
C’est en paraboles qu’il a l’habitude de s’exprimer. Il n’a pas dérobé à sa règle lorsqu’il s’est confié, hier, à La Prospérité. Le Député national Justin Bitakwira se présente en penseur africain, griot de la République et éducateur social. Il se croit être investi d’une mission spéciale, à l’instar d’un certain Abraham, dans la tradition judéo-chrétienne, peu avant la destruction par le feu de Sodome et Gomorrhe. Il se met dans la peau de Noé, construisant son Arche, en prévision du déluge. Mais, le Congo, dit-il, ne doit pas disparaître parce que l’on cherche la tête de quelqu’un ou d’un groupe d’individus. Le dialogue, vu par Bitakwira, est une occasion de briser l’élan égoïste de ceux qui dirigent. Puisqu’il s’agit d’une question d’intérêt national, il est important de transcender les divergences de vue. Les craintes devant être transformées en matières soumises à la discussion. Dans un langage imagé, Justin Bitakwira compare la situation du peuple congolais, souvent trainé comme un dindon de la farce, à la légende du lézard et de la grenouille. Il fut un jour, raconte-t-il, le roi invita les deux créatures en consultation sur le sort de l’homme. Il fallait arriver le premier dans la cour royale pour que sa position soit prise en compte. Une condition, à priori, défavorable à la grenouille incapable de rivaliser d’ardeur avec le lézard qui court à grande vitesse. Mais, c’était sans compter que le chemin était plein d’obstacles. Après une course effrénée, voici qu’une rivière empêchait le lézard de poursuivre sur sa lancée. Bloqué, l’aide de la grenouille s’avérait nécessaire pour la traversée. Rusé, le lézard entreprit d’attendre la grenouille. Il fit un deal avec la grenouille afin que celle-ci le transporte sur son dos, et qu’une fois, sur l’autre rive, il lui laisserait la voie ouverte, en guise reconnaissance pour le geste. Le lézard, malheureusement, ne tint pas parole. Aussitôt sur l’autre rive, il reprit sa course et arriva largement en avance chez le roi. A la question principale, il répondit que les hommes sont tellement mauvais qu’après leur mort, ils ne méritent pas une seconde chance. Sa réponse, naturellement, n’était pas la bonne. Plusieurs heures plus tard, la grenouille fit son entrée dans la cour royale. Elle donna la réponse. L’homme devrait avoir droit à une nouvelle vie, pour lui permettre de se repentir. Malgré tout, la réponse de la grenouille ne fut pas considérée. Le peuple congolais, déclare Bitakwira, a passé du temps à transporter des ingrats et des malhonnêtes. Comme élément avant-gardiste, Justin Bitakwira, de son vivant, n’acceptera pas que le sang de la population coule inutilement. Kinshasa, d’après ce Député d’Uvira, a toujours été le point de départ de tous les conflits qui ont endeuillé le pays. En 1960, son grand-père n’aurait pas été tué si Lumumba et Kasa-Vubu n’étaient pas entrés en conflit. La guerre du 2 août 1998 a été déclenchée à Kinshasa. Les opposants qui refusent de discuter avec le Président Kabila ont tort, selon Bitakwira. Les évêques ont aussi tort pour exiger que le dialogue se déroule dans le respect absolu de la Constitution alors qu’en même temps, ils projettent des manifestations pour résister contre les atteintes à la démocratie. « Si un chimpanzé décide de se battre, cela signifie que le gorille n’est pas loin à intervenir. », lance-t-il. A son avis, les contestataires du dialogue savent ce qu’ils cherchent : le sang pour justifier le mal. Et, pourtant, la porte est encore ouverte, pour éviter que le peuple ne puisse continuer payer, presqu’indéfiniment, les pots cassés. Il affirme avoir la force du berger. Le berger, apprend-on, n’a pas besoin de montre. Il connaît l’heure par la position du soleil. Le berger lit les signes du temps. Bitakwira, également, scrute les signes du ciel politique en RDC. Il n’hésite pas à évoquer le souvenir de Mandela. Un grand, sinon le plus grand des dirigeants politiques africains. Alors qu’il avait la possibilité de briguer un second mandat, Nelson Mandela avait préféré se retirer. Il s’était interdit aussi de modifier les textes fondateurs de la jeune démocratie sud-africaine. Bitakwira qui trouve en lui-même, beaucoup de similitudes avec le parcours de Mandela, croit que le leader historique sud-africain est décédé un certain 5 décembre, le jour de sa naissance. Tous deux ont fait la prison. Mandela a été libéré le 11 février. Lui aussi avait été libéré, le même jour. Mandela, grand sportif comme lui, était celui qui avait vu juste, lorsqu’il fallait, par exemple, asséner le coup fatal contre le régime de l’apartheid, en proposant des issues consensuelles aux noirs, blancs et consorts, même quand la victoire lui était entièrement acquise. Ceci expliquant cela, Mandela et Bitakwira ont-ils, pour ainsi dire, le même le destin ?
La Pros.