Depuis décembre 2020, le paysage politique congolais s’est profondément transformé. Félix Tshisekedi a réussi à rompre son alliance contre-nature avec l’ancien président Kabila, et a repris le contrôle de l’Assemblée nationale, du Sénat et de nombreuses Assemblées provinciales. 





Pour inverser les rapports de force et s’émanciper de son prédécesseur, le chef de l’Etat s’est constitué une nouvelle coalition, composée majoritairement d’anciens alliés de Joseph Kabila. Dans cette nouvelle configuration politique, 1.724 personnes ont été interrogées par le Groupe d’études sur le Congo (GEC) et la Fondation Berci. Le sondage a été réalisé dans 25 des 26 provinces entre le 14 et le 20 mars 2021.

L’enquête publiée le 15 juillet affiche des résultats très ambivalents. Côté positif, les Congolais se disent d’abord très satisfaits de la manière dont Félix Tshisekedi a décidé de mettre fin à la coalition CACH-FCC (80%). Plébiscitée également, la création de l’Union sacrée (USN) et le nouveau gouvernement Sama Lukonde dont 7 Congolais sur 10 ont une bonne opinion. La cote de popularité du président est également à la hausse. En mars 2021, 62 % des personnes interrogées estiment que Félix Tshisekedi dispose de tous les atouts nécessaires pour diriger la RDC, contre 50 % au mois de février 2020.


La gratuité de l’enseignement plébiscitée

Si une majorité de Congolais valide l’habilité politique du chef de l’Etat, ils applaudissent aussi à l’une des mesures phares du programme présidentielle : la gratuité de l’enseignement de base (29%). Cependant, estime le sondage GEC-Berci, la mise en oeuvre de la gratuité de l’enseignement de base ne convainc pas. 67 % des personnes interrogées « sont peu ou pas du tout satisfaits de la manière dont cette mesure est appliquée ». Une large majorité (75 %) reste cependant très favorable à la poursuite de cette mesure. La réforme de la justice, la fermeture des prisons de l’ANR, la lutte contre l’impunité et l’arrestation de Vital Kamerhe sont également appréciés par 17% des Congolais consultés.


Echecs dans la lutte contre l’insécurité et l’économie

Côté négatif, l’enquête souligne trois points noirs dans le bilan de Félix Tshisekedi : l’amélioration des conditions de vies qui se fait toujours attendre (44%), l’insécurité en hausse (28%), l’économie et l’emploi (13%). Dans ces trois domaines, les Congolais estiment que le président a, pour l’instant, échoué à réaliser ses promesses et inverser la tendance. La gestion de la crise du Covid-19 est également fortement critiqué. Notamment avec la mise en place du couvre-feu qui ne semble « pas ou peu adaptée à la situation » congolaise (64%).


Katumbi, Bemba, Fayulu challengers

Après la reprise en main de l’Assemblée nationale, du Sénat et la constitution d’une nouvelle coalition, il est intéressant de voir comment les Congolais perçoivent ces bouleversements, et comment les cartes se trouvent redistribuées à deux ans de la prochaine présidentielle. Premier enseignement : aucune personnalité politique n’émerge véritablement, même l’actuel chef de l’Etat. A la question de savoir quelle est la personnalité politique « la plus proche de 2020 », une majorité de Congolais répondent « personne », puis suivent Tshisekedi, Fayulu, Katumbi, Bemba, Kamerhe, Bahati… et Kabila. L’ensemble des ténors politiques, en dehors de Tshisekedi, voient leur cote de popularité baisser en mars 2021. Moïse Katumbi arrive en tête des bonnes opinions (61%), suivi de Bemba (49%), Fayulu (46%), Muzito (34%), Kamerhe (28%) et Kabila (16%).


Mukwege superstar

L’UDPS récolte les fruits de la bonne image du président Tshisekedi en se plaçant premier parti congolais. L’Ecidé de Martin Fayulu résiste bien, puisqu’il occupe la seconde place, ex-aequo avec Ensemble de Moïse Katumbi, dont le parti créé récemment n’a pas encore « imprimé ». Mais la personnalité préférée des Congolais, société civile et politiques confondus, reste sans contestation possible le docteur et prix Nobel Denis Mukwege avec 78% de bonnes opinions. Le premier politique est une surprise, puisqu’il s’agit de l’actuel locataire de la Primature, Jean-Michel Sama Lukonde (66%), suivi de Moïse Katumbi (61%) et (nouvelle surprise) de Eve Bazaïba (51%) qui coiffe son patron de 2%. Martin Fayulu occupe la 8ème place avec 46%.


Le FCC sans candidat

A un peu plus de deux ans de la prochaine présidentielle, les pièces maîtresses de l’échiquier politique commencent à se mettre en place. Sauf invité surprise, un quatuor déjà connu se dessine pour la course à la présidence : Félix Tshisekedi, Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba et Martin Fayulu. Pour le camp de l’ancien président Kabila, rien n’est encore fixé, mais l’enquête d’opinion démontre que, pour l’instant, l’ex-chef de l’Etat et son PPRD restent largement impopulaires. Un nouveau Shadary est-il en préparation pour représenter le camp Kabila ? Les ambitions ne manquent pas, mais à part Joseph Kabila, aucune personnalité n’a encore émergé.


Katumbi et Bemba empêchés?

Face à Félix Tshisekedi, restent Moïse Katumbi, dont la candidature pourrait avoir du plomb dans l’aile si la loi sur la « congolité » venait à être adoptée, et enfin Jean-Pierre Bemba, qui pourrait être empêché de se présenter après sa condamnation pour subornation de témoin par la Cour pénale internationale. Dans ce cas, l’option Eve Bazaïba pour représenter le MLC à la présidentielle semble envisagée, surtout au vu de sa popularité dans le sondage GEC-Berci.


CENI: attention danger

Candidat à sa succession, Félix Tshisekedi pourrait donc voir Katumbi et Bemba hors-jeu et se retrouver confronté à Martin Fayulu et à un candidat du PPRD. Une configuration optimale pour espérer briguer un second mandat. Mais attention, pour garder sa popularité, le président devra afficher un bilan plus présentable en 2023. Notamment sur deux fronts : l’amélioration de la vie quotidienne et la lutte contre l’insécurité à l’Est. Pour le premier dossier, le président tente de trouver des marges de manoeuvres financières, notamment auprès des bailleurs internationaux. Concernant le dossier sécuritaire, Félix Tshisekedi a instauré l’état de siège dans les trois provinces de l’Est touchées par les groupes armés. Une mesure qui peine, pour l’heure, à porter ses fruits. Mais beaucoup de ses détracteurs attirent l’attention sur la réforme de la Commission électorale (CENI) en cours. Une réforme contestée, qui donne la part belle au pouvoir en place, et qui, pourrait « influencer » le scrutin en faveur du président Tshisekedi… pour ne pas parler de « tripatouillages » dont la RDC à une solide expérience.


Christophe Rigaud – Afrikarabia

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