Le dilemme autour des sanctions contre le Rwanda pour son soutien présumé au M23 met en lumière des réalités géopolitiques complexes. Bien que la responsabilité du Rwanda dans cette crise soit documentée par l'ONU, plusieurs raisons expliquent la réticence de la communauté internationale à agir fermement :
1. L'influence régionale de Paul Kagame
Paul Kagame s'est construit une réputation d'homme fort en Afrique, jouissant d'une crédibilité auprès de certains alliés occidentaux en tant que dirigeant efficace et réformateur. Le Rwanda, malgré sa petite taille, est perçu comme un acteur stratégique dans la région des Grands Lacs. Beaucoup de nations hésitent à froisser un allié jugé stable dans une région instable.
2. Les intérêts géopolitiques et économiques
Le Rwanda bénéficie de soutiens étrangers, notamment de pays qui voient en Kigali un partenaire clé dans la lutte contre le terrorisme, le maintien de la paix (avec ses casques bleus) ou même l’accès à des ressources précieuses issues de la RDC. Cette dépendance stratégique ralentit toute volonté de sanctionner Kigali.
3. Un leadership congolais sous critique
La fragilité du leadership en RDC contribue également à cette impasse. Le gouvernement congolais peine à inspirer confiance sur sa capacité à gérer efficacement le pays ou à protéger ses ressources naturelles. De nombreux partenaires internationaux voient un problème structurel en RDC, attribuant la crise autant à ses propres faiblesses qu’aux interventions extérieures.
La dimension historique : un cercle vicieux de prédation
L’histoire récente de la RDC est marquée par des rébellions soutenues par des puissances étrangères. Depuis l'ère Mobutu, les dirigeants congolais ont souvent permis ou toléré des interventions extérieures qui ont fini par se retourner contre eux. Le soutien initial de Laurent-Désiré Kabila par le Rwanda et l'Ouganda illustre bien ce schéma. Lorsque Kabila a tenté de s’émanciper de ces alliances, cela a déclenché des conflits incessants, dont le M23 est l'un des derniers avatars.
Une Afrique silencieuse ?
Il est troublant de constater le silence de nombreux pays africains face à la situation en RDC. Si des puissances occidentales ou asiatiques exploitaient de manière aussi flagrante les ressources d’un autre pays, l’indignation serait probablement généralisée. Cependant, lorsque des nations africaines participent à ce pillage, elles bénéficient d’une relative complaisance, justifiée parfois par l’incapacité des dirigeants congolais à assurer la souveraineté de leur pays.
Quelle voie pour la RDC ?
Les Congolais ne peuvent plus compter uniquement sur des sanctions internationales pour résoudre leurs problèmes. Une solution durable nécessitera :
- Un renforcement de l’armée nationale : Réformer et professionnaliser les FARDC pour qu’elles deviennent une force capable de défendre le territoire.
- Une gestion exemplaire des ressources nationales : Les dirigeants congolais doivent prouver leur intégrité en mettant fin à la corruption et en utilisant les richesses du pays pour améliorer le quotidien des citoyens.
- Une mobilisation citoyenne : Convaincre la population que la défense de la patrie est une cause commune, au-delà des clivages politiques ou ethniques.
- Un plaidoyer international crédible : Adopter une diplomatie active et cohérente pour mettre en lumière les responsabilités extérieures tout en montrant des avancées sur le plan interne.
Conclusion : une justice sélective
La lenteur de la communauté internationale à sanctionner le Rwanda reflète une réalité où les décisions sont guidées par des intérêts stratégiques et non par des principes de justice. Cependant, la RDC ne peut se contenter de dénonciations. Il est urgent que le pays prenne son destin en main en renforçant ses institutions et en mobilisant ses citoyens autour d’un projet national. Car, au final, seule une RDC forte et unie pourra véritablement inverser la tendance.