19 septembre 2015- 19 septembre 2016, il y a un an, Moïse Katumbi quittait le camp présidentiel. Traqué depuis par le Pouvoir, l'ancien gouverneur du Katanga continu de préparer son rêve de Président de la République. Ses chances, ses liens avec l'occident, ses relations avec les autres...

Il est peut-être la plus grande perte Kabiliste après la disparation, en 2012, d’Augustin Katumba Mwanke — que l’on désignait autrement : « l’éminence grise du système Kabila» — ; Moïse Katumbi Chapwe est l’un des hommes politiques qui donnent encore d’insomnies à la Majorité Présidentielle. Ce riche homme d’affaire jouit d’un énorme capital sympathie tant auprès d’une partie de la population congolaise que de la communauté internationale. Dans le grand Katanga, son fief, en passant par les deux Kivus, et timidement Kinshasa, celui que le magazine Britannique The Economist décrivait comme le «deuxième homme le plus puissant de la RDC», peut également compter sur le soutien, à peine voilé, du G7, dont l’un des chefs de fils n’est autre que le sulfureux Gabriel Kyungu.

En effet, Moïse Katumbi s’est offert une remarquable reconversion politique en douce. Devenant, comme par magie, opposant au président Joseph Kabila, et par la même occasion l’un des politiciens congolais les plus appréciés de la population et même les plus écoutés au sein de l’opposition où il tire les ficelles en coulisse.

Le Groupe de 7 (G7) justement, composé notamment de l’ancien Conseiller spécial en matière de sécurité à la présidence de la République et leader du Mouvement social pour le renouveau (MSR), Pierre Lumbi, de l’ancien gouverneur et populaire dans l’ex-Katanga, Kyungu wa Kumwanza, ou l’indéboulonnable président du l’Union nationale de démocrates fédéralistes (UNADEF), Charles Mwando Simba et plusieurs autres personnalités politiques, lui prêterait aussi une oreille attentive.

Son influence va même au-delà du G7, atteignant les poids lourds de l’opposition. En décembre 2015, il se rend à Bruxelles où il y rencontre l’opposant historique Etienne Tshisekedi. Dès le lendemain de cette rencontre, le président de l’UDPS revient sur sa décision de participer au dialogue politique convoqué par le président Kabila, auquel il avait pourtant donné son accord quelques jours auparavant. De cette union naîtra le « grand » Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement et une lutte sans merci contre le pouvoir.

Lutte sans merci, c’est ce que fait Katumbi contre Kamerhe, son autre « frère » de l’opposition, dont il a ce pendant pris la place du « 3ème homme ». Si au début de l’année 2016 leur fréquentation avait laissé entendre une « alliance » anti-Kabila, celle-ci s’est effritée. « Ça leur arrive de s’appeler [Katumbi et Kamerhe] », a glissé Jolino Makelele, le Porte-parole de l’UNC à Politico.cd.

Le Baron, vers la présidence…

Moise-Katumbi-de-retour

Durant les mois qui ont suivie son départ du PPRD, le président du célèbre club du TP Mazembe affiche clairement ses ambitions, tissant calment sa toile censée vraisemblement l’installer à la tête du pays, dénonçant le fait que, selon lui, “tout est mis en oeuvre pour ne pas respecter la Constitution”, devenant un véritable chantre contre le 3ème mandat du président Joseph Kabila.

Fort de sa fortune, l’homme n’hésite par à dépenser pour du lobbying auprès des puissances internationales. Selon le chercheur américain Jason Stearns, la Société minière du Katanga (MCK), une société fondée par Moïse Katumbi et revendue dès son départ du gouvernorat du Katanga, a initialement recouru à Akin, Gump, Strauss, Hauer & Feld en 2013 pour officiellement aider à sécuriser l’ouverture d’un consulat américain à Lubumbashi et de faire pression sur l’USAID pour envoyer du maïs au Katanga. Pour ces services, Katumbi a payé 350 000 $ pour la période d’un an.

Selon les archives de Foreign Agents Registration Act, publié dans un article sur le blog Congo Siasa (août 2015), la société n’a eu qu’une réunion pour MCK dans la seconde moitié de l’année 2013. Ce fût avec le député Ed Royce, président de la commission des affaires étrangères la Chambre des représentants. Les autres réunions ont porté sur le processus électoral, précisément la présidentielle en RDC, commente la même source.

L’activité s’est intensifiée en 2015. Le contrat avec Akin Gump a apparemment été renouvelé, et les lobbyistes affirmeraient avoir eu 240 réunions, des courriels et des appels téléphoniques avec divers responsables sur les élections présidentielles. Des responsables américains l’ont confirmé à Jason Stearns qu’« il est clair que MCK pousse à l’action des États-Unis pour garantir la sortie de Kabila en 2016.»

Ajouter à ceci les multiples rencontre de Moïse Katumbi auprès de leaders de l’opposition et dissidents de la Majorité Présidentielle.

Toutefois, dans son ascension, Moïse Katumbi à fort à faire. En face, il doit affronter une bête politique, en la personne du président Joseph Kabila, qui a eu à se coltiner plusieurs calibres lourds de la politique congolaise : depuis son accession au pouvoir à à peine 29 ans, le Raïs, comme le surnomme les Kinois, a acquis une véritable maîtrise des rouages de la politique congolaise qui lui permet, comme un chat, de retomber toujours ses pattes. Soutenu par la « machine » de la Majorité Présidentielle, il peut s’avérer impitoyable lors qu’il faut écraser de l’adversaire politique. Jean-Pierre Bemba ne dira sûrement pas le contraire.

Enemi pluic n°1

RDC-Moise-Katumbi-politique-affaires-foot-0Dès son départ du PPRD, celui qui était de 2007 à 2015 Gouverneur de la riche province du Katanga et membre influent du parti cher à Kabila, est attaqué de tous côtés par des cadres de la Majorité Présidentielle.

De ce changement de cap, qui laisse présager un calcul politique au moment où toute la Majorité au pouvoir est décriée pour son intention de s’y éternisée, des hauts cadres du PPRD iront jusqu’à le qualifier de «traître», le comparant à un passager qui veut « sauver sa peau, lorsqu’il se rend compte que le bateau va bientôt chavirer»

En effet, encore gouverneur, comme la plupart des politiciens congolais au pouvoir, Katumbi a pourtant loué des jours comme des nuits les mérites et le savoir-faire de Kabila. Il a même contribué à faire asseoir le règne de Kabila auprès de plusieurs communautés katangaises.

Joseph-Kabila-et-Moïse-KATUMBI

Ne faisant plus partie des disciples de Kabila, Moïse Katumbi est depuis dans le collimateur du pouvoir, comme d’ailleurs plusieurs autres politiciens qui ont rompu avec le camp présidentiel avant lui.

09 mai 2016, le frère de Katebe Katoto se déclare officiellement candidat à une présidentielle, alors que quelques jours avant, trois coalitions de l’opposition l’ont appelé tour à tour à briguer la magistrature suprême. Un peu plus tôt dans la même journée, le ministère congolais de la Justice Alexis Thambwe avait confirmé avoir ordonné une enquête sur le recrutement de mercenaires étrangers au service de Moïse Katumbi.

En à peine quelques semaines, le président du TP Mazembe sera poursuivie pour « atteinte à la surette de l’Etat », condamné à 38 mois de prison ferme et forcé à l’exile. Ces médias seront fermés, y compris ses proches emprisonnés.

En route vers l’inconnue

CstrenFXEAAwoUsEn « exile », loin du pays, Moïse Katumbi continue son jeu politique, pariant sur un Etienne Tshisekedi toujours aussi farouche qu’imprevsibile. Pour autant, la scène politique congolaise reste l’une des plus floues au monde. Le pouvoir congolais affirme clairement ses ambitions s’éterniser aux affaires, obtenant quasiment et sans grand problème le report de la présidentielle.

Les marches du 19 et 20 septembre ayant été réprimées dans le sang, les opposants congolais ne peuvent que compter sur les condamnations internationales, les sanctions américaines et les menaces françaises pour garder la pression sur Kabila. Entre temps, le Dialogue politique convoqué par le président Kabila bas de l’aile. La communauté internationale, la France et les Etats-Unis en tête appellent à un autre dialogue « plus inclusif ». Dans ce décor compliqué, l’alliance contre nature entre Tshisekedi et Katumbi pourrait traverser des zones de turbulences si, finalement, Joseph Kabila décidait d’accorder à l’UDPS ce « Dialogue inclusif », isolant ainsi l’ancien gouverneur du Katanga.

Toutefois, Katumbi peut compter sur la fermeté d’Etienne Tshisekedi et l’obstination de Kabila à maintenir au pouvoir, laissant place à une confrontation que même Jean Marc Ayrault, le Ministre français des Affaires Etrangères redoute en parlant d’une « guerre civile » à venir.

Une chose est sûre, le futur du « Moïse de Katanga » et celui de toute la nation reste une inconnue absolue.

politico.cd
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