Quelques jours après le discours du Chef de l’Etat sur l’état de la nation tenu devant le Congrès au Palais du Peuple, le Secrétaire Général Adjoint de la Dynamique pour la Démocratie au Congo, DDC, Gaston Makpolo a fait la lecture de cette allocution. Dans une interview accordée au journal La Prospérité, ce haut cadre de ce parti de l’opposition n’a pas hésité de prendre le Chef de l’Etat au mot, pour justifier le caractère « inviolable » de la Constitution. Entretien.  

La Prospérité : Le 15 décembre, le Chef de l’Etat ne s’est pas prononcé sur la révision constitutionnelle ou encore sur son intention de se représenter ou non à la présidentielle 2016. Certains ténors de la Majorité présidentielle estiment que le président a encore deux ans devant lui, mais qu’est-ce qui agite l’opposition ?
Gaston Makpolo : Lors de son discours sur l’Etat de la nation devant les deux chambres réunies en congrès, le Président de la République réagissant certainement sur cette question, a dit, je cite : « on peut contester le moment choisi ou les arguments développés mais non leur droit de susciter ou d’entretenir le débat sur des questions d’intérêt national ». En analysant cette question, je me suis posé la question de savoir : « qui a suscité ou entretenu le débat sur la question de la révision constitutionnelle ? ». N’est-ce pas la Majorité présidentielle qui s’est déployée dans des conférences, des pétitions, des marches, des points de presses, des émissions radiotélévisées sur cette question ? Jurant par tous les dieux la modification, le changement ou l’élaboration d’une nouvelle Constitution aux motifs fallacieux des uns et des autres ?
Telle que la Constitution du 18 février est diabolique ; elle est celle des belligérants, elle n’est pas celle de l’émergence et j’en passe. Pour répondre à cette question, je tiens à vous dire que la DDC étant un parti chrétien, compare l’article 220 au fruit défendu dont l’arbre a été planté au milieu du jardin d’Eden, c'est-à-dire, que vous ne pouvez aucunement y toucher, interdiction faite par Dieu.
La Constitution elle-même dans son article 218 a prévu des mécanismes de sa révision, mais le constituant a verrouillé l’article 220, interdisant formellement sa révision. Comme on dit souvent en français l’exception confirme la règle. Déverrouiller ce que le constituant a verrouillé ne peut nullement faire l’objet de révision. Si vous toucher à l’intouchable, c’est changer l’ordre constitutionnel actuel, cela veut dire en clair, mettre fin à la troisième République et créer une nouvelle  République, donc la quatrième. Pour quelle nécessité ?   C’est pour répondre à  quel besoin vital de la nation ? Pour faire plaisir  à qui ? A quoi ? Pour résoudre quel problème ?
Sur cette question, nous prenons aux mots le Président de la  République lorsqu’il avait clairement dit, le 23 octobre 2013, devant le Congrès : « je suis pour le respect, par tous, de l’esprit et de la lettre de la Constitution de la  République dans son ensemble, telle qu’adoptée par le referendum populaire en 2005». Donc, vous constaterez avec moi qu’il n’y aura jamais la révision constitutionnelle surtout en ce qui concerne l’article 220 qui rappelle certaines dispositions intangibles.
Fort heureusement que le Président de l’Assemblée Nationale, de surcroît, Secrétaire Général de la Majorité Présidentielle, dans son Discours d’ouverture de l’actuelle session extraordinaire, a écarté la possibilité de la révision constitutionnelle. Donc, il vient de rejoindre l’opposition, la communauté internationale et le Peuple Congolais. Mieux vaut tard que jamais. Il n’y a que les idiots qui ne changent pas.
C’est pourquoi l’opinion se pose la question de savoir : «pourquoi a-t-il convoqué la session extraordinaire actuelle avec la modification de la loi électorale comme point prévu à la présente session ? ».
La Pros : Le Président de la République venait de signer une ordonnance créant et nommant les animateurs de l’Office National d’Identification de la Population, ONIP. Quelle lecture faites-vous de cette mise en place ?
GM : il a été décidé lors des Concertations Nationales de mettre en place l’ONIP, mais le traitement de cette question devrait faire l’objet d’un consensus tel que décidé aux Concertations Nationales pour sauvegarder l’esprit de la cohésion nationale. Mais qu’avons-nous remarqué ?
Les personnes nommées pour animer cette institution sont tous membres de la Majorité Présidentielle. L’identification et le recensement général des Congolais sont des opérations très délicates qui peuvent discréditer les élections futures, car la création  de cette institution et la mise en place de ses animateurs n’ont pas recueilli le compromis politique. De ce fait, la DDC exige qu’un consensus soit dégagé pour la désignation des animateurs afin d’éviter que la mise en place de l’ONIP soit inscrite dans la logique d’un agenda caché de la part de la Majorité au pouvoir. La recherche d’un compromis politique s’impose comme une impérieuse nécessité, car cela devrait nous éviter le chaos et la crise de légitimité née des élections controversées de 2011.
La Pros : L’état des lieux sur l’économie du pays, tel que le Chef de l’Etat l’a fait, vous a-t-il convaincu ?
GM : Pour rappel, le 23 octobre 2013, le Président de la République devant le Congrès, à l’occasion de la clôture des travaux des Concertations Nationales, a relevé à titre exemplatif les défis ci-après : le caractère extraverti de notre économie, l’inadéquation entre l’évolution positive des indicateurs macro économiques et le vécu quotidien des Congolais, la nécessité d’accroître le niveau d’exécution budgétaire, la nécessité de promouvoir une classe moyenne, la lutte contre la corruption, le détournement des deniers publics et le coulage des recettes.
Une année après, nous nous posons la question de savoir, est-ce que tous ces défis ont-ils été relevés ? Le diagnostic est bien posé et posons-nous la question sur la thérapeutique. Nous avons aujourd’hui une croissance financière et non une croissance économique dans la mesure où tout le gros des  investissements ne va pas dans les secteurs productifs et s’orientent fort malheureusement vers les secteurs de prestiges et autres concepts aux contours flous qu’on appelle « raison d’Etat». D’où, le chiffre gonfle mais le vécu quotidien ne s’améliore pas. Les riches deviennent de plus en plus riches, les pauvres deviennent  de plus en plus pauvres. La classe moyenne disparait parce que le gouvernement Matata a opté pour le paiement de la dette extérieure et non de la dette intérieure.
Le taux de réalisation des recettes se situe en dessous de la moyenne en même temps certaines institutions et structures accusent un taux de dépassement avoisinant les 1000 %.
La Pros : Une frange de l’opposition n’ayant pas participé aux Concertations Nationales continuent de réclamer un dialogue national conformément à l’Accord-cadre d’Addis-Abeba. Quelle est la position de votre parti ?
GM : La DDC, par sa dénomination, Dynamique pour la Démocratie au Congo a toujours privilégié le dialogue. Mais, il ne faudra pas qu’on passe de négociations en négociations sans fin. Nous allons nous prononcer à ce sujet au vu du cahier des charges du dialogue, en même temps, nous exigeons l’évaluation de l’application des résolutions des concertations nationales pour éviter le double emploi au cas où le dialogue s’organiserait.
La Pros : Etes-vous satisfait de la composition du gouvernement de cohésion nationale ?
GM : C’est après 14 mois de promesse faite au peuple Congolais qu’est venu le gouvernement dit de cohésion nationale. Je me prive de me prononcer ou de porter un jugement de valeur sur les femmes et les hommes qui composent ce gouvernement, qui ne peut pas s’appeler de cohésion nationale mais plutôt un gouvernement d’ouverture à quelques formations politiques et associations de la société civile. Car, en réalité, ce qui s’est passé n’est qu’un réaménagement et non un nouveau gouvernement qu’on appellerait de cohésion nationale.
Mais, compte tenu des déclarations qui ont été faites au lendemain de la publication de l’équipe gouvernementale, lesquelles fustigent la non transparence dans des tractations, la sous représentation des certaines provinces, le cas de la province du Bas-Congo et la surreprésentation des certaines provinces, le cas de la province du Maniema, la plus petite avec 4 ministres , la non prise en compte du quota de la femme, promesse faite par le Chef de l’Etat, de la personne vivant avec handicap, de l’autorité coutumière, des dénonciations, des débauchages faits dans certaines formations politiques etc.… Tout ceci mis ensemble m’amène à conclure que la composition de ce gouvernement a plus créé des problèmes de cohésion nationale qu’il en a résolus.
La Pros : A propos du processus électoral, la CENI est actuellement dans la phase d’affichage des listes dans différents bureaux des votes. Votre parti est-il prêt à affronter les élections ?
GM : un seul conseil à prodiguer à l’Abbé Malumalu : ‘’on ne dirige pas par défi, l’homme de Dieu doit avoir l’humilité et le sens de l’écoute’’. Les congolais qu’il appelle à adhérer à ce processus ne sont pas dupes et ne se sentent nullement concernés par ces multiples Shows des medias. Dans quelle commune de Kinshasa avez-vous vu les gens s’aligner pour consulter les listes affichées par l’Abbé Malumalu et sa CENI ? Il s’agit d’une question fondamentale et vitale, l’Abbé Malumalu et sa CENI qui font l’objet des contestations doivent chercher à établir la confiance entre son institution et la population congolaise qui le considère comme étant le produit de la tricherie. Il n’est un secret pour personne que l’Abbé Malumalu est arrivé à la tête de la CENI par des moyens peu recommandables pour un consacré. Il aurait pu se démettre mais malheureusement, il s’accroche au pouvoir au lieu de s’accrocher au sacré.
Oui, la DDC veut des élections mais nous voulons des élections dans la transparence, dans la confiance, dans la garantie que les résultats qui seront issus de ces scrutins soient conformes à la volonté  exprimée par le souverain primaire. Ce genre d’élection appelle à une organisation responsable et crédible que la CENI actuelle n’en a pas. Au moment où on demande à l’Abbé Malumalu de rassurer tout le monde sur la tenue effective des élections par la production d’un calendrier global reprenant toute  les échéances électorales et un budget détaillé et réaliste, lui s’évertue à des sorties médiatiques et des opérations de distraction comme celle que vous venez d’évoquer, l'affichage des listes. Il affiche par rapport à quel calendrier et avec quel budget ?
La Pros : Avez-vous un mot à propos des tueries récurrentes à Béni ?
GM : Etant originaire de l’Est, je compatis aux malheurs de mes frères et sœurs, je demande au gouvernement de prendre des dispositions pratiques toute affaire cessante pour mettre fin à l’incurie et à l’insécurité grandissante dans le territoire de Béni et sur toute l’étendue du territoire national afin de permettre à ces populations martyrisées de célébrer les fêtes de fin d’année de concert avec le reste de la nation. Je demande aussi au gouvernement d’enquêter sur l’origine réelle de ces attaques et massacres contre les populations civiles de Béni et d’établir des responsabilités afin d’engager des poursuites judiciaires contre les acteurs et les complices de ces massacres. A la Monusco, de se déployer dans les zones en proie à l’activisme de ces groupes armés. Cela, dans l’esprit de son mandat.
La Pros : vous êtes Médecin, que dites-vous des violences sexuelles ?
GM : Pendant que les efforts énormes sont déployés pour lutter contre le VIH/SIDA, le taux de prévalence est stabilisé mais très élevé chez les adolescents. L’état des violences sexuelles risque d’anéantir les efforts fournis pour la stabilisation du VIH/SIDA. Nous sommes reconnaissants pour tous les efforts fournis aussi bien au niveau local, national qu’international pour la lutte contre les violences sexuelles.
La Pros : Avez-vous un message particulier ? 
GM : la société congolaise est devenue une société sans repère, ni référence, et n’a pas des valeurs communes partagées. Mon parti, la DDC, dans son projet de société se focalise sur la garantie morale dans l’action. Il s’agit de l’élément éthique qu’il faut intégrer dans toute action, vision politique et pédagogique de la DDC.
Au Peuple congolais, je vous demande d’être solidaire et participatif car la  solidarité participative permet l’épanouissement de chacun et le développement de la collectivité. Cela ne peut se réaliser que par la vertu du travail, laquelle devant être assumée avec responsabilité dans nos différents choix politiques,  économique et culturel. D’où, la maxime de la DDC : « L’unité, c’est notre force et la diversité notre richesse ».
Je présente mes vœux les meilleurs au peuple Congolais.
A mon Président National, INGELE IFOTO, à tous les membres de mon parti et à ceux qui me sont chers, je vous souhaite bonne fête de Nouvel An. Si longue soit la nuit, le jour finit  par apparaître. Je vous remercie.
Propos recueillis par Kevin Inana 


LIENS COMMERCIAUX

[VIDEOS][carouselslide][animated][20]

[Musique][vertical][animated][30]

 
Top