Majorité, Opposition et Société civile se regardent en chiens de faïence. Des actes et campagnes de sape se multiplient. Alors que la santé réelle du  processus électoral est, paradoxalement,  moribonde.  Calendrier global pulvérisé. Pas d’agenda précis, ni de perspectives rassurantes. C’est tout   un tas de problèmes à régler, avant d’aller aux élections. Des questions consécutives au  financement et à la   sécurisation des élections, à l’enrôlement des jeunes devenus majeurs, au nettoyage du fichier électoral selon les recommandations de l’OIF, au  réaménagement du calendrier global  ainsi qu’à l’accompagnement de la communauté internationale, demeurent intactes. Le Dialogue, appelé à y trouver des voies de sortie, n’est pas encore convoqué. D’où, la CASE tire la sonnette d’alarme. Elle interpelle les autorités du pays, les acteurs politiques ainsi que  la société civile. Après consultations, elle pose un vrai diagnostic  sur les  risques constitutionnels et politiques du glissement électoral. Au passage, elle recommande  au Président de la République, M. Joseph Kabila Kabange, de peser de tout son poids, pour pousser le gouvernement à mettre des moyens en vue de  garantir la réussite du processus électoral. Au gouvernement, elle lui  demande   de présenter à la nation l’état de sa capacité financière pour l’organisation des élections. A la CENI, la CASE lui  exige  de briser son silence et de justifier devant la nation,  les véritables difficultés auxquelles elle est confrontée. A la Communauté Internationale, la CASE demande, enfin,  de se démarquer de cette brouille électorale,  en posant des actes de  responsabilité et en apportant sa part de contribution au processus électoral en RD. Congo.   L’heure est grave et qu’il est temps de regarder dans la bonne direction afin de sauver notre démocratie, insiste-t-elle. Voilà pourquoi, la CASE, très soucieuse de la situation préoccupante à laquelle le processus électoral fait face, recommande aux uns et aux autres, d’accorder leurs violons et de prendre la bonne décision en dialoguant sincèrement pour une sortie de crise électorale rapide en RD.  Congo ;  de travailler en coalition tant du côté de la Majorité que  de l’Opposition afin de maximiser les chances respectives  de victoire aux élections prochaines ;  de trouver urgemment un consensus autour de la question du médiateur du Dialogue National Inclusif afin de conjurer,  très sérieusement,  les questions électorales en suspens,  à savoir, le financement des élections, la programmation des différents scrutins par rapport aux impératifs du délai constitutionnel; la sécurisation des élections ; la régulation de l’espace médiatique en période électorale et  les arriérés législatifs en rapport avec les élections. La déclaration, ci-après, ramasse tous les aspects liés aux élections, y compris l’affaire du respect des délais constitutionnels.


DECLARATION D’OBSERVATION LES RISQUES CONSTITUTIONNELS ET POLITIQUES DU GLISSEMENT ELECTORAL
La Commission Africaine pour la Supervision des Elections (CASE) vient de boucler une première étape de consultations avec les différentes tendances politiques et sociales en République Démocratique du Congo afin d’évaluer les causes, les effets, l’impact et les conséquences de tout glissement des dates sur le calendrier électoral global rendu public par la Commission Electorale Nationale Indépendante en date du 12 février 2015.

La CASE formule ses profonds regrets de constater que le retard accumulé dans la mise en œuvre du Calendrier électoral ne semble pas préoccuper outre mesure la classe politique en tant que première entité de notre société à tirer les leçons techniques, politiques et diplomatiques des différents dépassements des délais. Sur ce point, la CASE est clairement préoccupée de voir les uns et les autres affuter constamment leurs armes politiques, dans l’unique but de se combattre, une manière indéfendable de se rejeter mutuellement la responsabilité du glissement électoral.

Raison pour laquelle la CASE s’annonce encore une fois aujourd’hui comme entité citoyenne de la Société Civile responsable pour dire tout haut ce qui se chuchote manifestement plus bas.

  1. DU GLISSEMENT ELECTORAL EN 2015 ET 2016

Il est irresponsable qu’à ce jour aucune composante politique de notre pays ne soit en mesure d’appréhender avec profondeur, responsabilité, efficacité, transparence et vérité historique cette grande question du glissement électoral.

  • Le glissement électoral devrait être perçu comme une question de grande profondeur historique pour la politique nationale :Car cette problématique devrait pousser les hommes et les femmes de la RDC à mesurer les véritables enjeux en présence et réfléchir froidement sur les retombées immédiates, futures et historiques de cet évènement non souhaité ;

  • Le glissement électoral appelle les consciences nationales à plus de responsabilité politique et sociale : lorsqu’on réalise combien cette situation peut conduire la nation au chaos, au désordre, au déséquilibre, à une débâcle électorale, bref, à un effectuer un recul démocratique. Ici, au-lieu de se focaliser sur l’essentiel, les différentes tendances politiques en présence s’entêtent passionnément à en découdre politiquement entre elles, au-lieu de rechercher des solutions qui s’imposent à la nation ;
  • Le glissement électoral est une question à appréhender avec efficacité : tant il est vrai que si elle est abordée avec sentiment, elle pourrait affecter l’efficacité de toutes les institutions de la République, y compris la CENI ;
  • Le glissement électoral devrait êtreperçu comme une question de transparence : pour être traitée au vu et su de tous. Se l’approprier par les politiques tout seuls est dangereux car susceptible de générer des suspicions redoutables;
  • Le glissement électoral est enfin une question de vérité historique : Car elle concerne tout un peuple, toute une histoire démocratique du pays.

De ce qui précède, il y a lieu de distinguer deux types de glissement électoral en République Démocratique du Congo :
  • Le glissement politique qui viendrait violer la Constitution de la République qui stipule en son article 220 ce qui suit : « La forme républicaine de l’Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du Gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, l’Indépendance du Pouvoir Judiciaire, le Pluralisme politique et syndical ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle » d’une part, et

  • Le glissement de fait qui serait justifié par les aléas techniques et financiers relatifs aux contraintes énumérées par le Calendrier électoral global du 12 février 2015. 

Dans les deux cas, cette problématique du glissement électoral mérite d’être débattue à haute voix.

  1. Retards accumulés dans la mise en œuvre du Calendrier électoral global

Examinant l’histoire récente du processus électoral en cours, il y a lieu de retenir qu’hormis le débat très engagé sur les deux options mises sur la table de l’Assemblée Nationale le 30 janvier 2014, la feuille de route proposée par le Président de la CENI (à l’époque), évoquait déjà les exigences ainsi que le cahier de charge des autres institutions pour une réalisation à bonne date du processus électoral. 

  • La feuille de route de la CENI enjoignait le Parlement de prendre en compte les aspects suivants :
  • Les budgets des opérations, de fonctionnement, d’investissement et de rémunération dans la loi des finances de 2014 ;
  • Le vote de la loi électorale au plus tard en Mars – Avril 2014 ;
  • Le vote de la loi portant répartition des sièges en fonction des exigences du cycle électoral ;
  • L’harmonisation des délais impératifs pour les élections urbaines, municipales, locales, provinciales et sénatoriales dans les délais similaires ;

  • La feuille de route de la CENI recommandait au Gouvernement ce qui suit :
  • La mobilisation du budget des opérations électorales pour garantir la réalisation dans les délais de toutes les activités du chronogramme (Plan de décaissement du budget pluriannuel des élections) ;
  • L’opérationnalisation et le financement du Plan de sécurisation du processus électoral ; 

  • La feuille de route de la CENI exigeait de notre Justice nationale les accommodations ci-après :

  • L’opérationnalisation et le renforcement des capacités matérielles et personnelles des Tribunaux de Grande Instance pour le traitement des contentieux des élections (au plus tard  en septembre 2014) ;

  • La formation des magistrats et des auxiliaires de la justice sur les techniques électorales et la gestion du contentieux des élections (au plus tard en septembre 2014) ;
  • La protection et la sécurisation juridique du patrimoine de la CENI.

  1. Responsabilités dégagées sur les dépassements des délais du Calendrier

La problématique du glissement électoral doit d’abord interpeller les entités responsables de la mise en œuvre opérationnelle des élections en République Démocratique du Congo. Il s’agit entre autres de :

  • Le Parlement national (Assemblée Nationale et Sénat): Ces deux institutions ont accumulé un retard de plus d’une année avant de débattre et de voter les lois essentielles au processus électoral à savoir : La Loi électorale votée une année après et la Loi portant répartition des sièges aux locales et communales votée et promulguée il y a seulement quelques trois mois ;

  • Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo : Cette institution n’a toujours pas conclu ni signé avec la CENI le Plan de décaissement des finances électorales. Il convient de souligner que ce plan de décaissement constitue un outil essentiel à la mobilisation des contributions, y compris des partenaires tant nationaux qu’internationaux au financement des élections congolaises. En outre, le Gouvernement devrait se rattraper par l’opérationnalisation de ce plan dans les meilleurs délais pour ne pas faire le lit du glissement électoral ;

  • La Classe politique (Majorité et Opposition) : Celle-ci multiplie des prises de position qui n’avancent en rien le processus électoral. Les deux tendances s’évertuent à persévérer dans une escalade verbale sans lendemain foulant aux pieds les vrais soucis de la population ;

  • La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) : ne justifie toujours pas son silence autour des blocages majeurs qui minent le processus électoral congolais. La CASE soupçonne par-là, la CENI de contribuer à sa manière au blocage du processus électoral. Nous dénonçons donc son silence coupable qui n’éclaire personne sur la santé réelle du processus électoral.

  • La Presse Nationale Congolaise : Elle aussi est responsable du laisser-aller médiatique justifié par l’excès de la liberté d’expression à travers les débats, les discours surtout de la campagne pro et anti-glissement occasionnant un traumatisme profond dans la population qui se demande finalement à quel saint se vouer ;

  • La Société Civile (dans sa grande diversité) : Notre propre composante (j’ai cité la Société Civile de la République Démocratique du Congo) a aussi manqué au rendez-vous du rappel à l’ordre. C’est à nous société civile qu’il appartient d’interpeller les décideurs électoraux de notre pays afin qu’ils prennent résolument leurs responsabilités en mains dans le sens d’éviter à la nation tout risque de glissement électoral fatal.

  1. OBSERVATIONS DE LA CASE PAR RAPPORT AUX DEVELOPPEMENTS DE LA SITUATON POLITIQUE

  • De l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle rendu public le 10 Septembre 2015.
La CASE a salué les conclusions de l’Arrêt N°R.Const.0089/2015 en ce qu’il ordonne :
  • A la CENI : de réévaluer son calendrier électoral en toute indépendance et impartialité, ce qui rencontre la position exprimée par la CASE dans sa déclaration du 21 juillet 2015. Nous recommandions justement la réévaluation urgente du calendrier électoral et d’en dégager publiquement les besoins de faisabilité ainsi que les responsabilités de mobilisation des fonds.
  • Au Gouvernement de la République, l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle ordonne d’accélérer l’installation des bureaux définitifs des Assemblées Provinciales de nouvelles provinces et de doter la CENI des moyens nécessaires pour l’organisation impérative de l’élection des Gouverneurs et Vice-gouverneurs desdites provinces avant toute élection des députés provinciaux sur toute l’étendue de la République. La CASE saisit cette opportunité pour demander aux deux institutions à savoir la CENI et le Gouvernement, d’honorer sans attendre leur part de responsabilité pour tenir strictement le respect de cet arrêt.

  • Des déchirements politiques du moment
La CASE constate non sans regret, que la classe politique congolaise brille de jour en jour par des crises de positionnement, des querelles de visibilité et des déchirements au sein des mêmes composantes.

La CASE craint que les départs enregistrés au sein de la Majorité ces derniers jours tout comme les dissensions toujours persistantes au sein de l’Opposition, ne constituent des manœuvres de blocage du processus électoral.

C’est pourquoi nous attirons l’attention de tous et de chacun sur la nécessité de privilégier avant tout, le bien être de la population. Aux uns et aux autres, nous conseillons vivement à la classe politique d’observer l’éthique et la déontologie qui régissent leur profession pour privilégier le respect mutuel, le respect de la parole donnée et d’éviter de populariser leurs faiblesses internes.

  1. LES RECOMMANDATIONS FONDAMENTALES DE LA CASE

Au regard de toute cette confusion qui plane sur le processus électoral en République Démocratique du Congo, la Commission Africaine pour la Supervision des Elections (CASE) rappelle à toutes les parties prenantes au processus électoral que l’heure est grave et qu’il est temps de regarder dans la bonne direction afin de sauver notre démocratie.

A cet effet, la CASE recommande aux uns et aux autres :

  1. D’accorder leurs violons et de prendre la bonne décision en dialoguant sincèrement pour une sortie de crise électorale rapide en RD Congo ;
  2. De travailler en coalition tant du côté de la Majorité que du côté de l’Opposition afin de maximiser leurs chances de victoire aux élections prochaines ;
  3. De trouver urgemment un consensus autour de la question du médiateur du Dialogue National Inclusif afin de régler très sérieusement les questions électorales de l’heure à savoir :
  • Le financement des élections
  • La programmation des différents scrutins par rapport aux impératifs du délai constitutionnel;
  • La sécurisation des élections ;
  • La régulation de l’espace médiatique en période électorale ;
  • Les arriérés législatifs en rapport avec les élections.

La CASE attire spécialement l’attention des entités de référence que voici sur les faits suivants :

  • A Monsieur le Président de la République Démocratique du Congo : Nous recommandons une nouvelle fois de peser de tout son poids politique, administratif et constitutionnel afin de pousser le Gouvernement et tous les intervenants, à réunir des moyens qu’il faut pour booster le processus électoral. Son inaction en cette matière viendrait compromettre les chances souhaitées d’une sortie de crise électorale apaisée en RDC ;

  • Au Gouvernement de la RD Congo : Nous recommandons de présenter à la nation l’état de sa capacité à financer le processus électoral ;

  • A la CENI : de briser son silence et de justifier devant la nation les véritables difficultés auxquelles elle est confrontée ;

  • A la Communauté Internationale : de se démarquer de cette brouille électorale en posant des actes de sa responsabilité et en apportant sa part de contribution au processus électoral.

Fait à Kinshasa, le 30 Septembre 2015

Pour la Commission Africaine pour la Supervision des Elections (CASE)
Simaro NGONGO MBAYO
Président





LIENS COMMERCIAUX

[VIDEOS][carouselslide][animated][20]

[Musique][vertical][animated][30]

 
Top