Lubala & Associés
Kinshasa, le 31 août 2022
Avocats
Mandataire en Mines et Carrières
Immeuble Equity BCDC, 12ème étage
Bld du 30 juin, Kinshasa-Gombe
République Démocratique du Congo
Mobile: + 243998626369
N° Réf. : CAB/L&A/BLM/31-08/2022
A Monsieur l’Editeur Directeur Général
du Journal la Prospérité
33 Avenue de la Paix, Mont Fleuri,
Commune de Ngaliema
A Kinshasa
Monsieur l’Editeur Directeur Général,
Concerne : Droit de réponse
Nous vous adressons la présente en notre qualité de conseil de la société Katanga Premier Sarl et de Monsieur Zoe Kabila qui nous chargent de vous transmettre ce droit de réponse en rapport avec l’interview de Monsieur Jules Kidinda, conseiller politique du Ministre de l’Urbanisme et Habitat Pius Muabilu Mbayu Mukala, parue dans votre journal La Prospérité n°5905 du lundi 29 août 2022 et intitulée « Controverse sur le déguerpissement de Zoé Kabila : Jules Kidinda : « Les biens de l’Etat sont inaliénables et imprescriptibles».
Nous vous faisons remarquer que cet article est truffé de confusions et d’hérésies juridiques en ce que Monsieur le conseiller politique allègue gratuitement que « les biens de l’Etat sont inaliénables et imprescriptibles, principe de droit en vertu duquel la cession de biens appartenant à des personnes publiques est impossible. Monsieur Jules Kidinda insiste sans vergogne qu’une personne privée ne peut s’approprier un bien de l’Etat du fait de son utilisation prolongée. De ce fait, il déclare qu’aucun acte de cession, ni certificat d’enregistrement ne peut justifier juridiquement le transfert de propriété d’une maison de l’Etat à un individu, si celle-ci n’a pas été au préalable désaffectée par le ministre de l’Urbanisme et Habitat » : Quelle confusion ? Quelle monstruosité ou hérésie juridique?
En ce qui concerne la confusion et monstruosité ou hérésie juridique entretenues sur la distinction entre les biens du domaine public de l’Etat et les biens du domaine privé de l’Etat :
Il importe de noter que le législateur congolais fait une nette distinction entre les biens du domaine public de l’Etat et ceux du domaine privé de l’Etat.
En effet, aux termes de l’article 10 de la loi dite foncière, « les biens de l’Etat qui sont affectés à un usage public sont hors commerce tant qu’ils ne sont pas régulièrement désaffectés ». L’article 11de la même loi dispose : « Tous les autres biens de l’Etat restent dans le commerce, sauf les exceptions établis par la loi ».
Quant au régime immobilier, la loi dite foncière, en son article 210, dispose : « Le domaine immobilier public de l’Etat est constitué de tous les immeubles qui sont affectés à un usage ou à un service publics. Ces immeubles ne sont ni cessibles ni susceptibles de location, tant qu’ils ne sont pas régulièrement désaffectés. Ils sont régis par les dispositions particulières aux biens affectés à un usage ou à un service publics ».
L’article 211 de la loi dite foncière dispose à son tour : « Tous les autres immeubles font partie du domaine privé de l’Etat. Ils sont régis par la présente loi ».
Monsieur le conseiller politique du Ministre de l’Urbanisme et Habitat devrait donc avoir l’humilité de comprendre que la distinction entre ses deux catégories d’immeubles de l’Etat est faite par la loi en fonction de leur affectation à un usage ou service publics.
Or, la parcelle en cause n’a jamais été affecté à un usage ni à un service public car elle n’a jamais fait partie du domaine immobilier public de l’Etat. Elle avait plutôt fait partie du domaine privé de l’Etat et l’avait quitté par acte de vente passé avec Monsieur Kundo en 1989 conformément à l’article 213 de la loi dite foncière qui dispose : « La cession est l’acte par lequel l’Etat transfère son droit de propriété sur les immeubles visés à l’article 211 ci-dessus à un tiers quel qu’il soit ».
La doctrine renseigne que « le domaine de l’Etat est subdivisé en domaine privé et public, deux types de domaines qui se distinguent à plus d’un titre. En effet, alors que le domaine public est destiné aux besoins ou aux usages directs du public, le domaine privé est administré privativement de manière à lui faire produire des revenus ; alors que le domaine public est du ressort du droit public et des lois administratives, le domaine privé est assujetti en principe aux règles du droit civil » Défi Augustin Fataki wa Luhindi, Les limites du principe d’inattaquabilité du certificat d’enregistrement en droit congolais, Ed.Academia-l’Harmattan, Lovain-la-neuve, 2020, p.120.
Le même auteur poursuit en soutenant qu’ « en outre, contrairement aux biens du domaine public, ceux du domaine privé restent dans le commerce et sont prescriptibles et aliénables au même titre que les biens des particuliers, auxquels ils sont assimilés » Défi Augustin Fataki wa Luhindi, Ibidem, p. 120.
L’expression « dans commerce » veut tout simplement dire que ses biens du domaine privé de l’Etat sont aliénables c’est-à-dire peuvent être vendus, saisissables et sont prescriptibles. Ainsi, les biens du domaine public de l’Etat sont régis par le droit public alors que les biens du domaine privé sont régis par le droit privé et gérés par le ministère de l’Urbanisme et Habitat s’agissant des biens immeubles conformément à article 1 point B 10 de l’ordonnance n022/003 du 7 janvier 2022 fixant les attributions des ministères.
En revanche, les biens immobiliers du domaine public (imprescriptibles, inaliénables, insaisissables et hors commerce) de l’Etat sont gérés par le Ministre des Infrastructures et Travaux Publics conformément à l’article 1 point B, 6 de l’Ordonnance n022/003 du 7 janvier 2022 fixant les attributions des ministères.
Il est absurde que Monsieur le conseiller politique ait de la peine à circonscrire le champ de compétence de son ministère qui ne s’occupe pas des biens immobiliers du domaine public de l’Etat.
Il demeure que les dispositions susvisées concernant les biens du domaine privé de l’Etat n’imposent nullement une procédure de désaffectation soutenue à tort par le conseiller politique du Ministre de l’Urbanisme et Habitat.
C’est donc par erreur que l’arrêté ministériel n° 056/CAB-UH/2018 du 12 décembre 2018 du Ministre en charge de l’Urbanisme et Habitat avait inventorié l’immeuble faisant l’objet du litige parmi les biens appartenant au domaine privé de l’Etat alors que ce bien avait déjà quitté le domaine privé de l’Etat en bonne et due forme suite à la signature d’un acte de vente notarié du 26 mai 1989 conclu entre l’Etat congolais (jadis la République du Zaïre représentée par le commissaire d’Etat au Portefeuille) et Monsieur KUNDO KWANGELE MAKUTU.
Il importe néanmoins de souligner que l’arrêté ministériel n00023/CAB/MIN-ATUH/2015 du 30/12/2015 portant retrait d’une maison de l’inventaire dressé par l’arrêté n° CAB/MIN.ATUHITPR/020/2013 du 23 septembre 2013 portant identification des villas et immeubles du domaine public de l’Etat dans la ville province de Kinshasa avait retiré la parcelle en cause des biens du domaine privé de l’Etat.
En ce qui concerne les affirmations gratuites du conseiller politique susvisé selon lesquelles Monsieur Zoé Kabila serait un spoliateur.
Comme nous l’avons dit dans notre point de presse du 25 août 2022, cet immeuble a fait l’objet d’un acte de vente notarié du 26 mai 1989 conclu entre l’Etat congolais (jadis la République du Zaïre représentée par le commissaire d’Etat au Portefeuille) et Monsieur KUNDO KWANGELE MAKUTU, ce dernier alors auditeur général des FAZ, haut magistrat de carrière et juriste chevronné, est devenu concessionnaire perpétuel de la parcelle en cause et a obtenu, tour à tour, le contrat de concession perpétuelle n° 18235 du 02 mars 2004 et le certificat d’enregistrement Vol. AL 383 Folio 143 du 03 mars 2004 établi en son nom.
Cette même année, 2004, le général KUNDO KWANGELE MAKUTU décide de vendre l’immeuble à Monsieur IPOTE Joachim. Ce dernier est devenu concessionnaire perpétuel et a obtenu le certificat d’enregistrement Vol.AL 383 Folio 144 établi en son nom en date du 03 mars 2004.
C’est seulement en date du 14 décembre 2007 qu’un acte de vente a été conclu entre Monsieur IPOTE Joachim et la société COSHA INVESTMENT. Cette dernière cédera à son tour cet immeuble à la société KATANGA PREMIER SARL devenue concessionnaire ordinaire de la parcelle susvisée en vertu du certificat d’enregistrement Vol.AGL 557 Folio 197 du 02 juin 2021 établi en son nom en bonne et due forme.
L’historique de cette parcelle fait clairement voir que Monsieur Zoé n’a jamais spolié un bien de l’Etat Congolais.
De tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que Monsieur le conseiller politique du Ministre de L’Urbanisme et Habitat entretient une confusion inquiétante sur les questions liées à la gestion des biens du domaine privé de l’Etat et se lance dans des affirmations gratuites et dénuées de tout fondement dans le seul but de distraire l’opinion publique, tant nationale qu’internationale, qui continue à se poser la question de savoir comment un Ministre de l’Urbanisme et Habitat peut s’arroger le droit de saisir l’auditorat militaire supérieur de Kinshasa / Gombe pour obtenir une réquisition de force militaire du Bataillon Police Militaire (PM) en vue d’aller déguerpir, en date du 23 août 2022 la nuit à des heures indues, une personne morale de droit congolais détentrice d’un certificat d’enregistrement et en l’absence de toute décision judiciaire.
C’est dire donc que cette procédure de déguerpissement telle que suivie par le Ministre de l’Urbanisme et Habitat n’est pas prévue par le droit congolais et est manifestement illégale.
Par son œuvre, le Ministre de l’Urbanisme et Habitat a incité les militaires à commettre des actes contraires à la loi et à la discipline militaire et a violé l’article 34 de la constitution qui dispose que « la propriété privée est sacrée. L’Etat garantit le droit à la propriété individuelle ou collective acquis conformément à la loi ou à la coutume. Il encourage et veille à la sécurité des investissements privés, nationaux et étrangers. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par la loi. Nul ne peut être saisi en ses biens qu’en vertu d’une décision prise par une autorité judiciaire compétente ».
Nous vous prions de publier ce droit de réponse conformément à la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse en République Démocratique du Congo.
Veuillez agréer, Monsieur l’Editeur Responsable, l’expression de notre considération distinguée.
Pour Katanga Premier Sarl et Monsieur Zoé Kabila
Maître Benjamin Lukamba Muganza
Avocat