Après le MLC, qui a déjà clarifié sa position de non participation au dialogue, l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social, UDPS, a aussi donné sa réponse au Chef de l’Etat, à travers son cahier des charges. Il a dépêché son émissaire pour les consultations avec l’opposition. Sans s’opposer à la tenue de ce dialogue, l’UDPS renvoie plutôt ses interlocuteurs à sa feuille de route, préalablement confectionnée trois mois avant que le Chef de l’Etat n’exprime sa volonté de dialoguer avec l’opposition. Celle-ci présente brièvement ce que peuvent être les matières à traiter, également les grandes figures qui doivent représenter à leur tour chaque couche sociale du pays. Aussi, faut-il souligner qu’elle contient les thèmes à aborder, dont les principaux sont, le contentieux électoral de novembre 2011, le calendrier électoral consensuel et l’audit du fichier électoral. Outre ces grandes lignes, la feuille de route de l’UDPS tient à ce que la crise en RDC prenne fin le plus vite que possible. A cet effet, plusieurs autres sujets sont proposés, notamment, le rappel des quelques éléments historiques, l’évaluation des élections précédentes, les causes de la persistance de la crise en RDC, le règlement rapide et satisfaisant de la crise, la responsabilité historique de la Communauté internationale…ainsi que le lieu et la durée des travaux.

Voici l’intégralité du texte :
  1. Contexte général
  1. Rappel de quelques éléments historiques
La situation tant politique que sociale en République Démocratique du Congo (RDC) demeure toujours préoccupante et constitue un cas d’urgence. Une crise politique grave, née des dernières élections de novembre 2011, a fini de plomber sérieusement l’avenir du processus de démocratisation du pays.
Depuis 1996, année du début des conflits armés à répétition, qui jusqu’à ces jours, endeuillent les populations congolaises, la Communauté Internationale n’a cessé de s’investir pour ramener la paix dans ses efforts de normalisation de la vie politique par un laborieux processus de démocratisation.
C’est grâce aux Nations Unies qu’a été signé l’Accord de paix et de cessez-le feu de Lusaka dont le chapitre V prévoyait l’organisation et la tenue des négociations politiques inter congolaises (Dialogue Inter Congolais).
Au cours du Dialogue inter congolais à Sun City, toute la classe politique congolaise réunie, a relevé unanimement les causes fondamentales de la persistance de la crise sociopolitique que connait la RDC et qui handicape son développement. A savoir la mauvaise gouvernance et le manque de légitimité des institutions nationales et de leurs animateurs. L’Accord Global et Inclusif qui sanctionnera ce dialogue, conclut pour mettre fin définitivement à l’origine des crises et donner au pays les chances de se reconstruire, les dirigeants du pays devaient être élus démocratiquement au terme d’élections libres, transparentes et crédibles.
Ainsi une transitions de deux ans, sui generis (formule 1+4), fut instituée en vue de conduire le peuple congolais aux élections générales, telles que voulues par l’Accord, après que certains préalables soient réalisés. Ces derniers étant considérés comme la condition sine qua non à la tenue des élections.
Ces préalables visaient la paix sociale et un climat général de confiance qu’exigent de pareils enjeux majeurs pour une nation. Il s’agissait notamment de :
-La réconciliation nationale ;
-La restauration de l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du pays ;
-Le recensement de la population :
-L’unification des armées belligérantes en une seule armée républicaine
-La réforme des services de sécurité : renseignements et police nationale notamment :
-Un minimum de dividendes socio-économiques pour le peuple.
Il convient de souligner que l’Accord Global et Inclusif prévoyait également dans ses objectifs de la transition notamment en son point 4 :
«L’organisation d’élections libres et transparentes à tous les niveaux, permettant la mise en place d’un régime constitutionnel et démocratique».
En plus des institutions de la transition, des institutions d’appui à la démocratie ont été créées, notamment une Commission Electorale Indépendante (CEI).
Il faut rappeler que les résolutions de Sun City avaient  déjà défini le cycle électoral, notamment en posant un préalable aux élections par l’organisation d’un recensement de la population.
Force est de constater que le gouvernement de transition (1+4), dont l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) n’était pas partie prenante, a Chamboulé les cadres de référence du cycle électoral et aucun recensement préalable aux élections ne fut organisé.
Il échet également de relever que le leadership… s’avéra incompétent, corrompu et incapable d’assurer la gestion courante du pays et de répondre aux préoccupations de congolais.
Devant le naufrage visible avant l’organisation des élections, notre parti, l’UDPS saisit le Comité International d’Accompagnement de la Transition (CIAT), organe officiellement appelé à remplir le rôle d’arbitre et de médiateur aux fins d’évaluer un minimums de consensus autour de certains préalables majeurs, pour obtenir des élections crédibles et transparentes.
Résultat : non seulement, l’UDPS ne fut suivie,  mais se trouva totalement  en dehors de ce grand rendez-vous de notre Histoire que furent les élections de 2006 dans l’organisation fut confiée à une CEI totalement instrumentalisée et aux ordres du pou voir en place.
  1. Elections de 2006              
Organisées sur un processus électoral vicié, les élections débouchèrent sur des affrontements à l’arme lourde, en plein centre d’une grande ville de plus de dix millions d’habitants. Le bilan, jusqu’à ce jour, n’a pas encore été officiellement confirmé.
En effet, les principaux chefs de guerre qui s’étaient accaparés de la vie politique nationale et se trouvaient être les potentats de l’espace présidentiel (1+4) furent les grands animateurs de ces joutes électorales inédites. Et comme par calculs égoïstes dans le contrôle du pouvoir, ils avaient gardés en réserve des troupes et milices fidèles afin de disposer des forces nécessaires à la conquête du pouvoir. Ils réglèrent leur contentieux électoraux sur leur terrain de prédilection, l’arme au point.
  1. Elections de 2011


Bien que le processus fût tout aussi vicié qu’en 2006, l’UDPS leva l’option de défier le régime de Kabila dans les urnes. Car, devant la dégradation dramatique des conditions de vie des Congolais, ne pas relever ce défi apparaissait comme un acte criminel de non assistance à peuple en danger.

Notons à ce niveau, qu’une forte tension régnait au sein de la population congolaise qui, ayant déjà enregistré un lourd tribut en perte des vies humaines lors de la campagne électorale, s’apprêtait à en découdre à mains nues, avec les hordes armées du régime.

Encore, une fois, les représentants de la Communauté internationale ouvriront un ballet diplomatique auprès du véritable vainqueur des élections, Monsieur Etienne Tshisekedi wa Mulumba pour lui demander de lancer des appels au calme à la population, avec promesse de s’occuper sérieusement du litige électoral qui perturbait ainsi l’ordre social et la paix.

Jusqu’à ce jour, nous attendons toujours que justice soit faite et que le processus démocratique en RDC soit crédibilisé afin d’amener le peuple à y souscrire. Il y va de la confiance du peuple au processus de la démocratisation et de la crédibilité de tous les acteurs : Communauté internationale et tous les démocrates des partis politiques et de la société civile.
II. Causes de la persistance de la crise en RDC


Il échet de constater que depuis le premier cycle électoral de 2006, la solution au conflit électoral s’est réglé par la voie des armes : ce qui a occasionné la mort de plusieurs congolais.

En effet, les résultats contestés de la présidentielle de 2006, ont occasionné des pertes considérables en vies humaines tant dans la capitale qu’à du pays.

En 2011, lors des manifestations du 26 novembre, il échet également de relever qu’il y a eu systématiquement des violations des droits humains par des meurtres, des assassinats, des arrestations arbitraires des opposants, des intimidations et des tirs à balles réelles sur les manifestants dont plusieurs morts furent à déplorer.

Rappelons avec force les derniers événements du 19 janvier au 23 janvier 2015 portant sur les contestations populaires du projet de la loi électorale, qui conditionne le recensement comme préalable, à l’organisation des élections, Monsieur Kabila a fait de nouveau un usage excessif de la force…

Négliger ou ne pas prendre la mesure exacte du niveau de frustrations des populations congolaises, malgré le semblant de longue patience et le refus de la violence dont elles font preuve, c’est consacrer un pouvoir assis sur un volcan de détonation sociale mal connue.

Cette situation déplorable a replongé la RDC depuis 2011 dans une nouvelle crise de légitimité qui ne permet pas à l’Etat congolais de fonctionner normalement. Il y a blocage. Il y a impasse.

Son ampleur est telle que si rien n’est fait, la RDC court le risque d’une implosion avec toutes les conséquences incalculables pour la Sous-région et en Afrique.

C’est pourquoi, l’UDPS propose un règlement de la crise actuelle par la voie d’un dialogue politique.

III. Règlement rapide et satisfaisant de la crise par l’organisation du dialogue politique
  1. Configuration politique


Les élections de 2011 ont eu le mérite de reconfigurer politiquement la classe politique congolaise et de recadrer la ligne de démarcation claire entre ceux qui soutiennent le système en place et leurs alliés, d’un côté, et ceux qui réclament la vérité des urnes de l’autre.

Deux tendances se dessinent clairement entre les tenants du statu quo et ceux qui militent pour le changement.

Ainsi, le contentieux électoral de 2011 se trouve être la cause essentielle de la crise politique actuelle en République Démocratique du Congo.

Il va sans dire que ce dialogue pourra mettre autour d’une table :

-Le président Etienne Tshisekedi et ses alliés pour le camp du changement

-Monsieur Joseph Kabila et les siens pour le camp du statu quo.

-La modération sera assurée par l’Envoyé Spécial du Secrétariat Général des Nations Unies en RDC et Chef de la Monusco, conformément à la résolution 2147 du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui dispose ce qui suit :

«Autorise la Monusco à appuyer, en coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies et d’autres acteurs y compris par l’intermédiaire des bons offices du Représentant spécial du Secrétaire général, les efforts des autorités de la République Démocratique du Congo pour mettre en œuvre les réformes prévues par l’Accord-cadre et pour stabiliser l’Est du pays et, à cet effet, à :

-Promouvoir la consolidation de la paix et un dialogue-politique transparent et sans exclusive entre toutes les parties prenantes congolaises en vue de favoriser la réconciliation et la démocratisation et encourager l’organisation d’élections crédibles et transparentes, conformément au cycle électoral et à la Constitution (…)»
  1. Lieu de la tenue du dialogue
Kinshasa, Capitale de la RDC. 
  1. Taille et composition
40participants répartis équitablement entre les deux tendances politiques en présence et leurs alliés respectifs, soit 20 membres par délégation.
  1. Ordre du jour
Premier volet : Règlement du contentieux électoral de novembre 2011 et son corollaire qui est la crise de légitimité
  • Ceci implique d’identifier les responsables de la fraude électorale des élections organisées en 2011
  • Il faudra que les responsables à l’origine de la fraude électorale soient écartés de la gestion du pays à tous les niveaux et du déroulement du processus électoral en cours.
Deuxième volet : définir un processus électoral consensuel
  1. Sur le calendrier électoral


-Définir un nouveau cycle électoral de manière consensuel

-Il convient de rappeler que nous avons eu deux cycles électoraux incomplets et entachés d’irrégularités manifestes

-Nous préconisons l’organisation premièrement de l’élection présidentielle qui pourra être couplée aux élections législatives dans le délai constitutionnel, soit, conformément à l’article 73 de la Constitution, au plus tard avant le 19 septembre 2016.

-Les autres scrutins devront être organisés après les élections présidentielles et législatives.
  1. Sur la restructuration de la CENI
Eu égard aux expériences passées, les cycles électoraux 2006 et 2011 où les membres de la CENI ont été de instrumentalisés, il convient de mettre en place une CENI dont les membres sont constitués de manière paritaire, à savoir 12 membres dont 6 sont désignés par le camp du système Kabila et 6 autres désignés par le camp du changement ; mais uniquement au sein de la société civile.

Cette CENI doit avoir une présidence collégiale (2 présidents, représentant chaque camp).

A défaut de cette formule, tous les membres doivent être désignés part consensus.
  1.  Sur le contentieux électoral


Nous prenons note de la promulgation de la loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle (du 15 octobre 2013).

Néanmoins, le choix de ses animateurs pose également un problème en raison de l’intervention directe de Monsieur Kabila dans leur désignation. Ceci aura des conséquences inéluctables quant à leur indépendance et autonomie.

Ceci implique également que les 9 membres de la Cour Constitutionnelle soient désignés par consensus.
  1. Sur le fichier électoral


-Sur la fiabilisation du fichier électoral, il faut un audit externe du fichier électoral pour garantir la transparence et la crédibilité du processus électoral. En conséquence, un consensus doit être dégagé quant aux modalités de cet audit (choix du prestataire, date…)

-Sur la révision du fichier électoral : il faut un fichier électoral inclusif et nettoyé en tenant compte des nouveaux majeurs, des Congolais de l’étranger, des non-inscrits, des doublons en amont des prochaines échéances électorales.
  1.  Sur la traçabilité des résultats


-La problématique des témoins dans les bureaux de vote : présence obligatoire des témoins dans les bureaux de vote, mention, de leurs observations sur les PV signés par tous.

-La problématique liée à la compilation des résultats : une solution consensuelle s’impose pour éviter les contestations futures et la fraude électorale.
  1. Sur le renforcement du mandat de la Monusco pour sécuriser le processus


Il convient de rappeler que tous les différents électoraux depuis le cycle de 2006, se sont soldés par les violations graves des droits de l’homme et du droit humanitaire (affrontement Bemba-Kabila 2006-2007, événement de novembre 2011 et des manifestants du 19 au 21 janvier 2015).

Il échet de rappeler qu’en vertu de la résolution 2147 qui renouvelle le mandat de la Monusco jusqu’en mars 2016, celle-ci remplit sa mission de bons offices pour un soutien logistique du processus électoral.

Il convient dès lors de renforcer le mandat de la Monusco pour qu’elle assure la libre circulation des personnes lors des opérations électorales, qu’elle puisse assurer une protection efficace des civiles lors des manifestations portant sur des contestations liées au processus électoral. Par conséquent, elle doit pouvoir intervenir, elle doit pouvoir intervenir en faisant usage de la force pour protéger les civils contre toutes violations des droits de l’homme commises par toute entité qui réprime les manifestations par un usage disproportionné de la violence.
  1.  Sur la création d’un observatoire des élections chargé de la certification des résultats


Il convient de crées un organisme chargé de certifier le processus électoral. Il sera composé : de la Monusco et des représentants de la société civile congolaise (notamment l’église catholique et des ONG actives en matière d’élections, telle que l’AETA…).

Le Certificateur devra certifier que tous les stades du processus électoral auront fourni toues les garanties nécessaires pour la tenue d’élections ouvertes, libres, justes et transparentes, conformément aux normes internationales.

Le certificateur sera chargé de certifier les résultats, et une fois certifiés, les résultats ne pourront faire l’objet d’aucune contestation non démocratique ou de compromissions.
  1. Durée des travaux
Dix jours maximum dont 3 réservés aux travaux de la facilitation de la Monusco.
  1. La responsabilité historique de la Communauté internationale


Pour toutes les raisons sus-évoquées, il y a urgence de convoquer un dialogue politique dans l’esprit de la résolution 2147 et de l’Accord-cadre, particulièrement en ce moment où le peuple congolais, ayant dépassé le seuil du tolérable, pourrait être tenté par d’autres solutions qui risquent de réduire à néant les efforts déployés par la Communauté Internationale dans le cheminement de la République Démocratique du Congo vers un Etat de droit.

Fait à Bruxelles, le 14 février 2015

Etienne Tshisekedi wa Mulumba

Président de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social



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