Les divisions gagnent la classe politique

Finie la détente observée dans la classe politique au sortir des concertations nationales. Finis aussi les hommages nationaux, toutes tendances politiques confondues, qui ont suivi la victoire militaire des Forces armées de la RDC sur les ex-rebelles du M23. L’élan de la cohésion nationale vient d’être brisé par l’Opposition et la majorité en procédant à une lecture sélective des engagements de Nairobi.

Après une trêve de courte durée, les dissensions ont repris de plus belle dans la classe politique. L’escalade verbale a repris son droit de cité entre l’Opposition et la Majorité. Les tirs croisés sont tels que l’élan de la cohésion nationale né des concertations nationales est en voie de connaître un arrêt brutal. La hache de guerre vient d’être déterrée.
En cause, les dissensions apparues avec la signature à Nairobi le 12 décembre 2013 des engagements bouclant les pourparlers engagés depuis décembre 2012 à Kampala entre Kinshasa et les ex-rebelles du M23.

Les tirs croisés

L’Opposition est sortie de sa torpeur pour dénoncer, dans une déclaration rendue publique le 17 décembre par la Coalition pour le vrai dialogue (CVD), les engagements qui « déshonorent », selon elle, la République démocratique du Congo. L’Opposition crie à l’imposture. Elle relève qu’une fois de plus, Kinshasa s’est fait rouler comme, a-t-elle rappelé, dans bien d’autres accords signés antérieurement.

« Avec la signature de ces engagements, relève la CVR, le gouvernement congolais a, pour des raisons inavouées, permis au M23 et ses parrains rwandais et ougandais de revenir en force ». « C’est dire, poursuit-elle, que ce que le M23 et ceux qui le soutiennent recherchaient armes à la main par la guerre, ils l’ont obtenu et vont le récupérer progressivement et malicieusement par la grâce de ces engagements pris par la RDC à Nairobi ». Selon la CVR, « à ce jour et grâce à la signature de ces engagements par le gouvernement congolais, le M23 et ses mentors rwando-ougandais sont les plus grands gagnants ».

La réplique de la Majorité au pouvoir (MP) ne s’est pas fait attendre. Sur un ton sévère, la MP a ouvertement fustigé l'irresponsabilité, le manque de sérieux et de patriotisme dont a fait preuve l’Opposition. Dans une déclaration rendue publique jeudi dernier, le porte-parole de la MP a, au contraire, salué la signature de la Déclaration de Nairobi. Sébastien Luzanga a rassuré que la Déclaration de Nairobi consacrait plutôt la victoire tant militaire, politique que diplomatique du gouvernement sur cet ancien groupe M23.

Il a balayé d’un revers le pessimisme affiché par la CVD. « En effet, chacun des articles de la Déclaration du 12 décembre vise à consolider une paix chèrement acquise au prix du sang et à sceller une véritable réconciliation, en respectant les engagements pris dans le cadre de l'accord-cadre d'Addis-Abeba du 25 février 2013 et les recommandations de la Résolution 2098 du Conseil de sécurité des Nations unies », a soutenu Luzanga.

Le gouvernement a abondé dans le même sens, par la bouche de son porte-parole Lambert Mende. « Le gouvernement n’a pas déshonoré la République. Bien au contraire, le M23 a été mis à sa place », a déclaré le ministre des Médias, Relations avec le Parlement et Initiation à la nouvelle citoyenneté, tout en qualifiant« d’irrationnelles et d’insensées » les critiques de l’Opposition.

Mauvais présage

Le paysage politique congolais est en ébullition. Alors que la cohésion nationale ne faisait plus l’ombre d’aucun doute – du reste consolidée par la victoire militaire des FARDC sur le M23 – les engagements contenus dans la déclaration de Nairobi ont remis en cause tous les acquis des concertations nationales. Dans la mesure où cette déclaration n’a pas reçu le même enthousiasme de part et d’autre.

Boniface Musavuli, analyste sur le site AgoraVox, est plutôt inquiétant sur les chances de la RDC de sortir indemne du cycle lancé depuis Nairobi. « C’est un avenir plutôt incertain dont le Congo hérite, paradoxalement, après la signature des engagements de Nairobi avec le M23. L’inquiétude vient s’ajouter à l’incertitude lorsqu’on apprend, d’une fuite du dernier rapport des experts de l’ONU, que le M23 se reconstitue et a même entrepris de recruter à nouveau au Rwanda et en Ouganda ».

Dans ces conditions, la formation d’un gouvernement de cohésion nationale, où sont censés se retrouver la Majorité, l’Opposition et la Société civile, s’avère un exercice extrêmement difficile. Les fissures qui se sont révélées marqueront sans doute la configuration de ce gouvernement.

Ainsi, au lieu de maintenir la flamme de la cohésion nationale qui est apparue avec les concertations nationales, Nairobi a élargi davantage le fossé de la division, ravivant les tensions, encore en veilleuse, dans la classe politique.
LIENS COMMERCIAUX

[VIDEOS][carouselslide][animated][20]

[Musique][vertical][animated][30]

 
Top