*Kamitatu Olivier, Endundo, Mobango, Banza Maloba, Kyungu, Charles Mwando Nsimba et Christophe Lutundula ont pris la tête des membres de la Majorité Présidentielle opposés au glissement. Dans une lettre au Président Kabila, le G7 exige la tenue des élections présidentielle, législatives, provinciales et sénatoriales dans le respect absolu de la Constitution et dans les délais prescrits. Les locales et municipales devaient être renvoyées à plus tard, faute de moyens et de temps. En lieu et place, il faudrait sans tarder procéder à l’enrôlement des jeunes majeurs et à la révision du fichier électoral. Le G7 condamne le démembrement forcé qui a affaibli l’Etat. Visiblement, ça chauffe au sein de la famille politique présidentielle.
L’histoire bégaie-t-elle ou elle se répète ? En moins d’une année, le G7 (MSR, ARC, PDC, ACO, UNAFEC, UNADEF et le MSDD) a adressé trois lettres dont deux en février et mars au Président de la République, Autorité morale de la Majorité Présidentielle. La dernière en date a été signée hier, lundi 14 septembre 2015, par Yves Mobango pour le MSR, Olivier Kamitatu de l’ARC, José Endundo pour le PDC, Banza Maloba pour l’ACO, Antoine Gabriel Kyungu wa Kumwanza de l’UNAFEC, Charles Mwando Nsimba pour le compte de l’UNADEF et, enfin, Christophe Lutundula du MSDD. Dans cette lettre, les signataires proposent à leur famille politique une nouvelle stratégie voulue plus réaliste et porteuse de réussite. Le but de la nouvelle approche vise à désamorcer la tension qui monte de plus en plus dans le pays, depuis plus d’une année. Les auteurs de la lettre sont convaincus que s’ils sont suivis, la Majorité Présidentielle a toutes les chances de conserver démocratiquement le pouvoir d’Etat. Alors, que proposent-ils ?
Le report des locales
Le G7 dit non au glissement et prône le respect absolu de la Constitution. Les signataires constatent qu’il se pose, à la fois, un problème de moyens et de temps. Puisqu’il en est ainsi, les seules élections à organiser en 2016 sont la présidentielle, les législatives nationales, les provinciales et les sénatoriales. Les élections locales qui alourdissent inutilement le calendrier électoral sont à reporter sine die. Pour ce faire, l’enrôlement des jeunes majeurs ainsi que la révision du fichier électoral ne sont pas négociables. Le G7, qui condamne le découpage précipité, prévient que le flou savamment entretenu dans l’arrêt de la Cour Constitutionnelle sur la manière de gérer les 21 nouvelles provinces ne doit pas servir d’alibi pour retarder l’élection des Gouverneurs. A défaut d’organiser l’élection des Gouverneurs dans les nouvelles provinces, si évidemment il y a des raisons objectives, il faudrait procéder à la modification urgente de la loi de programmation dans le sens d’une application progressive, selon qu’une province est matériellement et politiquement prête. S’ils le proposent, c’est parce que le démembrement précipité a conduit à l’affaiblissement de l’Etat et à l’anarchie dans l’administration du territoire national.
Dialogue
Le dialogue est voué à l’échec, au cas où il aurait pour objectif, l’idée de contourner la Constitution. La stratégie du glissement est, de l’avis du G7, une démarche collectivement suicidaire. Elle ouvre la brèche à navigation à vue, dans un pays où les conflits et guerres fratricides sont légions. D’ores et déjà, il y a lieu de noter que cette sortie du G7 crève l’abcès au sein de la Majorité Présidentielle.
Faut-il déjà parler d’une possible désintégration de la famille politique au pouvoir en RDC ? On n’y est pas loin, dans tous les cas. Tout dépend de la réaction des durs des durs. Mais, une chose est certaine, les personnalités ayant signé la lettre et leurs partis politiques n’ont pas décidé de quitter la Majorité Présidentielle. Néanmoins, le G7 démontre que l’unanimité n’existe pas, quant au schéma de l’enlisement.
Que faire ?
En agissant ainsi, Olivier Kamitatu, Mwando Nsimba, José Endundo et les autres veulent épargner le pays d’une crise politique inutile et éviter à la Majorité Présidentielle la responsabilité d’une telle crise aux conséquences imprévisibles. Surtout que rien n’indique que la MP en sortirait ragaillardie. Il ne reste plus qu’une année et le temps passe vite. Plutôt que de tergiverser, la Majorité Présidentielle ferait œuvre utile, en préparant sérieusement l’alternance politique dans la paix. L’objectif étant de poursuivre l’œuvre du redressement du pays, fruit du travail durement abattu, depuis d’une décennie, sous le leadership du Président Joseph Kabila. Les membres de G7 sont convaincus que les fondamentaux du développement d’une nation procèdent de l’action de tous les citoyens qui partagent les mêmes valeurs et regardent dans la même direction.
La Pros.
Voici, in extenso, la lettre du G7 adressée au Président de la République Démocratique du Congo, son Excellence M. Joseph Kabila.
Kinshasa, le 14 septembre 2015
Copie pour information
Aux Membres du Bureau Politique de la Majorité Présidentielle, MP
(TOUS) à Kinshasa
A son Excellence Monsieur Joseph Kabila Kabange, Président la République Démocratique du Congo,
Autorité Morale de la Majorité présidentielle
A KINSHASA/GOMBE
(Avec l’expression de nos hommages les plus déférents)
Excellence Monsieur le Président de la République,
Qu’il nous soit permis de rappeler qu’il y a dix ans, appelant à la mobilisation générale en vue de la reconstruction et du redressement du pays, Vous nous avez invités à nous joindre à Vous afin de constituer une famille politique soudée autour d’une vision partagée de l’avenir de la République Démocratique du Congo et dans le cadre d’un nouvel ordre politique établi par une nouvelle Constitution.
Ensemble, nous avons mené la campagne qui a abouti à l’adoption de cette Constitution, le 19 décembre 2005, par 85 % de la population congolaise.
C’est ici l’occasion pour nous, Monsieur le Président de la République, de rappeler et de réaffirmer que le partenariat que nous avons engagé, il y a dix ans, repose sur les valeurs républicaines et démocratiques inscrites dans la Constitution du 18 février 2006.
Par la suite, nous nous sommes mobilisés pour gagner les élections afin de vous donner une large majorité de Gouvernement et avons continué à soutenir votre action à la tête du pays. Dans cette action, la rencontre des aspirations légitimes du peuple congolais est demeurée une constante préoccupation. Et, en dépit des échecs et des erreurs inhérents à toute entreprise humaine, il y a lieu de reconnaître que, sous votre leadership, la transformation structurelle de la Société Congolaise et de l’économie du pays a été bel et bien lancée. Même si aujourd’hui, les inégalités sociales sont encore trop nombreuses et la pauvreté continue à frapper durement la grande majorité de la population, il ne reste pas moins vrai que des progrès sensibles ont été réalisés dans les domaines touchant à la vie quotidienne de nos compatriotes.
C’est dans cet esprit et en vue de sauvegarder nos valeurs communes et les acquis relevés ci-dessus, qu’en février dernier, après les tristes évènements qui avaient endeuillé la capitale ainsi que plusieurs villes du pays, et face aux doutes de plus en plus grands qui ont gagné la société congolaise, plus particulièrement sa jeunesse, il était de notre devoir, en tant que membres de la Majorité Présidentielle, de vous faire part de nos préoccupations sur la nécessité de renforcer le contrat de confiance entre le pouvoir et le peuple congolais, d’une part, et entre nos Institutions et la Communauté Internationale, de l’autre.
Notre motivation profonde en adressant à votre très haute Autorité les deux lettres de février et mars derniers, a été, d’une part, d’apporter notre modeste contribution à la consolidation de la démocratie et de la paix civile afin d’épargner notre pays d’une crise politique inutile et, d’autre part, d’éviter à la Majorité Présidentielle au pouvoir, la responsabilité d’une telle crise, aux conséquences imprévisibles, et dont il n’est pas évident que notre famille politique ainsi que notre pays, la République Démocratique du Congo, en sortent grandis.
A titre de rappel, nous vous avons exprimé dans ces correspondances, nos vives inquiétudes quant (i) aux velléités de révision ou de changement de Constitution, (II) aux tentatives de réécriture de la Loi électorale, (III) au démembrement précipité des provinces, (IV) à l’organisation très controversée des élections locales et municipales et (V) au fonctionnement interne de la Majorité Présidentielle, notre famille politique.
Aujourd’hui, force est de constater que l’installation précipitée de nouvelles provinces a conduit à l’affaiblissement de l’Etat et l’anarchie dans l’administration du territoire national. Au demeurant, cette situation chaotique a même amené la Cour Constitutionnelle, récemment installée, non seulement à en faire le constat, mais également et surtout à proposer des mesures exceptionnelles qui énervent la Constitution.
Quant à la tenue des prochaines élections tant attendues par le Peuple congolais, chaque jour qui passe apporte plus de confusion que de clarté. En effet, il est, par exemple, difficilement compréhensible qu’au moment où la CENI et Votre très Haute Autorité reconnaissent la pertinence de l’enrôlement des nouveaux majeurs, le Parlement soit amené à adopter d’une façon particulière, la loi portant répartition des sièges pour les élections locales et municipales.
En vérité, la dernière session extraordinaire du Parlement et l’arrêt de la Cour Constitutionnelle rendu sur requête de la CENI, le mardi 08 septembre courant, ont conduit l’écrasante majorité des Congolais à la conviction qu’il y a des intentions inavouées de ne pas respecter la Constitution, de décrédibiliser et de désacraliser les institutions sur lesquelles repose tout régime démocratique, comme s’il pouvait exister un autre schéma que l’ordre institutionnel pour lequel des millions de congolais ont consenti d’énormes sacrifices.
Par ailleurs, en raison de l’affaiblissement de la cohésion nationale et du ralentissement du processus de démocratisation, on assiste dans certaines parties du territoire national à la résurgence des tensions interethniques et à la recrudescence des crimes organisés tel, le cas des tueries cyclique dans la région de Beni au Nord-Kivu.
Dans ce contexte, vouloir revenir sur le consensus et le compromis historique laborieusement obtenus par les forces vives de la nation congolaise à Sun City et l’ordre institutionnel inscrit dans la Constitution ne fera qu’exacerber la méfiance à l’égard des dirigeants et générer l’instabilité et l’insécurité.
Excellence Monsieur le Président de la République,
13. La gravité de la situation et les risques qu’elle fait peser sur l’avenir de la RDC appellent des initiatives politiques courageuses aussi bien de votre part que de celle de la Majorité présidentielle.
14. Face à cette situation et au moment où se prépare- et en plus, à l’extérieur- un dialogue politique, nous sommes dans l’obligation de Vous apporter notre contribution à la recherche des solutions efficaces aux défis majeurs de l’heure.
15. A cet effet, il nous semble fondamental de garantir un respect absolu de la Constitution. Ce respect est le gage de la paix civile, de la sécurité, de la stabilité et de l’unité de notre pays. Comme l’enseigne l’histoire, en particulier, celle de notre pays, ces fondamentaux du développement d’une nation ne viennent pas d’un homme seul, fût-il providentiel, mais bien de l’action de tous les citoyens partageant les mêmes valeurs et regardant dans la même direction.
16. A n’en point douter, le dialogue projeté sera voué à l’échec s’il n’est pas assis sur une volonté ferme de tous d’affirmer l’intangibilité de notre Constitution, et d’en respecter les dispositions en ce qui concerne particulièrement, les valeurs fondamentales de solidarité nationale, de liberté d’expression et de manifestation, les échéances électorales et l’alternance politique.
17. Quant au processus électoral, dans la recherche de la paix et de la stabilité, l’organisation des élections libres, transparentes, crédibles et apaisées constitue une prémisse incontournable dans l’établissement de la Démocratie et l’instauration de l’Etat de droit. N’ayant pu organiser les élections provinciales et sénatoriales en temps voulu, et maintenant même, celles bien moins coûteuses des gouverneurs et vice-gouverneurs de provinces, comment s’étonner de la suspicion générale qui s’est installée contre nous, en voulant maintenir, à tout prix, les élections locales, municipales et urbaines ?
18 Voilà pourquoi, Monsieur le Président de la République, au regard des contraintes financières et tenant compte de la nécessité d’assurer la gestion des provinces et de respecter les prescrits des articles 73 et 103 de la Constitution, nous sommes devant l’ardente obligation de nous limiter à l’organisation des élections présidentielle, législatives, sénatoriales et provinciales sur base d’un fichier révisé.
19. Au sujet de ce fichier, il importe de rappeler que tout Congolais remplissant les conditions légales d’être électeur et éligible, exerce librement ses droits constitutionnels. Dès lors, l’enrôlement de nouveaux majeurs et le nettoyage du fichier électoral sont obligatoires et nous paraissent non négociables.
20. En ce qui concerne l’élection des gouverneurs et Vice-gouverneurs de nouvelles provinces, il importe de souligner qu’elle doit être organisée. Et, il ne convient pas de saisir le flou entretenu par l’arrêt de la Cour Constitutionnelle quant à ce, pour la retarder le plus longtemps possible. A défaut de la tenir à temps pour des raisons techniques objectives, la modification urgente de la loi de programmation s’impose dans le sens de son application progressive, selon que telle ou telle province est ou non prête matériellement et politiquement.
21. Il va de soi que toutes les difficultés actuelles et le retard accumulé dans l’organisation des élections appellent un ajustement conséquent du calendrier électoral. Toutefois, cet ajustement doit impérativement respecter les délais constitutionnels et se faire en toute transparence. Afin de répondre aux préoccupations ci-dessus, il importe d’élaguer du processus électoral tout ce qui est de nature à le surcharger, à retarder les échéances et à envenimer le climat de paix et de cohésion nationale déjà fragilisée.
22. A une année des élections, désireuse de conserver démocratiquement le pouvoir afin de poursuivre l’œuvre du redressement du pays engagé avec Vous, la Majorité présidentielle, devra s’atteler à préparer, en toute sérénité et en conformité avec sa charte, les prochaines élections dans la perspective de l’alternance politique. Nous sommes convaincus que notre Majorité a tous les atouts pour les gagner en toute transparence et réussir le pari de l’alternance politique dans la paix. La stratégie actuelle nous paraît suicidaire. Il est indispensable d’en adopter une autre, plus réaliste et porteuse de réussite.
23. Telle est l’approche que nous proposons afin de désamorcer la tension qui, depuis plus d’une année, monte de plus en plus dans le pays, de décrisper la situation politique interne et de trouver ensemble des solutions efficaces aux défis majeurs auxquels la RDC est confrontée pour le moment, dont celui de l’organisation des élections démocratiques, transparentes et crédibles.
Veuillez croire, Excellence Monsieur le Président de la République, en l’expression de notre très haute considération.
Le Mouvement Social pour le Renouveau, MSR (Yves Mobando Yogo)
L’Alliance pour le Renouveau du Congo, ARC (Olivier Kamitatu Etsu)
Le Parti Démocrate Chrétien, PDC (José Endundo Bononge)
L’Avenir du Congo (Banza Maloba Dany)
L’Union Nationale des Fédéralistes du Congo, UNAFEC (Antoine Gabriel Kyungu wa Kumwanza)
L’Union Nationale de Démocrates fédéralistes, UNADEF (Charles Mwando Nsimba)
L’Alliance des Démocrates pour le Progrès ADP/MSDD (Christophe Lutundula Apala Pen’ Apala)
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