Outre le PPRD, avec la nouvelle loi électorale, qui pourra prétendre sérieusement se présenter à la présidentielle?

Plus personne ne l’ignore, la nouvelle loi électorale a introduit les seuils de représentativité.

Pour que la liste d’un parti ou d’une plate-forme politique soit prise en compte dans l’attribution des sièges dans une circonscription à plusieurs sièges, il faudra atteindre un certain seuil :

1% du nombre total des suffrages valablement exprimés au niveau national pour la députation nationale

3% du total général des votes valablement exprimés au niveau provincial

10% du total général des votes valablement exprimés au niveau de la circonscription pour les élections urbaines, municipales et locale

Il faut aussi savoir qu’à tous les niveaux de scrutins, si un candidat ou une liste totalise au moins la moitié des suffrages exprimés, il (elle) est retenu (e) d’office pour l’attribution des sièges.

L’introduction du seuil de représentativité exige, par conséquent, le regroupement des partis politiques pour accroître leurs chances de participer à l’attribution des sièges et d’en gagner plus dans le cadre des coalitions électorales. Dans le contexte actuel, pas évident qu’un parti politique seul atteigne aisément le seuil de représentativité nationale. Une dizaine de partis tout au plus peuvent prétendre à ce résultat sur base des chiffres de 2011…

Combien ça coûte ?

Mais le nerf de la guerre est toujours le même : l’argent ! Car une campagne, ce n’est donné et la nouvelle loi a encore gonflé le montant des dépôts pour être candidat.

1.600.000 FC, soit l’équivalent de 1000 USD par candidat présenté aux législatives nationales (députés et sénateurs). Pour couvrir l’ensemble du territoire national, le parti ou le regroupement politique doit donc verser 500.000 USD en frais de dépôt pour ses 500 candidats (500 sièges à pourvoir à l’Assemblée nationale). Soit 500.000 dollars.
Pour la députation provinciale, le montant à payer est de 1.000.000 FC, soit 625 USD par candidat présenté. Sur la base du chiffre de 711 députés provinciaux élus en 2006 (le total des députés provinciaux est de 780 dans lesquels il faut prendre en compte une septantaine de chefs coutumiers), le parti ou le regroupement politique devra réunir au moins 444.375 USD pour présenter des listes aux prochaines élections provinciales dans l’ensemble du pays.
Au total, pour les députations nationale et provinciale, le parti ou le regroupement politique qui désire présenter les listes des candidats dans toutes les circonscriptions doit réunir la somme de 944.375 dollars, arrondie à 1.000.000 de dollars au moins.

Dans ce contexte, les alliances seront vitales pour de nombreux partis qui mutualiseront ainsi leurs moyens pour limiter les coûts et couvrir l’ensemble du pays.

C’est pour quand ?

Selon le calendrier électoral, les dates de dépôt des candidatures sont les suivantes :
24 juin au 08 juillet 2018 : retrait des formulaires, dépôt et traitement des dossiers des candidats députés provinciaux
25 juillet au 08 août 2018 : retrait des formulaires, dépôt et traitement des dossiers des candidats présidents de la République et députés nationaux.

Et, évidemment, être candidat à la présidentielle coûte à l’inscription 50.000 dollars.

Contrôler les bureaux de vote

L’opposition, qui est de facto exclu de la gestion du pays mais aussi de la CENI, totalement entre les mains de la majorité présidentielle, va devoir chercher à s’appuyer sur des témoins qu’elle devra former et rémunérer pour s’assurer de la transparence et de l’équité des prochaines élections.

Encore une source colossale de dépenses et un travail de titan en vue d’identifier, de recruter et de former suffisamment à temps les témoins. Car dans un pays de la taille de la RDC il y a près de 90.000 bureaux de vote. Tout candidat à l’élection présidentielle doit être présent dans chaque bureau avec idéalement deux témoins. Les frais de formation, de déplacement et le montant nécessaire pour obtenir un original de procès verbal dans chaque bureau de vote donne une moyenne, après divers échanges avec des acteurs des précédentes élections, de 30 dollars par témoin, soit 2.7 millions de dollars !

Un parti aux ambitions nationales disposant d’un candidat à la présidentielle et devant présenter des candidats dans toutes les circonscriptions tant au national qu’au provincial doit dépenser en terme de caution ou de déposit pour chacun de ces candidats près de 1 millions dollars.

Des frais administratifs doivent être prévus pour que les mandataires de liste puissent déposer les listes des candidats dans chacune des circonscription après s’être assuré que les 1211 dossiers soient dûment complétés (photocopie de carte d’électeur, photo passeport, photocopie de diplome certifié, certificat de bonne vie et moeurs, etc.). Sur près de 200 circonscriptions, un forfait de 100 USD/liste est une moyenne puisqu’à la cinquantaine de circonscriptions à un seul siège, il faut penser à celle qui ont plus de 5 sièges pour lesquelles les démarches sont lourdes et astreignantes. Soit 20.000 dollars pour les mandataires de liste.

Bilan chiffré

Un candidat à l’élection présidentielle en RDC et son parti doivent décaisser près de 4 millions de dollars pour le dépot des candidatures et les témoins dans les bureaux de vote.

Ces montants ne sont que les frais d’inscription ! Il faut encore faire campagne. Dans un pays de cette taille, il faut prévoir des véhicules, des motos, le carburant et toute la panoplie du parfait candidat (calicots, affiches, photos, etc).

Le minimum que doit sortir un parti par candidat ? Selon nos entretiens avec différents responsables de partis, il faut compter un minimum de 2000 dollars par candidat. Le solde devant être amené par le candidat lui-même.

On repart avec les mêmes chiffres : 500 candidats aux législatives et 711 aux priovinciales soit 2,5 millions de dollars (en arrondissant un tout petit peu). Un montant à additionner aux 4 millions précédents. On arrive donc à un montant de 6,5 millions de dollars.

Qui peut se le permettre ?

Aujourd’hui, sur l’échiquier politique congolais, seul le regroupement des partis présidentiels peut se permettre de telles dépenses.

Des candidats déclarés comme Martin Fayulu ou Noël Tshiani ne peuvent envisager de partir seuls dans une telle aventure.

Seuls Moïse Katumbi et les partis politiques qui le suivent aujourd’hui (G7 et AR) peuvent prétendre débourser de tels montants.

Le temps des alliances est venu. Avec cette révision de la loi électorale, la majorité présidentielle a resserré à outrance les jeux et fait de son pire ennemi, Moïse Katumbi, son seul réel adversaire politique. On comprend donc mieux pourquoi la décrispation qui doit permettre le retour de Katumbi en homme libre au pays éprouve tant de difficultés à devenir réalité.

afrique.lalibre.be
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