Trois pistes s’offrent au président Joseph Kabila pour assurer son maintien au pouvoir : le dialogue national qui pourrait débuter mi-novembre, un référendum qui modifierait la Constitution et le glissement du calendrier électoral, déjà en cours. Explications.

Fin 2016, la Constitution congolaise oblige Joseph Kabila à passer la main et à quitter le pouvoir. Le chef de l’Etat ne peut pas effectuer plus de deux mandats consécutifs. Seulement voilà, en Afrique, plusieurs présidents cherchent à briguer un troisième mandat :
Sassou Nguesso, Kagame ou Nkurunziza, en défiant ou en modifiant la Constitution. A Kinshasa, l’opposition suspecte Joseph Kabila de vouloir rester dans son fauteuil après 2016, notamment en retardant volontairement le cycle électoral. En pleine crise politique, un dialogue national a été convoqué par Joseph Kabila pour trouver une porte de sortie et un calendrier consensuel. Calendrier qui devait en fait être proposé par la Commission électorale (CENI), seule organisme habilité dans ce domaine. Mais entre-temps, le président et le vice-président de la CENI, tous deux proches de la majorité présidentielle, ont démissionné. De quoi mettre en colère l’opposition, qui accuse ainsi le pouvoir de bloquer le fonctionnement de la Commission afin de faire glisser les élections.

Un dialogue mi-novembre

En attendant, un dialogue national se met péniblement en place. Après plusieurs mois d’atermoiement, la majorité aurait réussi à se mettre d’accord avec le principal parti d’opposition, l’UDPS, pour le faire s’asseoir à la table des discussions. Le dialogue pourrait se tenir à partir du 15 novembre à Kinshasa ou à dans la ville de Muanda avec pour facilitateur international, la Monusco, ou bien Saïd Djinnit, l’envoyé spécial des Nations unies dans les Grands Lacs. Après multiples rebondissements, l’UDPS a donc fini par accepter le dialogue après avoir d’abord nié toute discussion avec le camp Kabila, et retiré ses représentants du pré-dialogue. Ce « rapprochement » vers la majorité présidentielle a été mal perçu au sein même de l’UDPS, connu pour son intransigeance vis à vis de Joseph Kabila.

Partage du pouvoir ?

Que va-t-on discuter dans ce dialogue ? La présidence congolaise parle essentiellement de se mettre d’accord sur les élections, alors que l’UDPS, en plus des élections, compte bien évoquer « l’imperium » de leur leader, Etienne Tshisekedi, qu’il considère comme le vainqueur des élections chaotiques de 2011. Mais si Félix Tshisekedi, chargé des relations extérieures du parti, a bien prévenu qu’il ne participera pas au dialogue pour « partager le pouvoir » et « prendre des postes », c’est bien le risque que dénoncent les autres partis d’opposition comme le MLC ou l’UNC. Certains accusant même Félix Tshisekedi de vouloir négocier un poste de Premier ministre.

Si le dialogue échoue, il y a le référendum

Le dialogue pourrait également être le lieu où le chef de l’Etat cherche à trouver un consensus autour d’une modification de la Constitution. Un changement du texte fondamental qui pourrait lui permettre de briguer un troisième mandat. Selon un observateur de la vie politique congolaise, « Joseph Kabila va essayer de négocier son maintien au pouvoir pendant le dialogue, mais s’il échoue, il brandira la menace d’un référendum déjà prêt dans les cartons ». Deux députés de la majorité ont en effet déposé récemment un projet de loi permettant d’organiser des référendums en RDC « sur tous les sujets ». Mais personne n’est dupe à Kinshasa. Comme au Congo-Brazzaville voisin, un référendum pourrait modifier la Constitution et permettre à Joseph Kabila de se présenter à la prochaine présidentielle. Un scénario cocasse puisque le gouvernement affirme déjà ne pas pouvoir organiser les scrutins prévus dans le calendrier électoral… faute d’argent. Mais dans le nouveau budget voté dernièrement à l’Assemblée, une ligne budgétaire a été ajoutée pour l’organisation d’un possible référendum. « Il y aurait donc de l’argent pour un référendum et pas pour des élections » ironise notre observateur.

Si le référendum échoue, il y a le glissement

Le référendum constitue une stratégie risquée, et facteur de troubles. Nous l’avons vu au Congo-Brazzaville, l’opposition s’est fortement mobilisée contre le référendum voulu par Denis Sassou Nguesso. Comme à Kinshasa en janvier 2015, où d’importantes manifestations avaient été organisées contre la modification de la loi électorale qui pouvait retarder les élections. La police avait violemment réprimé la mobilisation populaire. Bilan : « au moins 42 morts » selon les ONG internationales. Mais après une semaine de trouble, le gouvernement avait reculé et l’article litigieux de la loi retiré. Face au risque de soulèvement populaire, Joseph Kabila pourrait alors se tourner vers le stratagème du glissement. Plusieurs indices montrent que ce glissement est déjà amorcé. Des problèmes financiers ont été avancés pour le report des élections locales. Le démembrement précipité des provinces a engendré le report de l’élection des nouveaux gouverneurs, toujours faute d’argent. Et enfin un porte-parole de la majorité, André Alain Atundu, a vendu la mèche récemment, en déclarant à l’agence Reuter « ne pas être en mesure d’organiser les élections ». Avant de conclure : « les gens doivent nous accorder deux à quatre ans ». La machine à glisser semble belle et bien enclenchée.

Christophe RIGAUD


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