*C’est la réponse du berger à la bergère. Il n’aura pas fallu beaucoup de temps pour que l’Ambassadeur Barnabé Kikaya bin Karubi analyse et réserve une réponse, par médias interposés, aux membres du G7 qui ont écrit, lundi 14 septembre, au Président Kabila, pour solliciter le respect absolu de la Constitution. Pour Kikaya, le G7 n’attendait vraiment pas du Président, une réponse dans un sens comme dans un autre. Il estime qu’il s’agit de la ‘‘politique spectacle et de l’intox’’. L’Ambassadeur Kikaya qui, visiblement, prend la défense de Joseph Kabila, découvre beaucoup de similitudes entre l’argumentation du G7 et celle de la Dynamique de l’Opposition. Il en tire la conclusion selon laquelle, les auteurs de la lettre ont franchi la barrière et ont rejoint les opposants. Autrement dit, le G7 ne doit pas continuer à garder les postes du deal, après que ses membres aient fait le constat de rupture du contrat de confiance. S’ils ne le font pas, ils discréditent leur initiative. Lisez, ici, Kikaya bin Karubi, dans une réplique dosée et adaptée à la situation du moment au sein de la Majorité. Il a signé de sa propre main, cette analyse dont il assume pleinement, le contenu et l’ensemble de sa titraille.

Politique spectacle ou intox ?

Le G.7 se dévoile !

(Une Analyse de l’ambassadeur Barnabé Kikaya bin Karubi)

*Rédigée et publiée le 14 septembre, la lettre ouverte adressée "A Son Excellence Monsieur Joseph Kabila Kabange, Président de la République Démocratique du Congo, Autorité Morale de la Majorité présidentielle" par MM. Charles Mwando Nsimba de l'Unadef, Gabriel Kyungu wa Kumwanza de l'Unafec, Olivier Kamitatu de l'Arc, Christophe Lutundula du Msdd, José Endundo du Pdc, Dany Banza Maloba de l'Aco et Yves Mobando du Msr défraie la chronique politique. Normal : l'opinion est attirée par toute crise survenant dans la famille politique à laquelle appartient le Chef de l'Etat. Tout cependant est question de savoir si, en initiant cette lettre, les auteurs avaient réellement l'intention de convaincre le Président de la République et Autorité morale de leur famille politique du bien-fondé de leur démarche. Ils savent qu'en raison de sa fonction et des prérogatives que lui confère la Constitution, le Chef de l'Etat ne peut pas user de la même voie pour répondre. Ainsi, ils n'ont pas voulu du Président de la République une réponse à leur lettre, ni dans le sens d'approbation, ni dans celui de désapprobation de leur initiative. S’agit-il donc de la politique spectacle ou/et de l’intox…

En effet, du point de vue de la nécessité, toute lettre voulue ouverte se justifie par un événement important donné. D'où l'impératif, pour les auteurs, d'en indiquer l'objet.

Or, les acteurs politiques dits du Groupe 7 (G7) - hommes d'Etat pourtant avérés - n'ont nullement pris soin de le faire dans leur correspondance alors que la première quinzaine du mois de septembre 2015 en aligne une demi-dizaine au nombre desquels :

- le séjour du Président Joseph Kabila Kabange en Chine du 2 au 6 septembre 2015,

- l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 septembre 2015,

- le communiqué final d'Etienne Tshisekedi du 13 septembre 2015 mettant fin aux pré-négociations en vue du dialogue,

- le meeting de l'Opposition prévu le 15 septembre 2015 et

- la rentrée parlementaire prévue la même date.

En s'abstenant de motiver leur lettre ouverte, les signataires semblent avoir écrit pour écrire. C'est si évident qu'ils n'ont même pas eu le temps d'établir la nette distinction entre la personne du Président de la République et celle de l'Autorité morale de la Mp, deux entités tout à fait différentes. A moins de développer encore le concept du Parti-Etat faisant du Président de la République le chef du Mpr Parti-Etat.

A preuve : alors que le destinataire est doublement désigné "Président de la République" et "Autorité morale de la Majorité Présidentielle", les auteurs ne reprennent en introduction de chaque chapitre que la qualité de "Président de la République". Ce qui incite à se demander pourquoi, dans ce cas, avoir réservé une copie aux membres du Bureau de la MP non concernés !

Par cette ampliation, on peut soupçonner que l'objectif visé n'ait été que la forte médiatisation de l'initiative. Si tel est le cas, alors l'objectif est atteint. C'est malsain. Ceci au plan de la forme.

DES COMPARAISONS

Au plan du fond, la lettre ouverte épouse curieusement et quasiment toutes les thématiques par lesquelles l'Opposition établit l'échec du bilan de la Majorité par rapport, entre autres, au processus électoral, aux droits de l'homme et même aux questions socioéconomiques. Prenons ces quelques exemples probants.

A propos du processus électoral, voici ce que dit l'Opposition dans sa déclaration du 5 août 2015 reprenant l'exposé des motifs de la Constitution du 18 février 2006 : " Depuis son indépendance, le 30 juin 1960, la République Démocratique du Congo est confrontée à des crises politiques récurrentes dont l’une des causes fondamentales est la contestation de la légitimité des institutions et de leurs animateurs. Cette contestation a pris un relief particulier avec les guerres qui ont déchiré le pays de 1996 à 2003. En vue de mettre fin à cette crise chronique de légitimité et de donner au pays toutes les chances de se reconstruire, les délégués de la classe politique et de la Société civile, forces vives de la Nation, réunis en Dialogue inter-congolais, ont convenu, dans l’Accord Global et Inclusif signé à Pretoria en Afrique du Sud le 17 décembre 2002, de mettre en place un nouvel ordre politique, fondé sur une nouvelle Constitution démocratique sur base de laquelle le peuple congolais puisse choisir souverainement ses dirigeants, aux termes des élections libres, pluralistes, démocratiques, transparentes et crédibles’’.

Et, voici ce que dit le G 7 de la Majorité dans sa lettre ouverte du 14 septembre 2015 : " C’est ici l’occasion pour nous, Monsieur le Président de la République, de rappeler et de réaffirmer que le partenariat que nous avons engagé, il y a dix ans, repose sur les valeurs républicaines et démocratiques inscrites dans la Constitution du 18 février 2006". Et de rappeler au point 12 : " Dans ce contexte, vouloir revenir sur le consensus et le compromis historique laborieusement obtenus par les forces vives de la nation congolaise à Sun City et l’ordre institutionnel inscrit dans la Constitution ne fera qu’exacerber la méfiance à l’égard des dirigeants et générer l’instabilité et l’insécurité".

Autre exemple : dans sa déclaration du 5 août 2015, l'Opposition écrit : " Et, la sombre vérité mise à nu est que Monsieur Kabila veut demeurer au pouvoir au-delà de novembre 2016 en violation de la Constitution de la République. C’est ainsi qu’il multiplie des initiatives téméraires en s’appuyant sur le Gouvernement, la CENI et le Parlement, institutions qu’il a toutes instrumentalisées et inféodées".

Et, voici ce que le G 7 de la Majorité présidentielle note dans sa lettre ouverte du 14 septembre 2015, évoquant ces deux précédentes lettres ouvertes : "A titre de rappel, nous vous avons exprimé dans ces correspondances, nos vives inquiétudes quant (i) aux velléités de révision ou de changement de Constitution, (ii) aux tentatives de réécriture de la loi électorale, (iii) au démembrement précipité des provinces, (iv) à l’organisation très controversée des élections locales et municipales...".

On peut multiplier à l'envi des comparaisons qu'on ne serait pas surpris d'apprendre que les rédacteurs des déclarations du G 7 et de l'Opposition s'inspirent à la même source !

Bien plus - l'autre dirait plutôt pire - le G 7 va au-delà de l'interprétation de ce que se fait l'Opposition des événements tragiques survenant au Nord-Kivu, précisément dans l'axe Beni-Butembo. Au point 11, il établit un lien de cause à effet entre, d'un côté, ce qu'il considère comme "l'affaiblissement de la cohésion nationale" et "le ralentissement du processus de démocratisation" et, d'autre part, "la résurgence des tensions interethniques" et "la recrudescence des crimes organisés", citant les " tueries cycliques dans la région de Béni au Nord-Kivu". En d'autres mots, le G 7 ne reconnaît pas l'implication des rébellions ougandaises Adf-Nalu dans la tragédie que vivent les compatriotes de cette partie de la République. Il remet, de ce fait, en cause les efforts des Fardc pour la sécurisation des populations locales.

ILS REJOIGNENT L'AUTRE ARBRE

Ce qui est donc à retenir, c'est que Charles Mwando Nsimba de l'Unadef, Gabriel Kyungu wa Kumwanza de l'Unafec, Olivier Kamitatu de l'Arc, Christophe Lutundula du Msdd, José Endundo du Pdc, Dany Banza Maloba de l'Aco et Yves Mobando du Msr - pourtant membres de la Majorité au Pouvoir - reprennent à leur compte, les arguments développés par l'Opposition pour appeler la population à contribuer à sa victoire aux élections, entendez la défaite de la famille politique à laquelle ils appartiennent, eux-mêmes, le Chef de l'Etat en tête !

Ils ne scient pas la branche d'arbre sur laquelle ils sont assis. Ils rejoignent l'arbre de l'Opposition dans l'espoir d'être adoptés et récompensés, le moment venu.

Comment, du reste, ne pas y croire lorsque, au cours de ces 10 dernières années, on ne trouve aucune tribune, aucune lettre ouverte de l'un ou l'autre des acteurs dits du Groupe 7 soutenant les acquis politiques, diplomatiques, électoraux, économiques etc. mis au crédit du Président Joseph Kabila, c'est-à-dire de leur propre politique !

C'est bon, très bon même de rappeler au Chef de l'Etat que le partenariat engagé voici une dizaine d'années " repose sur les valeurs républicaines et démocratiques inscrites dans la Constitution du 18 février 2006", que " la rencontre des aspirations légitimes du peuple congolais est demeurée une constante préoccupation" et qu'"... en dépit des échecs et des erreurs inhérents à toute entreprise humaine, il y a lieu de reconnaître que, sous votre leadership, la transformation structurelle de la société congolaise et de l’économie du pays a été bel et bien lancée".

Mais qui, du G 7, peut lever le petit doigt pour révéler à l'opinion une seule initiative médiatique prise dans le sens de prouver le soutien à la transformation structurelle de la société congolaise sous le leadership du Président Joseph Kabila ?

NON PAR LES FAITS ET GESTES DE SON ENTOURAGE

Ce qui est grave, voire gravissime, c'est que le G 7 a pleinement conscience du fait que le Raïs, dans chacun de ses discours sur l'état de la Nation, renouvelle continuellement l'engagement de respecter la Constitution.

Dans celui du 28 octobre 2013, par exemple, il dit clairement ceci : "La gouvernance politique et institutionnelle a, elle aussi, fait l’objet des travaux des Concertations nationales. Comme les Délégués à ces assises, Je suis pour le respect, par tous, de l’esprit et de la lettre de la Constitution de la République dans son ensemble, telle qu’adoptée par référendum populaire en 2005". Tandis que dans celui du 15 décembre 2014, il réaffirme sa volonté en déclarant, citation : "Confirmant notre attachement à l’Etat de droit et au respect de la Constitution, le Gouvernement a, au cours des douze derniers mois, poursuivi l’approfondissement de la décentralisation, option irréversible". Fin de citation.

Censé connaître et interpréter tous les discours sur l'état de la Nation (les seuls d'ailleurs à faire l'objet d'un article de la Constitution) - le G. 7 ne doit s'adresser au Président de la République que par rapport aux actes d'Etat qu'il pose, et non par les faits et gestes de son entourage.

STRATAGEME DE CONSOMMATION POPULAIRE

La conclusion à tirer est qu'au départ, la motivation de la 3ème lettre ouverte n'étant nullement fondée puisque non signalée dans l'objet, les auteurs ont tenu seulement à faire parler d'eux.

En choisissant cette voie alors qu'ils ont toutes les possibilités d'entrer en contact avec le destinataire dont ils connaissent, au demeurant, les adresses physiques des bureaux au Palais de la Nation et au Palais du Peuple ainsi que de la résidence à Gombe, en plus des numéros de téléphone et des e-mails, ils n'ont nullement agi dans le sens de se faire entendre et comprendre du Chef de l'Etat, encore moins d'espérer de lui une réponse dans le sens de l'approbation ou de la désapprobation.

Ils savent, au demeurant, que la meilleure façon de susciter la méfiance sinon l'indifférence dans le chef du destinataire est justement celle de rendre publique une démarche. Surtout quand la démarche semble pilotée par le Msr qui est avant tout une création du Raïs.

En définitive, les membres du G 7 ont usé et abusé du stratagème de la communication populaire pour consommation tout aussi populaire.

L'ennui est qu'ils ont cru rééditer l'exploit des "13 Parlementaires" dans leur lettre du 1er novembre 1980 adressée au maréchal Mobutu. Pourtant, les 13 avaient fait et laisser parler des chiffres. Ce qui n'est malheureusement pas le cas pour les acteurs du G 7.

La question de fond à se poser est dès lors de savoir pourquoi, après avoir fait constater par l'opinion publique la rupture du contrat de confiance conclu voici une dizaine d'années, continuent-ils de garder les postes du deal !

Dès la première lettre de constat de cette rupture, ils auraient dû tirer la seule conséquence logique et franchir le Rubicon.

En ne le faisant pas, ils discréditent et décrédibilisent eux-mêmes leur initiative.

Barnabé KIKAYA bin KARUBI

Ambassadeur


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