- Professeur émérite de droit pénal et doyen honoraire de la faculté de droit de l'Université de Kinshasa, Raphaël Nyabirungu mwene Songa a, à la faveur d'une conférence de presse à l'hôtel Invest à Kinshasa mardi 31 juillet 2018, choisi d'apporter sa contribution à ce débat.
Depuis l'acquittement en appel par la Cour pénale internationale -CPI- de Jean Pierre Bemba Gombo qui séjourne déjà à Kinshasa, une controverse est vite née en RD-Congo sur l'éligibilité de l'ancien vice-président à l'élection présidentielle du 23 décembre 2018, après sa condamnation définitive pour subornation des témoins par la Cour pénale internationale. Ce débat reste houleux dans tous les cercles de réflexion sociopolitiques au pays.


Professeur émérite de droit pénal et doyen honoraire de la faculté de droit de l'Université de Kinshasa, Raphaël Nyabirungu mwene Songa a, à la faveur d'une conférence de presse à l'hôtel Invest à Kinshasa mardi 31 juillet 2018, choisi d'apporter sa contribution à ce débat. Loin d'être un fait d'hasard, cette sortie médiatique est tombée la veille de l'arrivée de Jean Pierre Bemba dans la capitale. Au cours de ce moment d'échange avec les professionnels des médias, il a affirmé que la subornation des témoins rentre bel et bien dans la définition de la corruption au regard du droit pénal RD-congolais et des traités internationaux ratifiés par la RD-Congo.


Une assertion qui ne fait cependant pas l'unanimité dans la société savante. «Nommée différemment par le droit pénal positif RD-congolais, la subornation des témoins qui peut se croiser en certaines de ses déclinaisons avec la corruption, ne se confond pourtant pas avec cette dernière qualification...

Une forme de corruption n'est pas la corruption. Assimiler l'incrimination de subornation des témoins à celle de corruption, c'est faire l'analogie, laquelle est rejetée en droit pénal», a contredit le professeur Sam Bokolombe.

En RD-Congo comme ailleurs, le débat sur une possible éligibilité du sénateur Jean Pierre Bemba 
Gombo à la présidentielle de décembre 2018 bat son plein. Pour les uns, condamné pour subornation des témoins par la CPI, Jean Pierre Bemba tombe sous le coup de l'article 10 de la loi électorale disqualifiant toute personne condamnée pour fait de corruption. En revanche, d'autres personnes estiment que Bemba est éligible car la subornation est loin d'être une corruption.

En sa qualité de professeur émérite de droit pénal, Raphaël Nyabirungu mwebe Sobga s’est invité au débat pour apporter sa contribution. Dans cette optique, il a organisé une conférence de presse, mardi 31 juillet 2018 à 1 'hôtel Invest à Kinshasa, dans le cadre, selon lui, d'un lien nécessaire entre l'Université et la cité.

Dans son argumentaire, cette sommité du droit a confirmé que la subornation des témoins rentre bel et bien dans la définition de la corruption au regard du droit pénal RD-congolais et des traités internationaux ratifiés par la RD-Congo.

Pour le Pro Nyabirungu, si le code pénal RD-congolais laisse subsister quelques doutes sur le fait que la subornation des témoins ne relève pas de hi corruption, il n'en est pas de même avec les traités internationaux dûment ratifiés par la RD-Congo. «Ceux-ci font partie de notre arsenal juridique car notre droit est moniste», a-t-il fait remarquer.

Ainsi, il s'est appuyé entre autres sur la Convention des Nations unies de 2003, relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. Ici, il est demandé à chaque Etat partie d'adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infiltration pénale, lorsque les actes ont été commis intentionnellement.

L'orateur a soutenu que la, mise en œuvre d'une telle disposition par l’Etat RD congolais ne demande aucune initiative au réforme particulière dans la mesure ou la subornation des témoins qui est une entrave à la justice, est déjà une infraction au code pénal, en son article 129, et que toute autre formulation non prévue au code pénal est applicable par le juge RD-congolais, civil, militaire, du fait de la ratification de la Convention et de ses dispositions pertinentes.

Le Doyen honoraire de la faculté de droit de l’Université de Kinshasa a aussi recouru à la Convention de l'Union africaine du 11 juillet 2003 sur la prévention et la lutte contre la corruption. Citant la jurisprudence canadienne, Raphaël Nyabirungu a affirmé qu'«il n y a pas de mur entre subornation des témoins et corruption; il y a synonyme quand la finalité est l'entrave à la justice».

« L'entrave au bon fonctionnement de la justice dont la subornation des témoins n'est qu'une des modalités, rentre bel et bien dans la définition de la corruption, telle que définie par la Convention de l'Union africaine, dont la RD-Congo est un Etat partie», a soutenu l'expert en droit pénal.

Le traité de Rome, c'est un autre instrument international évoqué par Raphaël Nyabirungu qui, en son article 70, 1.c, parle des atteintes à l'administration de la justice, lorsqu'elles sont commises internationales accordent à la corruption au sens large et le lien intime entre la subornation des témoins et la corruption.

A en croire le professeur Nyabirungu, les cours et tribunaux, civils et militaires, appliquent les traités dûment ratifiés par la RD-Congo, conformément à l'article 153 alinéa 4 de la Constitution. Tout en citant l'article 215 de la Constitution, il a soutenu que les traités et accords internationaux dûment ratifiés ont une autorité supérieure à celle des lois. Le professeur Nyabirungu qui a refusé de personnaliser son intervention médiatique, a demandé aux Institutions publiques de tirer toutes les conséquences qui en découlent.

Source de droit, la doctrine reste divisée sur cette question

Cependant, cette question de l'analogie entre subornation des témoins et corruption, divise la doctrine qui est une source de droit. Le GREC, société savante, dirigée par .le tandem Tasoki-Kaluba, est d'un avis contraire à celui du professeur honoraire Raphaël Nyabirungu. Pour le professeur Sam Bokolombe, lors de sa sortie médiatique, son 'maître, le professeur Nyabirungu, n'a pas réécrit le droit pénal général.

Il en a fait une interprétation qui, de l'avis d'une bonne frange des juristes dont moi-même, semble distante de· notre propre doctrine constamment dispensée des décennies durant. J'en comprends la frustration, voire le désarroi», a-t-il réagi. De l'avis du professeur Bokolombe, conformément à la doctrine constante, la loi pénale est de stricte interprétation. «Nommée différemment par le droit pénal positif RD-congolais, la subornation des témoins qui peut se croiser en certaines de ses déclinaisons avec la corruption, ne se confond pourtant pas avec cette dernière qualification. Pour rassurer nos étudiants en droit et autres juristes formés par le Pr. Nyabirungu, une forme de corruption n'est pas la corruption.


Assimiler l'incrimination de subornation des témoins à celle de corruption, c'est faire l'analogie, laquelle est rejetée en droit pénal», a-t-il expliqué, démontrant que confondre ces deux notions est une faute de qualification pénale et, le cas échéant, un motif de cassation.

Par ailleurs, le professeur Sam Bokolombe demande à ceux qui s'attendent à l'inéligibilité de Jean-Pierre Bemba à l'élection présidentielle, de pouvoir surmonter deux obstacles juridiques majeurs. D'abord, prouver que la subornation de témoin se confond avec la corruption visée par l'article 10, point 3 de la loi électorale. Ensuite, apporter la preuve d'existence d'une décision judiciaire de sa condamnation définitive, c'est-à -dire ayant acquis l'autorité de la chose jugée, pour corruption.

Les thèses défendues par les deux professeurs de droit pénal sont loin de calmer la tempête car autant une frange de l'opinion épouse l'approche du doyen Raphaël Nyabirungu, autant une autre croit dur comme fer dans la démarche du Pr Sam Bokolombe. Ce dernier est rejoint par le Pr Jacques Djoli Eseng'Ekeli qui s'est penché sur la question, 24 heures avant la tenue du point de presse en vue d'éteindre la, mèche allumée par le juriste Jean Cyrus Mirindi.

Olitho Kahungu/AfricaNews

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