*Le projet de loi des finances de l’Etat pour l’exercice 2018 est certes déposé en retard, et non à 15 jours de la fin de la session ordinaire de septembre en cours. La plénière d’hier mercredi 22 novembre à l’Assemblée nationale, aura été l’une des plus mouvementées de la session ordinaire en cours. Normal, quand on sait qu’après les deux vice-Premiers ministres, Emmanuel Ramazani Shadary et Léonard She Okitundu, c’est le Premier ministre Bruno Tshibala qui a été personnellement l’hôte de la Chambre basse du Parlement. Interpellé par le député Henri Thomas Lokondo à cause du retard observé dans le dépôt du projet de Budget de l’Etat pour l’exercice 2018, le Chef du Gouvernement devait donc présenter ses moyens de défense. Qu’un député national interpelle un membre du Gouvernement, fut-il Premier ministre, l’exercice rentre dans le classique du jeu parlementaire. L’initiative d’interpeller le Premier ministre par un membre de la Chambre basse du parlement est un droit que lui reconnaît l’article 138 de la Constitution du 18 février 2006 et qui s’exerce selon la procédure prescrite par les articles 171 à 177 du Règlement intérieur de l’Assemblée Nationale. L’article 171 stipule : "L’interpellation est une demande d’explication adressée au Gouvernement ou à ses membres, aux gestionnaires des entreprises publiques, des établissements et des services publics les invitant à se justifier, selon le cas, sur l’exercice de leur autorité ou sur la gestion d’une entreprise publique, d’un établissement ou d’un service public.Elle peut être initiée à tout moment de la session ordinaire.En session extraordinaire, l’interpellation ne peut avoir lieu que si elle est préalablement inscrite à l’ordre du jour fixé dans l’acte de convocation ". Par ailleurs, l’article 172 dispose : " Le député qui se propose d’interpeller le Gouvernement, ses membres, les gestionnaires des entreprises publiques, des établissements ou des services publics, fait connaître au Bureau de l’Assemblée nationale l’objet de son interpellation par une déclaration écrite." En ce qui concerne ce qui s’est passé hier à la Chambre basse, l’interpellateur du Premier ministre s’est déclaré insatisfait après la réplique de ce dernier. Mutatis mutandis, Henri Thomas Lokondo a demandé à l’homme du 7 avril 2017, de jeter le tablier. Au cas contraire, la procédure de sa démission, via une motion de censure, sera déclenchée ! Dans son argumentaire, l’élu de Mbandaka brandit l’article 126 de la Constitution, spécialement en son alinéa 3. Cette disposition de la loi suprême en RD Congo, enjoint l’Exécutif national de déposer le projet de Budget le 15 septembre, date d’ouverture constitutionnelle de la session ordinaire du parlement. Cependant, que le même texte de loi soit déposé le 20 novembre, Henri Thomas Lokondo estime que le Gouvernement aura ainsi péché contre les prescrits de la Constitution. D’où, sa menace d’initier une motion de censure pour contraindre le Premier ministre, et subséquemment toute son équipe, à rendre le tablier. CE QUE DIT LA CONSTITUTION Certes, la Constitution du 18 février 2006 prévoit les modalités de la démission du Gouvernement, en rapport avec le dépôt du projet de Budget. Le constituant dit clairement que si 15 jours avant la fin de la session de septembre, l’autorité budgétaire n’est pas toujours en possession du projet de loi des finances de l’Etat pour le prochain exercice, le Gouvernement est alors réputé démissionnaire. A la lumière de cette incise, des observateurs pensent qu’il n’y a plus de raison de chauffer le pavé. Le Premier ministre Bruno Tshibala a déposé le projet de budget le 20 novembre. Soit, à 25 jours francs de la fin constitutionnelle de la présente session, prévue pour le 15 décembre prochain. Sur cette base, on comprend bien qu’il s’agit d’un retard. Mieux, un cas de figure non réglementé par la Constitution. Sur ce point précis du décalage de date dans le dépôt de projet de loi, un saut dans un passé récent de l’histoire politique du pays est assez révélateur. Il renseigne donc que Bruno Tshibala n’est pas le premier Premier ministre qui dépose en retard, un projet de loi des Finances. En 2007, par exemple, le Patriarche Antoine Gizenga avait déposé son texte au bureau de l’Assemblée nationale mardi 27 novembre. Soit à trois semaines de la clôture de la session budgétaire d’alors. Pas tout. Un certain lundi 29 septembre 2015, Augustin Matata Ponyo, alors Premier ministre, déposait à son tour son projet de loi des finances de l’Etat pour l’exercice 2015, au bureau de l’autorité budgétaire. Il l’a encore fait le mardi 24 octobre 2016 (bien qu’expédiant les affaires courantes). Samy Badibanga n’aura pas fait mieux. Par induction, aucun Premier ministre n’a eu à déposer le projet de loi du budget à la date du 15 septembre, tel que l’exige la Constitution. Sans être une justification, ce retard récurrent s’explique par les contextes dans lesquels se préparent les projets de budget en RD Congo. Du point de vue historique, Bruno Tshibala a été nommé Premier ministre dans un contexte économique difficile, caractérisé par la baisse drastique des cours des matières premières, principales sources de financement du budget de l’Etat. Faudrait-il, en toute responsabilité, tenir rigueur à un Premier ministre nommé le 7 avril 2017, dans un environnement économique particulier que nul n’ignore, pour lui demander de déposer un projet de Budget le 15 septembre ? VOULOIR UNE CHOSE ET SON CONTRAIRE Qui plus est, on n’est pas dans un contexte constitutionnel classique. Secret de polichinelle, le Gouvernement Tshibala est un Exécutif sui generis. Il est donc issu de l’Accord du 31 décembre 2016. Sa mission principale est bien connue. En plus de l’amélioration du social des Congolais, l’équipe Tshibala doit réunir les moyens financiers nécessaires pour la tenue effective des élections tant réclamées à cor et à cri. S’acharner sur ce Gouvernement aujourd’hui, suppose que l’on devra tout chambouler et amorcer de nouvelles tractations politiques en vue de la formation d’un autre Gouvernement. Si c’est bien cela l’entendement de ceux qui sont pour la démarche du député Henri- Thomas Lokondo, on devra alors être conséquent quant à la suite. L’expérience démontre que les acteurs politiques congolais n’ont jamais trouvé de compromis en temps record. Des exemples à ce sujet sont légion. A titre d’illustration, les Consultations nationales convoquées en 2013 pour quinze jours, s’étaient étalées sur plus d’un mois. Un autre exemple, le plus récent, est celui des Dialogues de la cité de l’ex-OUA et du Centre interdiocésain. Ces deux forums en interne, prévus en leurs temps pour quinze jours, avaient duré plus de temps que prévu. Préconiser aujourd’hui, le schéma d’un nouveau Gouvernement, induirait que cela prendrait beaucoup de temps de concertations politiques. Au moment où le pays entier a l’œil rivé sur le calendrier électoral publié le 5 novembre par la CENI, nulle manœuvre politique de nature à grignoter le temps de ce chronogramme ne serait plus tolérable. Sauf si la manœuvre consisterait à vouloir à la fois une fois et son contraire. Pour le coup, les élections conformément aux échéances de la Ceni et leur report.
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