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Le politologue Dieudonné Wamu Oyatambwe était sur place à Kinshasa tout récemment encore et a ainsi pu prendre pouls de la population, des jeunes en particulier, depuis le dernier jour du mandat de Kabila.
olitologue, diplômé de la VUB, auteur du livre « De Mobutu à Kabila. Avatars d’une passion inopinée » (éd. L’Harmattan), Dieudonné Wamu Oyatambwe suit de près la crise en cours en République démocratique du Congo. Il était sur place tout récemment encore et a ainsi pu prendre pouls de la population, des jeunes en particulier. Entretien.

Vous êtes rentré en début de semaine de Kinshasa. Quel était le climat ?

Franchement mauvais… On a le sentiment que le régime ne comprend rien à la problématique des jeunes, à leurs frustrations. Je suis frappé par l’amateurisme avec lequel on gère les manifestations. Car enfin, elles étaient prévisibles, et depuis longtemps. On savait que les gens allaient sortir dans la rue, crier « Carton rouge » ou « Kabila bye bye »… Tout cela aurait pu être prévu, accompagné. Au lieu de cela, le régime est tombé dans le piège, celui de la violence, de la répression. Comme en septembre, lorsqu’il y a eu 50 morts… Ici aussi, tout en accusant l‘opposition de vouloir semer le chaos, le régime est tombé lui-même dans le piège de la violence.

Tout cela s’inscrit sur une base explosive depuis longtemps, la situation sociale. La misère est indescriptible, généralisée. Les jeunes — deux tiers de la population — sont au chômage, il n’y a pas de perspectives d’emploi. En outre, la situation économique a empiré au cours des derniers mois : le cours du franc congolais, par rapport au dollar, est passé de 980 à 1260, ce qui signifie une hausse de 25 % et donc une baisse d’un pouvoir d’achat déjà très faible. C’est intenable. Mais ce qui l’est plus encore, c’est l’arrogance des riches. Dépensiers à souhait, ils construisent des immeubles, organisent des fêtes somptueuses, multiplient les achats de véhicules de luxe, etc. Et ils s’imaginent que tout autour, les pauvres ne se rendent compte de rien. A cela s’ajoutent les rapports comme celui de l’agence Bloomberg, qui décrit de manière détaillée la fortune accumulée par la famille Kabila. Même si l’on peut discuter des données, les mettre en cause, il n’empêche que tout cela circule sur les réseaux sociaux, alimente la colère générale. Comment accepter que la famille présidentielle soit créditée d’une fortune de 15 milliards de dollars, alors que le budget de l’Etat atteint péniblement les 4, 5 milliards ?


La chute des cours des matières premières contribue à aggraver les choses...


Cette misère sociale entraîne un rejet du système, alors qu’en même temps les espaces de liberté rétrécissent et que la répression s’accentue. Quel dommage… Au début de l’entrée en fonction du Premier ministre Matata Mponyo, on avait senti un frémissement, les recettes de l’Etat augmentaient, la croissance s’accélérait, la bancarisation (paiement par voie bancaire des salaires des fonctionnaires) avait des effets positifs. Mais aujourd’hui on s’aperçoit que les travaux d’infrastructures ont été mal réalisés que des routes sont déjà à refaire…


La classe politique, tous partis confondus, est-elle attentive à ce malaise social ?


Absolument pas. Les partis sont enfermés dans une stratégie purement politique. Depuis un an, il n’est question que de troisième mandat, de date des élections etc. On ne se positionne que par rapport à cela, bien loin au-dessus des préoccupations des gens… Si demain la médiation menée par la conférence épiscopale aboutit à une solution, il faudra élargir encore le gouvernement de 68 ministres qui a été présenté cette semaine, y inclure les nouveaux venus. Je ne crois pas que le président ne reviendra pas sur sa décision, ou qu’il remettra en cause ce gouvernement issu de l’accord politique d’octobre dernier ; tout au plus sera-t-il peut-être élargi, ce qui ne résoudra rien… Le problème, c’est qu’il n’y a plus de légitimité au Congo : tout le monde est hors mandat. Le président, évidemment, mais aussi le président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, qui légalement pourrait lui succéder en cas de vacance : il est hors mandat depuis cinq ans ! Le vide juridique est absolu, plus aucune autorité n’est légitime. Même si on se mettait d’accord pour organiser des élections en 2018, je ne suis même pas sûr que ce serait possible : le budget de la CENI est colossal, un milliard 800 millions de dollars… Où pourrait-on trouver cet argent ? En outre la remise à jour des listes électorales, dans un pays aussi vaste, aussi dépourvu de moyens de communications, représente une opération compliquée : dans certains coins il faut se déplacer en pirogue ou à pied… Tout cela va prendre du temps…


Peut-on craindre un putsch ?


Je ne sais pas : l’appareil sécuritaire semble sous contrôle, la garde républicaine est forte, dominée par des fidèles de Kabila… Mais les policiers partagent les mêmes conditions que le reste de la population : en ville, ils vous demandent de l’eau, vous disent qu‘ils souffrent eux aussi… Vont-ils accepter de tirer sur les jeunes, sur leurs enfants ?
lesoir.be

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