Signé le 18 octobre dernier, l’accord politique entre la majorité et une partie de l’opposition devrait déboucher sur la nomination d’un nouveau gouvernement avant le 8 novembre. Mais face au rejet du reste de l’opposition et au scepticisme de la communauté internationale, la nécessité d’un nouveau techniques » ou « financiers »).
dialogue plus inclusif refait surface.L’accord politique devant mettre fin à la crise pré-électorale en République démocratique du Congo (RDC), à moins de deux mois de la fin du mandat du président Joseph Kabila, fait encore couler beaucoup d’encre à Kinshasa. En cause, la légitimité toute relative de l’accord, qui s’est conclu sans le Rassemblement de l’opposition d’Etienne Tshisekedi et Moïse Katumbi, qui boycottaient le forum, mais surtout dans un certain flou sur le calendrier électoral et l’avenir du président congolais. La date négociée pendant le dialogue national pour organiser un nouveau scrutin a été fixée fin avril 2018… un report jugé beaucoup trop long alors que la présidentielle était initialement prévue pour fin novembre 2016. Mais le point de blocage majeur reste le sort de Joseph Kabila après le 19 décembre, date officielle de la fin de son second et dernier mandat. La majorité et l’opposition représentée au dialogue ont convenu de maintenir au pouvoir l’actuel chef de l’Etat jusqu’à l’organisation du prochain scrutin : soit une rallonge d’un peu plus de 18 mois (et bien davantage en cas de nouveaux retards «

Second round

Alors que la majorité de l’opposition, Tshisekedi et Katumbi en tête, ont rejeté l’accord, qui ne fait que prolonger Joseph Kabila au pouvoir, l’option d’un nouveau dialogue continue d’agiter le débat politique à Kinshasa, mais aussi en Europe. Le dernier pavé dans la mare a été jeté ce dimanche par Didier Reynders, le ministre belge des Affaires étrangères. Et la sentence est abrupte : « Ce dialogue qui n’a réuni qu’une partie de l’Opposition ne sert à rien. Il faut un nouveau dialogue qui doit réunir l’ensemble de l’Opposition congolaise, c’est à dire un dialogue auquel Etienne Tshisekedi et l’ancien gouverneur de Katanga (Moïse Katumbi, ndlr) doivent prendre part. » Pour le ministre belge, ce second round « entre Congolais » ne pourrait se régler qu’avec une pression de l’Union Africaine (UA) et de la communauté internationale.

Un « régime spécial » sans Kabila

Le Rassemblement de l’opposition est sur la même longueur d’onde que Reynders. Rien d’étonnant, notent certains observateurs, qui accusent par ailleurs le ministre belge d’avoir téléguidé la réunion de Genval en juin 2016 qui a donné naissance à la nouvelle plateforme pilotée par l’opposant historique Etienne Tshisekedi. Le Rassemblement plaide pour un « vrai dialogue » sous l’égide de la communauté internationale et sans le médiateur africain Edem Kodjo jugé trop proche du camp présidentiel. Après la libération des prisonniers politiques et l’arrêt des poursuites judiciaires contre les opposants, le Rassemblement souhaite mettre en place un « régime spécial » avec un de ses membres à la tête de la présidence transitoire (Tshisekedi sans doute), mais sans Joseph Kabila qui doit quitter le pouvoir au soir du 19 décembre.

Un accord qui reçoit le soutien des voisins

Un dialogue bis n’est évidemment pas du goût de l’actuelle majorité présidentielle (MP), plutôt satisfaite de l’accord signé avec la délégation de l’opposition (elle en sort clairement gagnante). Pour Patrick Kakwata (MRL), un député de la majorité, l’accord constitue « une avancée significative dans la résolution de la crise congolaise. » « Ce n’est plus le moment des discours politiques, mais le moment de travailler, a déclaré ce membre de la MP sur Radio Okapi. Il y avait manque de confiance entre acteurs politiques qui pensaient qu’on allait hypothéquer la démocratie et réviser la Constitution. L’accord a pourtant été clair : les élections auront bel et bien lieu. » D’autant plus que la majorité estime avoir « beaucoup donné » pendant le dialogue. Notamment concernant le couplage de la présidentielle aux législatives, ainsi que la priorité donné à la présidentielle par rapport aux élections locales, mais aussi sur la nomination d’un Premier ministre issu de l’opposition… un « cadeau » qui passe toujours mal chez certains caciques de la majorité. Le pouvoir se targue enfin d’avoir reçu le blanc-seing de leurs voisins africains, au cours de la réunion des pays des Grands Lacs (CIRGL), qui s’est tenu à Luanda le 26 octobre dernier – voir notre article. L’opposition présente au dialogue, qui a négocié âprement sa place dans le nouveau gouvernement, n’est également pas d’accord pour un nouveau dialogue et compte sur le respect des engagements de la majorité présidentielle pour tenter de convaincre les Congolais du bien fondé de l’accord.

Sortie de crise : à chacun sa solution

Alors que l’accord politique est toujours au milieu du gué, avant la future nomination du nouveau gouvernement, de nombreux acteurs politiques, associations, ONG, société civile, église catholique… s’activent pour promouvoir une sortie de crise. La Conférence épiscopale (Cenco), très active politiquement en RDC, cherche à reprocher les divergences entre les signataires de l’accord politique et le Rassemblement de l’opposition. Pour les évêques, les élections devraient pouvoir se tenir avant avril 2018 et le sort de Joseph Kabila devrait être clairement évoqué. Notamment sur le fait que l’actuel président ne peut pas briguer de nouveau mandat. Une clause qui aurait dû figurer dans l’accord.

Le retour de l’option Kengo

L’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ) demande également au président Kabila de ne pas violer la Constitution et de quitter le pouvoir en décembre. Mais comme d’autres ONG, ou partis politiques, l’ACAJ prône, à la différence du Rassemblement, pour l’application de l’article 75 de la Constitution congolaise, qui prévoit que l’intérim à la tête de l’Etat doit être assuré par le président du Sénat Léon Kengo. Une solution que plébiscitent également le collectif Tournons la page, ou l’ABACO, une des ailes historiques du mouvement créé lors de l’indépendance du Congo par Joseph Kasa-Vubu. Ce parti a récemment présenté une feuille de route qui passe par un dialogue « réellement inclusif et républicain, d’une durée de 30 jours au minimum et de 45 jours au maximum », toujours avec le président du Sénat au commande de l’intérim. Seul inconvénient soulevé par certains observateurs, le Sénat est hors-mandat et illégitime depuis… 2011.

Faireparlerlarue

Faire parler la rue

Un second dialogue est-il inévitable ? Il est sans doute trop tôt pour le dire. Le nouveau gouvernement n’est pas nommé et le nom du Premier ministre issu de l’opposition n’est pas encore connu. Même si ces deux éléments ne seront sans doute pas en mesure de convaincre le Rassemblement d’accepter les conclusions de l’accord politique, un hypothétique second dialogue se décidera sans doute dans la rue et dans les chancelleries. Pour faire plier le pouvoir et accentuer la pression, le Rassemblement a prévu de faire parler la rue en organisant de nombreux meetings : les 5 et 19 novembre et bien sûr après le 19 décembre, date de la fin du mandat de Joseph Kabila. Entre-temps, seul l’actuel président congolais pourrait faire bouger les lignes en annonçant son départ du pouvoir au soir du 19 décembre. Une option peu réaliste, qui, sans pression internationale et de la rue congolaise, ne semble être pas au menu du résident du palais présidentiel.

Christophe RIGAUD – Afrikarabia
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