Même si les deux déclarent avoir répondu à l'invite du Chef de l'Etat au nom de leurs partis, il n'en demeure pas moins que leur démarche tranche avec la position de Fayulu et Muzito.

" Il ya un temps pour tout. Un temps pour la guerre et un temps pour la paix. Un temps pour semer et un temps pour récolter…", déclare la Bible, livre de foi des Chrétiens, dans Ecclésiaste 3, 1-15. Après le désaccord né de la volte-face de Félix Tshisekedi, en retirant sa signature de l'accord de Genève en novembre 2018, Jean-Pierre Bemba a répondu favorablement hier mercredi 4 novembre, à l'invitation du Chef de l'Etat, dans le cadre des consultations des leaders politiques et sociaux, entamées depuis lundi dernier au Palais de la Nation. 

Il était 12h45, lorsque le chairman du Mouvement de libération du Congo (MLC), seul et très détendu, est entré dans la salle de consultations. Selon la presse présidentielle citée par Radio Okapi, les échanges entre Félix Tshisekedi et son hôte se sont déroulés en deux étapes. La première partie de l'entretien, considérée comme protocolaire, a eu lieu en présence des collaborateurs du Chef de l'Etat. Ensuite, Félix Tshisekedi et Jean-Pierre Bemba ont échangé pendant plusieurs minutes en mode huis-clos, loin du regard inquisiteur des membres du cabinet du Président de la république.

Au sortir de son face-à-face avec son hôte, Jean-Pierre Bemba a tout de suite déclaré son adhésion et son soutien total aux consultations initiées par Félix Tshisekedi. Tout en se réservant de tout commentaire, Le leader du parti de la fourmi s'est néanmoins félicité de son entretien avec le Chef de l'État qui, selon lui, s'est déroulé "dans un climat de convivialité".

Selon des sources sur place, Jean-Pierre Bemba est arrivé souriant au Palais de la nation souriant, à la mi-journée, accompagné de François Beya, le très influent conseiller spécial de Félix Tshisekedi en charge de la Sécurité. C'est donc un Jean-Pierre Bemba qui, après plusieurs semaines de "retraite" dans son fief sociologique de Gemena, dans l'actuelle province du Sud-Ubangi, qui a pris la résolution d'adhérer à l'initiative de Fatshi, officiellement amorcée en début de semaine en cours. 

Vu des analystes, la réponse favorable du président national du MLC à l'appel du Chef de l'Etat, est perçue comme une façon pour lui de négocier une nouvelle alliance avec ce dernier. Le but de la manœuvre étant pour Félix Tshisekedi de renverser le rapport de force à l'Assemblée nationale avec son (ex-?) partenaire de la coalition, le Front commun pour le Congo, la méga plateforme politique dirigée par le Président honoraire Joseph Kabila.

UNE PREMIERE DEPUIS L'ELECTION

L'entretien entre les deux hommes s'est achevé sans que Jean-Pierre Bemba ne prenne la parole devant la presse. L'opposant, qui a évoqué un " échange cordial", a simplement souligné qu'il soutenait "tout dialogue entre les Congolais", avant de repartir pour Gemena. 

Après les deux premières journées de consultations consacrées aux organisations de la société civile, aux institutions d'appui à la démocratie, aux confessions religieuses et à certaines personnalités, l'homme fort du MLC a été jusqu'hier mercredi, la première personnalité politique à participer à cette croisade du palais de la nation. Officiellement, sa rencontre avec Félix Tshisekedi est la première depuis l'élection de ce dernier en janvier 2019.

Deux jours après l'annonce de la participation de Moïse Katumbi, attendu à Kinshasa ce vendredi 6 novembre, Jean-Pierre Bemba est donc le deuxième leader de la coalition d'opposition Lamuka à accepter de participer aux consultations initiées par Félix Tshisekedi. 

Dans la configuration actuelle, sur le total de 500 membres qui composent la Chambre basse du parlement, ces deux leaders alignent le plus grand nombre de députés nationaux, sur l'ensemble de 80 sièges occupés par l'opposition. Une vingtaine pour Jean-Pierre Bemba et une quarantaine pour le regroupement politique AMK, cher à Moise Katumbi.

À MI-CHEMIN ENTRE KATUMBI ET FAYULU

Vu des observateurs, la participation de Jean-Pierre Bemba aux consultations politiques du Palais de la nation, est considérée comme un non événement. Cela pour plusieurs raisons. Premièrement, Jean-Pierre Bemba s'était montré très discret depuis ces derniers mois, limitant au maximum ses apparitions en public et ses interactions avec la presse.

Depuis sa sortie de prison et l'élection présidentielle de décembre 2018 - pour laquelle sa candidature avait été invalidée - Bemba avait semblé en retrait de l'arène politique. Occupé à la restructuration de son parti, du reste affaibli par ses dix années de détention à la CPI, le chef de file du MLC s'était tout de même offert un bain de foule remarqué lors de la manifestation populaire organisée le 13 juillet dernier par Lamuka, pour protester contre la désignation de Ronsard Malonda à la tête de la Ceni. 

Sans adopter pleinement la position "faisable" de Moïse Katumbi, tenant d'une ligne que le patron d'Ensemble pour la République qualifie de "républicaine", Bemba n'a pas non plus porté le discours jugé plus " radical " de Martin Fayulu, se montrant prudent dans ses différentes prise de parole.

Ce rendez-vous amorce-t-il un vrai rapprochement entre Jean-Pierre Bemba et Félix Tshisekedi ? "Ce sont des gens qui se connaissent depuis longtemps. Ils ont eu des désaccords depuis 2019 mais ils partagent aussi certains points de vue. Notre adversaire commun, c'est Joseph Kabila. Le temps de rééquilibrer les choses est peut-être venu, aujourd'hui, mais nous ne présageons encore rien, avant que le président de notre parti ne nous ait fait la restitution de son entretien avec le Chef de l'Etat", déclare prudent, un cadre du MLC contacté par la presse.

EST-CE DEJA LA "MORT" DE LAMUKA

La coalition Lamuka survivra-t-elle aux consultations du Palais de la Nation? En tout cas, c'est la question qui taraude l'esprit de nombreux observateurs de la scène politique congolaise, après l'avis très favorable de Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, à cette initiative de Félix Tshisekedi, leur ancien adversaire commun après le scrutin de décembre 2018. 

Même si les deux disent prendre part à ces consultations non pas au nom de lamuka, mais à celui de leurs partis politiques respectifs (MLC et Ensemble pour la république), il n'en demeure pas moins que leur démarche tranche nettement avec la position de Martin Fayulu et Adolphe Muzito, deux autres pions majeurs de Lamuka, sur une question fondamentale. Car, depuis la survenance de la crise politique après les dernières élections présidentielle et législatives, cette plateforme électorale née en novembre 2019 à Genève en Suisse, est porteuse d'une piste de sortie d'impasse, que les autres devraient promouvoir.

Or, Dans sa démarche actuelle, Félix Tshisekedi propose justement une alternative à celle de Lamuka. A ce jour, on retiendra que Martin Fayulu et Adolphe Muzito ne se sont pas encore officiellement prononcés quant à leur participation à ces consultations. Néanmoins, le coordonnateur actuel de Lamuka a été reçu à ce sujet, il y a encore quelques jours seulement, par le président Denis Sassou Nguesso du Congo-Brazzaville.

Sous réserve d'une éventuelle surprise qui ferait que Martin Fayulu et Adolphe Muzito acceptent finalement de prendre part aux négociations du Palais du peuple, au cas où ils y seraient formellement invités, il apparait dès lors que les quatre leaders de Lamuka ne parlement plus le même langage. Il y a deux visions. Bemba et Katumbi ont opté pour une opposition républicaine, alors que leurs deux autres coéquipiers sont restés dans la logique d'une opposition radicale. Fort de cette divergence essentielle dans la perception de la poursuite du combat politique de ses géniteurs, si Lamuka n'est pas déjà mort, alors il ne restera plus que deux leaders à l'incarner. A savoir Martin Fayulu et Adolphe Muzito, dans la mesure où Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba auront poliment choisi leur camp et quitté la barque battant pavillon Lamuka.

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