La province congolaise du Katanga a été démembrée jeudi par un vote de ses députés, et son gouverneur sortant, Moïse Katumbi, à qui certains prêtent des ambitions présidentielles, a défendu son bilan tout en estimant que "dans la vie, il faut savoir partir".
Réunis à Lubumbashi, dans le sud-est de la République démocratique du Congo, les députés de l'assemblé provinciale du Katanga ont approuvé à la mi-journée le rapport de la commission chargée d'organiser le démembrement de ce territoire grand comme l'Espagne en quatre nouvelles provinces dans le cadre d'une réforme administrative prévue de longue date.
Chargé d'expédier les affaires courantes jusqu'à l'installation de ces nouvelles entités dans les prochaines semaines, M. Katumbi, à la tête du Katanga depuis 2007, a déclaré à la presse à l'issue du vote qu'il s'apprêtait à abandonner ses fonctions avec "fierté".
"Dans la vie, il faut savoir partir. [...] Je pars avec fierté pour respecter la Constitution qui est pour moi sacrée", a-t-il dit, alors que l'opposition et une partie de la majorité soupçonnent le président Joseph Kabila de chercher à contourner l'obligation constitutionnelle qui lui est faite d'abandonner le pouvoir à l'issue de son mandat, fin 2016.
M. Katumbi, qui avait dit publiquement son opposition à la réforme devant faire passer la RDC d'une organisation administrative de 11 à 26 provinces, a estimé qu'il laissait "le Katanga dans un état magnifique", en mettant en avant le fait que celui-ci était le "premier [contributeur au] budget de l'État congolais".
Homme d'affaires passé à la politique, M. Katumbi est crédité d'avoir joué un rôle majeur dans la renaissance de l'industrie minière katangaise, qui était exsangue à l'issue de la deuxième guerre du Congo (1998-2003).
Grâce à ses fabuleux gisements du Katanga, la RDC est aujourd'hui le premier producteur mondial de cobalt et dispute à la Zambie voisine la place de premier producteur africain de cuivre.
Charismatique, populaire et richissime, M. Katumbi est membre du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) de M. Kabila, qui entretient le flou sur son avenir politique, refusant de céder à la pression d'une opposition lui demandant d'annoncer publiquement qu'il se retirera des affaires publiques fin 2016.
Propriétaire de la célèbre équipe de football TP Mazembe de Lubumbashi (la deuxième ville du pays), le gouverneur du Katanga passe pour un possible successeur au chef de l’État, au pouvoir depuis 2001.
Il s'est gardé d'afficher publiquement ses éventuelles ambitions mais avait semblé mettre en garde publiquement à mots couverts M. Kabila en décembre contre la tentation de s'accrocher à son poste, ce qui avait déplu en haut lieu.
Le climat politique est très tendu en RDC à l'approche d'une série d'élections devant culminer avec la présidentielle et les législatives de novembre 2016.
M. Katumbi, a imposé un salaire minimum dans sa province et a contraint les entreprises minières à transformer sur place les minerais extraits du sol katangais afin d'y créer de la valeur ajoutée plutôt que d'exporter des matières premières brutes.
Plus agricole que minier, la moitié nord du Katanga reste néanmoins parmi les zones les plus déshéritées d'un des pays les moins développés au monde.
M. Katumbi aime à répéter qu'il aurait pu faire "plus" pour sa province si le Katanga avait pu récupérer de l’État central 40% des recettes fiscales qu'il dégage, comme le stipule la Constitution.
Inscrite dans la Constitution de 2006, la mise en place des nouvelles provinces été relancée fin février par une loi prévoyant le maintien de cinq provinces existantes et le découpage des six autres en 21 nouvelles entités.
Selon le ministère de l'Intérieur, ces nouvelles provinces doivent être installées entre le 27 juillet et le 13 août.