux Congo ont mission de renouer le pont entre les peuples frères et voisins, surtout pas de les précipiter dans l’abîme de leurs antagonismes alimentées par des idéologies et cultures importés dans leur patelin commun dont les émules de leur patrimoine culturelle ont fait l’éloge de la convivialité. Est-on prêt sur les deux bords du fleuve de renier la chanson de Joseph Kabasele qui clamait que « Ebale ya Congo ezali lopango te, ezali se nzela ! » (le cours du fleuve Congo n’est pas une clôture - qui sépare - mais un boulevard qui permet le passage !
Daniel Nzuzi/MMC
C’est un exercice sans doute le plus ardu auquel auront été amenés des experts des deux Congo pour trouver un arrangement de la crise surgi autour des expulsions des RD-Congolais. La bonne foi y a été mise à l’épreuve et il a certainement fallu des nerfs solides er une capacité de maîtrise de ses sentiments ainsi qu’un haut sens et de l’Etat et des responsabilités devant l’histoire pour chercher à concilier les positions dans ce très sensible dossier et parvenir à clôturer les travaux sur une note acceptable du communiqué final obligatoire de ce genre d’assises.
Pour se faire tant soit peu une idée sur l’enjeu en cause et sa haute sensibilité, il est sans doute utile d’évoquer quelques signaux indicatif du parcours des relations aux soubresauts tumultueux qui ont longtemps caractérisé les deux Congo dont on eût dit que qu’ils ont été prédisposé à se choisir un destin similaire aux ceux Corées condamnés à s’affronter en frères ennemis plutôt qu’à se réconcilier fraternellement comme les deux anciennes Allemagnes qui ont administré une admirable leçon de réunification.
Pour les deux Congo, c’est depuis la décolonisation que les acrimonies ont commencé à les opposer. La veille de l’indépendance de la RDC, in épisode suffisamment significatif en témoigne. Le tout premier Premier ministre de la RDC, feu Patrice Lumumba, eut maille à partir avec le premier homme fort du Congo-Brazzaville, le futur président Abbé Fulbert Youlou.
Ce dernier avait cherché à rencontrer Lumumba la veille de l’indépendance du Congo-Kinshasa pour lui proposer que le nouvel Etat du Congo Kinshasa change d’appellation en laissant ce nom Congo au pays de Fulbert Youlou. Lumumba repoussa avec colère une telle proposition en faisant savoir à son initiateur que c’était son pays qui n’vit ni la grandeur du Congo démocratique ni ses potentialités qui devait trouver une autre appellation. Ainsi éconduit par son hôte, Youlou s’en retourna ruminer sa déception sans pardonner Lumumba jusqu’à l’effacement de ce dernier ayant emporté dans l’au-delà le souvenir de l’incartade.
Plus tard quand le premier ministre Adoula outré par les attaques du régime alors en place à Brazzaville fit expulser ses ressortissants, les récriminations se ravivèrent entre les deux rives des deux capitales les plus rapprochées du monde.
Sur les péripéties des turbulences entre les deux pays soue les régimes de Mobutu voué aux gémonies de l’autre côté du fleuve pour son arrimage au capitalisme et celui chanté de léniniste-marxiste de Ngouabi, on peut en dire de tonne de ces mêmes acrimonies.
Des épisodes de rupture ont émaillé notamment avec des crises telles celle de Mulele. Et toujours de l’autre côté du Pool, l’opinion se confortera dans un complexe idéologique de supériorité vis-à-vis des voisins du côté gauche du fleuve. Mobutu arrogant à sa manière se fera beau jeu de vouloir toiser les prétentions de ces complexes de supériorité en s’enorgueillissant de l’indéniable supériorité des talents artistiques de ses compatriotes que les voisins du Congo d’en face s’échineront à imiter, notamment dans la musique.
Dans cette rivalité qui ne dira jamais clairement son nom, le presse des deux pays se mêlera avec des mémorables diatribes sur les ondes dans une sabordage réciproque en règle entre les régimes des deux Congo. Du côté de Kinshasa un journal se permettra de qualifier le Congo-Brazza de « petit Cuba d’en face » à toiser comme au beau temps
De la guerre froide. La réplique ne manqua pas de l’autre côté où l’on emballa l’opinion dans le défi de transformer ce pays de petit Congo à grand Congo. Devait-on y viser de renverser les vapeurs qu’on ne s’y prenait pas autrement. Etait-ce un rêve de la grenouille voulant se faire aussi grosse que le boeuf ? Sûrement pas, puisque depuis le du président Sassou Nguesso aux affaires à Brazzaville, la convivialité sereine allait revenir entre les deux rives et cela pour longtemps. Et son homologue Joseph Kabila s’est aussi inscrit dans sa vision.
Mais comment, pourquoi et d’où donc sont venues resurgir les velléités des vieilles acrimonies qui emportent aujourd’hui des retrouvailles scrupuleusement remodelées avec patience par les dirigeants actuels ?
Les experts à l’actuelle 4ème session de la Commission spéciale de Défense et sécurité entre les deux Congo ont mission de renouer le pont entre les peuples frères et voisins, surtout pas de les précipiter dans l’abîme de leurs antagonismes alimentées par des idéologies et cultures importés dans leur patelin commun dont les émules de leur patrimoine culturelle ont fait l’éloge de la convivialité. Est-on prêt sur les deux bords du fleuve de renier la chanson de Joseph Kabasele qui clamait que « Ebale ya Congo ezali lopango te, ezali se nzela ! » (le cours du fleuve Congo n’est pas une clôture - qui sépare - mais un boulevard qui permet le passage !
Daniel Nzuzi/MMC