Pannes des machines à voter, fermeture de bureaux de vote, difficultés d’accès des témoins… le chaos logistique annoncé a bien eu lieu ce dimanche lors des élections générales. Un scrutin bâclé qui sera forcément contesté.

Désordre, confusion, désorganisation… on ne sait quel mot choisir pour qualifier les élections générales de ce dimanche 30 décembre en République démocratique du Congo (RDC). Depuis le début de la matinée, les dysfonctionnements s’enchaînent dans les différents bureaux de vote de ce vaste pays-continent : des machines à voter qui plantent, des milliers de bureaux de vote supprimés, des électeurs absents des listes électorales, des bureaux de vote sans procès-verbaux de résultats, des observateurs interdits d’accès… la liste des couacs est longue comme le bras.

Toute la journée n’a été que confusion dans de nombreux bureaux de vote congolais. A Dimbelenge, au Kasaï-Central, les machines à voter étaient à l’arrêt dès le matin. « Le mot de passe a été oublié par les agents de la CENI. A 10h13, le vote n’a toujours pas commencé » confie un témoin. A Bishange, dans le Masisi, quatre machines sur les neuf présentes sont tombées en panne. Résultats, les files d’attente s’allongent, retardant le vote.

« C’est se moquer du peuple congolais »
Dans l’Est, à Goma, c’est dans des poubelles que certains électeurs cherchent leur nom sur les listes électorales, rapporte un militant du mouvement citoyen Lucha. « Certains trouvent leur nom, d’autres pas. Tout est organisé pour se moquer du peuple congolais ». A Kalehe, au Sud-Kivu, au centre de vote EP Muhongoza, les batteries des machines à voter avaient rendu l’âme… dès 8h45 ! Laissant les électeurs perplexes. Dans le centre de vote de Dhele EP Bundikasa, bureau de vote D, à Bunia, la machine à voter a planté dès le tout premier votant. « Pas de machine de remplacement ». Les électeurs ont dénoncé une « tricherie planifiée ». A Manono, dans le Tanganyika, « pas de numéro 4 (celui de l’opposant Martin Fayulu) dans les machines à voter », dénonce un observateur.

Les machines à voter, décriées par l’opposition qui redoute des fraudes, ralentissent fortement le temps de vote des Congolais. L’analphabétisme et la faible connaissance de ces « tablettes » dans les campagnes congolaises souvent privées d’électricité, rendent les manipulations longues et périlleuses. Dans les bureaux de vote, on conseille aux personnes âgées et aux femmes, les électeurs les plus fragiles, de se faire accompagner par quelqu’un de confiance pour valider leur choix.

Les bastions de l’opposition ciblés
Dans l’Est et dans le Centre du Congo, plus d’un million d’électeurs n’ont pas été autorisés à se rendre aux urnes, notamment les habitants de la région de Beni au Nord-Kivu ou encore ceux de Yumbi dans la province de Maï-Ndombe. Certains pour cause de possibles violences, d’autres en raison de la maladie Ebola qui sévit dans la région. Privés de vote, ces Congolais ont organisé leur propre élection, de manière fictive, mais symbolique. Et ironie du sort, le vote s’est déroulé sans machine à voter… et sans dysfonctionnement !

Ces bastions de l’opposition ne pourront donc pas s’exprimer dans ce scrutin, au grand dam de l’opposant Martin Fayulu, qui dénonce « une énième stratégie du pouvoir pour détourner la vérité des urnes ». Plusieurs observateurs politiques constatent que le chaos logistique de ce dimanche est particulièrement ciblé dans les fiefs de l’opposition : Kinshasa, Lubumbashi, les Kasaï, l’Equateur et l’Est.

« J’ai déjà gagné » déclare Shadary
Tous ces dysfonctionnements vont forcément rendre le scrutin opaque. Sur les quarante millions d’électeurs, combien de Congolais ont pu voter ce dimanche, en excluant les 1,2 million des circonscriptions de Beni, Butembo et Yumbi ? Personne ne sait ce dimanche et ne saura sans doute dans les jours qui viennent. Pour le moment, la colère des Congolais qui n’ont pas pu voter, est restée limitée aux bureaux de vote concernés, même si des échauffourées ont été relevées à Kinshasa et que le président de la CENI, Corneille Nangaa a été conspué ce dimanche centre St Joseph.

Mais il va de soit que ce scrutin bâclé sera contesté par les perdants du scrutin. Car du côté du pouvoir, il fait peu de doute que ces élections étaient gagnées d’avance. Emmanuel Ramazani Shadary, a revendiqué la victoire à l’heure même de voter dimanche matin. « J’ai déjà gagné. Vous avez vu comment j’ai battu campagne, tout ce qui s’est passé. Je serai élu, c’est moi le président à partir de ce soir » a déclaré le dauphin de Joseph Kabila. Des propos qui laisse peu de suspense quant à identité du nouveau président congolais.

Christophe RIGAUD – Afrikarabia

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