Jamais un combat de boxe n'avait suscité une telle attention et une telle attente, ni brassé de telles sommes d'argent. Dans une ambiance survoltée, l'Américain Floyd Mayweather et le Philippin Manny Pacquiao s'affrontaient samedi soir à Las Vegas, devant les 16 800 spectateurs du MGM Grand, parmi lesquels de nombreuses personnalités. Aux premiers rangs, où se tenaient l'épouse et les cinq enfants du Philippin, on reconnaissait notamment les acteurs Denzel Washington et Mark Wahlberg, les musiciens Justin Bieber, Beyonce et Jay-Z, P. Diddy, les anciens champions de tennis Steffi Graf et André Agassi... Ce qui frappait surtout, dès la présentation, c'est que la salle semblait acquise au Philippin.
Dès le premier round, le ton était donné entre la vitesse d'exécution de Pacquiao, et la formidable technique de contre de l'Américain. Sous les encouragements du public scandant "Manny ! Manny", le Philippin boxait en avançant, s'exposant à un gauche au foie et à une droite au visage. A la cloche, les deux hommes se séparaient après un échange équilibré. Mayweather semblait hésiter entre laisser venir son adversaire et prendre l'initiative. A trois reprises, il se trouvait en difficulté dans les cordes. Pacquiao esquivait et le pressait, mais il s'en sortait par son allonge.
Science tactique
A la troisième reprise, les accrochages se faisaient plus fréquents, les deux hommes continuaient de se défier du regard, Mayweather opposait sa maîtrise tactique aux rafales de coups du Philippin qui partaient parfois dans le vide. Jambes écartées, l'Américain semblait impossible à atteindre. Pacquiao le surprenait quand même avec un crochet gauche éclair qui le faisait reculer, sur lequel il enchaînait et immobilisait l'Américain. Le round s'achevait à l'avantage incontestable du Philippin.
Le cinquième débutait dans l'indécision. Les deux hommes s'observaient. Mayweather se mettait à avancer et touchait son advsersaire, reprenant un avantage psychologique. L'arbitre les séparait au moindre accrochage, laissant respirer le combat . «PacMan» attaquait le sixième round à 100 à l'heure, acculant Mayweather qui l'accrochait pour enrayer ses offensives. L'Américain le narguait, hochant la tête négativement sous les bordées de coups comme pour lui dire que rien ne l'ébranlait. Pacquiao donnait alors l'impression de tout donner sans vraiment le faire douter.
Pourtant, le père et coach de Mayweather ramenait celui-ci à l'essentiel, la technique et la tactique, lui reprochant de mal boxer et de s'éparpiller dans ses manœuvres d'intox... Il s'agissait de ne pas oublier qu'il avait en face de lui un adversaire de son niveau. Au huitième round, la fatigue commençait à faire son œuvre. Mayweather limitait toujours les risques et Pacquiao se méfiait. Le neuvième semblait une réplique des premiers, avec un Pacquiao à l'offensive mais imprécis et un Mayweather attentiste, gestionnaire de ses efforts.
«Je ne pouvais pas faire plus...»
A la dixième reprise, l'affrontement restait totalement ouvert. Les deux dernières allaient donc être décisives. Mayweather placait un uppercut du droit, son meilleur coup depuis le début du combat. Pacquiao ne bronchait pas mais ne trouvait toujours pas l'ouverture. L'Américain sentait qu'il avait, pour la première fois, dominé les débats et affichait son arrogance à la cloche, toisant PacMan et frappant dans ses gants. Il reprenait en souriant.
Pour leurs derniers échanges, les deux hommes se neutralisaient. Pacquiao tentait le tout pour le tout, reprenant l'offensive, mais l'Américain levait le poing à la cloche, avant de se percher dans les cordes, comme s'il avait déjà combat gagné. L'épouse du Philippin joignait les mains comme pour prier. Mayweather invectivait le public qui le sifflait. «Good fight !» lâchait-il à son adversaire en l'étreignant. Pacquiao envoyait, lui, des baisers à une foule sans doute restée sur sa faim après ces 45 minutes d'affrontement tactique.
L'arbitre proclamait les scores désignant Floyd Mayweather Jr champion du monde des welters (118-110, 116-112, 116-112)... et toujours invaincu après 48 combats. «Nous avons fait ce que nous devions faire ce soir, déclarait l'Américain au micro, mon père voulait que j'en fasse plus mais je n'ai pas pu...» «Je pensais que j'avais gagné, il n'a rien fait», concluait le Philippin, interrogé à son tour par le speaker, avant de confier qu'il allait partir en vacances