(Par Maître Tunda ya Kasende Célestin, juriste et spécialiste en géopolitique)

Les Français viennent de se choisir un nouveau Président, le huitième de la cinquième république. Il s’agit d’Emmanuel Macron qui vient succéder à 39 ans d’âge, à François Hollande depuis ce dimanche 14 Mai 2017. Son parcours est certes époustouflant, car personne ne pouvait l’attendre maintenant, et sa large victoire peut susciter de l’espoir pour ses compatriotes et des interrogations pour les ressortissants d’autres pays.

Ainsi les défis qui attendent le nouveau président sont nombreux et immenses, à l’intérieur de son pays comme à l’étranger. L’Afrique l’attend donc sur ce tournant, particulièrement la République démocratique du Congo qui devrait savoir comment se comporter par rapport à ce nouveau pouvoir en France, en vue de recadrer sa propre politique étrangère en cette période qui annonce des réformes politiques dans le pays.

LA CONNAISSANCE DU NOUVEAU PERSONNAGE QUI VA COOPERER AVEC L’AFRIQUE ET LA RDC
L’homme est intelligent, et même mieux, il serait très brillant semblent dire la plupart des Français qui le connaissent ou qui l’observent. Mais en revanche, aucun élément de son parcours n’indique clairement quel type de président il pourrait bien être, car à priori, il devrait être insaisissable, et difficile de savoir réellement ce qu’il pense. Emmanuel Macron, représente donc pour beaucoup, exception non faite non plus à nous les Congolais, une véritable ÉNIGME. Ce que confirme, selon jeune Afrique, l’un de ses copains de la promotion SENGGOR de l’ENA : Emmanuel MACRON est très paradoxal. Ouvert en apparence, mais secret, empathique, mais ne se dévoilant jamais. Nous avons tous l’impression de bien le connaître alors que l’essence même de sa personnalité nous échappe. Personne, excepte son épouse, Brigitte, ne peut dire Qui il est vraiment et quels sont les ressorts qui l’animent.
Voilà en gros, le portrait du président français avec lequel notre pays va pouvoir travailler dans les différents dossiers de la coopération ainsi que dans la gestion des questions internationales, surtout chaque fois que le sort de notre pays sera concerne. Le peuple congolais à déjà tant souffert dernièrement des attitudes de deux derniers présidents français, à savoir Nicolas Sarkozy et François Hollande.
Le premier s’était prononcé, sans réserve requise en pareil cas, devant la Représentation nationale à Kinshasa, que le Congo devrait, pour être en paix, exploiter et partager ses nombreuses ressources avec les autres pays voisins. Du jamais vu évidemment ailleurs dans le monde. Tandis que le second, et le plus mystérieux, est venu carrément à Kinshasa en 2013, à l’occasion du XIVème Sommet de la francophonie, pour humilier les Congolais, et par ricochet, leur président, Joseph Kabila, comme si celui-ci n’avait aucune légitimité. La rupture entre la RD Congo et l’OIF n’avait été sauvée de justesse à l’époque que par la dextérité et la sagesse de l’ancien président sénégalais Abdou Diouf. Ainsi, nos services spécialises de même que nos diplomates devraient anticiper dès à présent dans leur action pour cerner l’énigme Macron car le Congo aura encore puissamment besoin de la France sur le plan international.

LA PERCEPTION DE MACRON ET LA POLITIQUE QU’IL POURRAIT MENER EN AFRIQUE
Emmanuel MACRON ne devrait pas connaître très bien l’Afrique, car n’ayant pas eu en charge les questions de développement lors de sa brève carrière à l’Exécutif français. Selon ses propres dires, il aurait visité l’Algérie et la Tunisie au Nord ainsi que le Nigeria où il avait passe son stage de fin de cycle de l’ENA en 2004. Ses conseillers lui ont déjà préparé un cahier de charges qui lui avait permis de dire notamment ce qui suit:c’est indéniablement le continent qui enregistrera les taux de croissance les plus importants et présentera les opportunités les plus fortes.
À au moins deux conditions. D’abord la stabilité politique et la paix. « Je suis très attaché à la stabilité des États, même quand nous sommes face à des dirigeants qui ne défendent pas nos valeurs ou peuvent être critiques. Je pense que nous devons définir une solution politique avant toute intervention qui, à défaut d’une vision pour l’avenir, conduit au désordre et à l’instabilité et peut se retourner contre nos intérêts et celui des peules concernés. Ceci est bien dit, surtout pour nous Congolais qui refusons toute forme d’immixtion, au nom de notre souveraineté.
La touche du célèbre Hubert Vedrine se fait sentir à ce niveau, lui qui est proche de Macron et qui lui fait comprendre que la démocratie en Afrique contient des diversités dont il faut tenir compte. La deuxième condition selon Macron pour la croissance de l’Afrique, c’est la maîtrise de la démographie.
« Dès les premières semaines de mon mandat dit il, j’engagerai une nouvelle politique en direction du continent africain, fondée sur la liberté et la responsabilité, avec des priorités claires : la sécurité, la lutte contre le changement climatique, les droits des femmes, l’éducation et la formation, les infrastructures, notamment pour l’accès à l’énergie et à l’eau, et le développement du secteur privé, en particulier celui des PME africaines, qui sont créatrices d’emplois », renchérit-il. Et de poursuivre « J’attends également approfondir nos relations avec les acteurs de la société civile et les opérateurs économiques. C’est vital » Il termine avec certains réseaux de connivence franco africains et des influences affairistes qui, on l’a vu, subsistent malheureusement dans le système politique français, en particulier, à droite. Heureusement pour les africains, Emmanuel Macron reconnaît qu’il faut en finir avec la pratique de la francafrique, bien que dans la réalité des faits ces méthodes ambigues n’ont pas disparu de la politique africaine de la France.
Mais dans tous les cas, les choses ont évolué et le nouveau Gouvernement français n’aura pas tout à fait les mains libres pour orienter l’Afrique à sa guise comme à l’époque de De Gaulle ou de MITTERAND. L’Afrique est aujourd’hui jalouse de son émancipation et ses dirigeants qui se détachent de plus en plus de l’emprise occidentale ne se privent plus d’occasion pour affirmer la souveraineté de leurs États. Le président Alpha Condé qui pilote actuellement l’Union africaine, a merveilleusement ressorti cette vérité sur la place publique en le disant sans se voiler la face à F. Hollande, chez lui à l’Elysée, que les Africains sont devenus matures et qu’on devrait les laisser gérer librement les affaires intérieures de leurs pays. C’est bien le cri de cœur, mieux le credo de la RD Congo depuis plusieurs années tel que le président de la République, Joseph Kabila, l’a répété lors de ses deux derniers discours sur la souveraineté du Congo.

AVEC MACRON, LA POLITIQUE EXTERIEURE FRANÇAISE EN RD CONGO : CONTINUITE OU CHANGEMENT QUALITATIF
La RD Congo connaît les mêmes réalités que les autres pays africains en matière de développement. De ce fait, avec l’accélération du terrorisme un peu partout sur le continent, l’Afrique et la France vont rester dans un lien étroit et direct. On le voit par exemple au Mali, la France ne s’en désengagera pas du tout à court terme.
À cause du terrorisme, certes pour protéger la France à distance du « djihadisme », mais la vérité c’est surtout la préservation de l’uranium et rassurer le club des pays du franc CFA. Dans notre direction, la politique extérieure de la France au Congo est toujours tributaire de l’histoire de la création de l’Etat indépendant du Congo (EIC).
La naissance de cet État, devenu plus tard RDC, est exceptionnelle dans l’histoire de la création des Etats modernes. Il s’agit de la création du Droit international né de l’Accord des puissances en 1885. Et, depuis lors, ces puissances ont les yeux tournes vers le Congo en ayant à l’esprit certaines conclusions de la conférence de Berlin, à savoir, l’occupation territoriale et la liberté de commerce dans le bassin du Congo.
En clair, avec Macron, les fondamentaux ci-haut vont rester dans une certaine mesure, car il faudra rechercher les filières de gain au Congo et continuer à y exporter les valeurs considérées comme sacrées par la France, telles que la langue, la liberté et la démocratie. Le nouveau président l’a déjà prévenu en des termes non voilés : les états africains ont adopté une Charte africaine pour la démocratie, les élections et la gouvernance, qui requiert le respect des principes démocratiques fondamentaux. Pouvons-nous renier les principes que les États africains se sont eux-mêmes donnés ?
À l’évidence, non. « Si je suis élu, je défendrai le respect des principes démocratiques fondamentaux partout en Afrique ». Mais il faudra tout de même relativiser toutes ces prétentions de monsieur Macron, particulièrement pour le Congo. À l’évidence d’abord, il faut souligner que la RD Congo n’a jamais ratifié la fameuse Charte africaine pour la démocratie.
À son temps, j’étais moi même au Gouvernement et nous avions estime que le moment n’était pas encore propice pour notre pays de la signer car elle pouvait être utilisée par les puissances étrangères comme un épouvantail pour justifier toutes sortes de menaces. Maintenant les choses ont évolué.
Une nouvelle gouvernance à vu le jour aux USA et un président africain défenseur de la souveraineté des États s’est installé à l’Union Africaine. En second lieu, et c’est le plus important, nous devrions aborder le langage de la raison avec la France de MACRON en examinant directement toutes les questions essentielles qui peuvent intéresser les deux parties.
La cartouche ultime concerne l’uranium. À 80 pourcent la France dépend de ce minerai hautement stratégique pour déployer de l’énergie sur l’ensemble de son territoire. Or, le Mali qui est le pourvoyeur principal de l’uranium à la France, à travers AREVA, est en proie à un terrorisme virulent qui ne peut pas rassurer l’ancienne métropole à court terme.
La RD Congo possède par contre, des potentialités non négligeables qui peuvent créer un cadre approprie pour les négociations politiques et stratégiques avec la France. La même réflexion est également valable en ce qui concerne le pétrole brut. Nos champs pétroliers sont encore presque vierges. Ce qui peut faire la joie de la société TOTAL si nous pouvions inciter d’autres négociations payantes à ce sujet.
La société française PERENCO se trouvant dans le bassin off shore à Moanda ne remplit pas les conditions requises pour rapprocher les deux pays ne fusse que par la modicité de sa production.
La RD Congo détient donc dans son patrimoine des instruments précieux qui devraient orienter sa politique étrangère et réussir à faire fléchir toutes sortes de pressions venant de l’extérieur. Le vrai lobbying est toujours mieux fait par les organes officiels de l’Etat par rapport aux groupes maffieux étrangers qui privilégient leur propre portefeuille. Or, la réforme constitutionnelle devra se faire au Congo.
La mise en œuvre de l’Accord de la saint Sylvestre nous a révélé clairement que le Raïs Joseph Kabila ne pourra pas abandonner la gestion du pays du jour au lendemain de n’importe quelle manière. Sinon ce serait l’embrasement généralisé du pays. En conséquence, il faut se préparer à booster une autre dynamique. Le Rwanda de Paul Kagame ainsi que le Congo de Sassou Nguessou ont réussi pacifiquement leur virage.
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