Il l’a dit et répété, hier, aux patrons des organes de presse, réunis pour la circonstance, au Palais de la Nation. Deux hypothèses pourraient ainsi en résulter, selon lui. Primo. Si l’on dit ‘’Oui’’ au Dialogue, il faudra bien le convoquer en bonne et due forme. Ce qui suppose qu’il pourra fixer, une fois pour toutes, les esprits sur la problématique du format, du timing et du nombre de participants et, même, des objectifs poursuivis. Secundo. Si l’on dit ‘’Non’’ au Dialogue, il sera question, dans ce cas-là, de privilégier d’aller aux élections, tout en n’oubliant pas, cependant, toutes les mièvreries et altercations y afférentes. Kabila pense, par contre, que cette deuxième voie n’est pas celle de la sagesse. Comme qui dirait que la meilleure voie, c’est celle qui consiste à mettre les congolais autour d’une table, pour débattre, en toute liberté, des questions liées à l’organisation des élections notamment, l’affaire du calendrier électoral, de la sécurité du processus électoral, du financement des élections évalué – un milliard deux cents millions de dollars américains -, de l’enrôlement des jeunes majeurs, et de l’accompagnement de la communauté internationale au processus électoral. Faudra-t-il un facilitateur ou un médiateur ? Là-dessus, c’est encore une équation.
Appel patriotique
Le sursaut à faire, pour défendre la cause de la patrie, nécessite une mutation. ‘’Sortir du Zaïre’’, pour entrer dans l’ère de la RD. Congo. C’est un problème de culture, soutient Joseph Kabila. Car, si tel n’est pas le cas, l’image du pays sera continuellement tirée au bas par n’importe qui, y compris certains ‘’partenaires’’ membres de la communauté internationale. Or, sur des sujets relevant de la souveraineté du pays, rien n’est moins sûr que seuls les congolais, eux-mêmes, peuvent mieux défendre les intérêts vitaux de leur propre pays. Tout le reste, c’est-à-dire, la plupart des partenaires, leur rôle, c’est l’accompagnement. Et, à ce titre, ils n’ont nullement le droit d’ingérence dans les affaires relevant de la politique purement interne de la RD. Congo. D’où, la nécessité, pour les filles et fils de ce pays, de poser des actes responsables.
Qui a demandé le Dialogue ?
La première fois, en 2013, lorsque le Président de la République avait initié des consultations, la presse nationale fut associée. Objectifs ? Eviter beaucoup de rumeurs. Eviter l’intoxication. Eviter les on-dits. A l’époque, c’était la mobilisation générale, pour barrer la route aux fossoyeurs de la paix dans l’Est du pays. Goma venait de tomber entre les mains des ennemis. Aujourd’hui encore, il revient à la charge, avec les consultations en vue d’un Dialogue. Qu’est-ce qui a changé ? Eh bien, Kabila dit que les mêmes objectifs demeurent. Seulement qu’au-delà de la question de l’Est où l’on doit rester vigilant vis-à-vis des groupes armés, les élections arrivent. Et, avec elles, leur lot de problèmes. Pourquoi alors les consultations ? Est-ce un rêve ou une vision de Kabila ? Ou parce qu’un bon matin, il n’avait rien à faire, c’est pourquoi, il organise les consultations ? Non. Halte ! Les boursicoteurs ne doivent pas continuer à se perdre en conjectures. Les choses sont, pourtant, si simples. A l’en croire, en 2012, lorsqu’il avait levé l’option de consulter la Majorité, l’Opposition et la Société civile, le pays ployait sous l’agression alors qu’il annonçait, lui, les concertations nationales. Certains compatriotes n’y avaient pas cru. Certains Députés avaient même quitté l’hémicycle, pour joindre Bunagana et se retrouver, plus tard, à Kampala. Lorsque revint la paix, avec la neutralisation du M23, c’est à ce moment-là que les concertations nationales se tinrent, en 2013. Au début de cette année 2015, après d’âpres tractations, le gouvernement de cohésion nationale arriva, pour appliquer les résolutions de ces concertations nationales. Pendant ce temps, quelques partis de l’Opposition dont l’Udps, l’Unc et autres, réclamèrent le Dialogue. L’église catholique aussi, sans oublier, par-dessus tout, la communauté internationale, qui en firent l’objet de leurs revendications irréductibles. Joseph Kabila affirmé, la main sur le cœur, avoir concédé à une pression de tous ceux qui l’accusent, à tort, de n’écouter personne ou de tout faire, seul. Il parle, à sa manière, d’un discours rhétorique sur cette affaire du dialogue dont certains partis politiques formèrent, du reste, des cartels ou plateformes, rien que pour obtenir un vrai dialogue. C’est dans ce contexte-là qu’il déploya, depuis un certain temps, son légat, un fonctionnaire de l’Etat, un homme de service, pour en savoir un peu plus.
Volte-face
Curieusement, susurre-t-il, le dialogue arrive, ceux-là qui le demandaient, à cor et à cri, n’en veulent plus. Les gens disent ‘’oui’’ au dialogue, le matin. Et, le soir, ils disent ‘’non’’. Comment expliquer cette volte-face ? Finalement, le dialogue est-ce une demande réelle ou une blague ? Kabila tranche, sans ambages. Il s’agissait bien d’une demande de longue date. Pourtant, certains d’entre eux, ont dit à son émissaire que le dialogue était une bonne chose. Et que cela s’inscrivait bien dans la droite ligne de leurs nombreux appels au Chef de l’Etat. D’autres, par contre, disaient même que le dialogue procédait bien de leur propre ‘’initiative’’. Et, après, tout a changé. Ils s’opposent maintenant au dialogue. Où en est-on ? Où allons-nous ? S’interroge Kabila, tout en se disant surpris. C’est ça la classe politique congolaise ? (Rires). Eh bien, enchaîne-t-il, le Congo mérite mieux une classe politique responsable. Comment est-ce qu’on va construire ce pays avec une telle attitude ? Sur base de quel principe ? ‘’Moi, je vais poursuivre mon chemin jusqu’au bout. Il y a des conditions, des conditionnalités… L’idée n’est pas de me voir. On peut se voir, même dans un nganda. Mais, l’essentiel est de savoir, de quoi est-ce qu’on va parler, finalement ?, relève-t-il, en guise d’interpellation de la classe politique. Tel est, à ses yeux, tout l’intérêt de ces consultations, avant la tenue du dialogue qui sera convoqué incessamment.
La Presse favorable au dialogue
Auparavant, Kasonga Tshilunde, le Président de l’Union Nationale de la Presse du Congo, l’UNPC, a circonscrit, en quelques minutes, les grandes lignes des propositions de la presse à ce débat sur le dialogue. Un mémorandum fiévreusement ficelé a été transmis, dans une farde à tringle, au Chef de l’Etat. L’économie de cette contribution était que la presse est favorable au dialogue. Elle veut qu’un compromis politique soit trouvé sur un calendrier réaliste, pour des élections apaisées. Elle sollicite des moyens pour mieux accompagner le processus électoral. Et, enfin, la presse sollicite un moratoire sur les arrestations des journalistes, en cette période charnière de l’histoire politique de la RD. Congo. Dans le même registre, la presse a demandé à Kabila d’ordonner la relaxation des journalistes embastillés et la réouverture des médias fermés.
Marcel Ngoyi