Voyages à Bruxelles, Paris ou Belgrade, rencontres bilatérales et dîner à Kinshasa offert aux ambassadeurs de l’Union européenne (UE) accrédités dans la capitale congolaise… À quoi aura finalement servi l’offensive diplomatique lancée ces dernières semaines par Léonard She Okitundu, le nouveau ministre congolais des Affaires étrangères ?, se demande Jeune Afrique. D’autant que, lundi 6 mars, l’UE a rappelé aux responsables politiques et aux membres des forces de sécurité qu’elle est disposée à adopter de nouvelles mesures restrictives individuelles contre ceux qui seraient responsables de graves violations des droits de l’homme, inciteraient à la violence ou qui feraient obstacle à une sortie de crise consensuelle, pacifique et respectueuse de l’aspiration du peuple congolais à élire ses représentants. A la même occasion, l’UE a invité la Haute représentante à initier un travail dans ce sens.

Des conclusions « surprenantes », a réagi dans la foulée le chef de la diplomatie congolaise dans un communiqué. Contacté à Paris par Jeune Afrique ce mardi 7 mars, peu avant son retour à Kinshasa, She Okitundu a l’impression de n’avoir pas été entendu par ses homologues européens. « Durant toutes les rencontres que j’ai eues, je n’ai pourtant pas cessé de les appeler à bâtir désormais nos relations sur un dialogue franc et non sur des invectives à répétition », confie le ministre. « Sur la base de quel texte le Conseil de l’UE donne-t-il des injonctions à la RD Congo ? » lance le ministre, agacé. « Si l’UE ne change pas cette façon de faire, la RD Congo va en tirer les conséquences », menace le chef de la diplomatie congolaise. « Dès demain [mercredi 7 mars], je vais convoquer l’ambassadeur de l’UE en RD Congo [le diplomate belge Bart Ouvry] à Kinshasa pour lui demander des explications », annonce celui qui est également l’un des vice-Premiers ministres congolais.

L’UE constate que la crise institutionnelle, sécuritaire et socio-économique profonde que traverse le pays ne peut être maitrisée que par une mise en œuvre intégrale de l’accord du 31 décembre 2016 et par la constitution d’un gouvernement disposant de suffisamment de légitimité pour mener le pays aux élections. Des avancées concrètes sont impératives, en particulier la nomination urgente du Premier ministre issu du Rassemblement. Il est par ailleurs urgent d’assurer la mise en œuvre des mesures de décrispation telles que la libération des prisonniers politiques, la fin immédiate des maltraitances qu’ils subissent, la fin de l’intimidation et des arrestations arbitraires des opposants et activistes citoyens, et l’arrêt de toutes les poursuites judiciaires politiquement motivées. L’UE observe que la participation des femmes au dialogue politique a été limitée et appelle à faciliter leur implication dans la mise en œuvre de l’accord. Pour She Okitundu, « il est exagéré de parler de blocage de l’accord du 31 décembre 2016 dont la mise en œuvre, selon lui, est plutôt tributaire d’un débat démocratique classique dans une société pluraliste ». « Ce sont des négociations politiques, il ne s’agit pas d’appuyer sur le bouton et l’accord s’applique », dit-il, rappelant également que le décès inopiné d’Étienne Tshisekedi avait entraîné la suspension des pourparlers à Kinshasa, le temps des obsèques à Bruxelles.

Dans ses conclusions, l’UE a aussi condamné vivement les violations graves des droits de l’Homme qui ont été commises récemment en RDC et rappelle que la lutte contre l’impunité, quels que soient les auteurs de ces violations, est l’une des conditions nécessaires pour une transition apaisée et une stabilisation durable du pays. Les droits de l’Homme et les libertés fondamentales doivent être pleinement garanties par les autorités, en particulier la liberté d’expression, y compris pour les médias indépendants, ainsi que la liberté d’association. L’UE considère essentiel à cet égard que le travail du Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme en RDC (BCNUDH) puisse se dérouler sans entraves dans tout le pays. A ce sujet, le ministre se veut rassurant. Notamment concernant les militaires qui auraient tiré sur des civils dans le Kasaï (centre), dont les forfaits ont été relayés sur les réseaux sociaux : « Si leurs responsabilités sont établies, personne n’échappera à la justice », affirme She Okitundu. Et de conclure : « En RD Congo, il n’y a pas une politique délibérée de violations des droits de l’homme. Celles-ci relèvent de responsabilités individuelles qui ne sauraient, en aucun cas, rester impunies ».

(JMNK)
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