* Des candidats, en désaccord avec la méthodologie proposée par la CENI, ont presque tous quitté la salle.

La deuxième rencontre hier mercredi 10 octobre, entre les membres du bureau de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), et les 21 candidats au scrutin présidentiel du 23 décembre prochain en RD Congo, a accouché d’une grosse souris. Les deux parties se sont séparés en queue de poisson. Une réalité que le vice-président de la Ceni, Norbert Basengezi, a refusé d’admettre, précisant que l’" échec de la rencontre d’hier n’aurait peut-être existé que dans les têtes de certains candidats ".

Tout ce que l’on sait, est qu’au cours de cette réunion, il a été question de mettre en place la Commission technique, conformément à l’option levée lors de la réunion de prise de contact, jeudi 5 octobre, entre le staff dirigeant de la Centrale électorale et les 21. En d’autres termes, on attendait à la rencontre d’hier, que chacun des 21 candidats président de la République puisse présenter son expert devant faire partie de ladite Commission technique. Malheureusement.
A la grande surprise de Corneille Nangaa, certains candidats ont, dès l’entame de la réunion, posé des questions n’ayant aucun lien direct avec l’objet du jour. Les uns sont revenus sur la légalité de la machine à voter. D’autres, sur la sempiternelle question des électeurs enrôlés sans empreinte digitale. D’autres encore, sur des aspects de financement du processus électoral en cours. Bref, un débat orienté dans tous les sens et totalement éloigné de son objectif initial.
Face à ce qu’il a considéré comme un Capharnaüm délibérément orchestré par certains candidats, le Président de la CENI a déclaré à ses hôtes qu’il ne trouvait plus de raisons de rester dans la salle et continuer un débat détourné de son objet. D’où, sa déception. Sa colère. Aussitôt, la salle se désemplissait petit à petit. Les candidats, y compris les représentants des postulants physiquement absents, quittaient le lieu de la rencontre, les uns après les autres.
Selon des sources sur place dans les installations de la CENI, seuls Gabriel Mokia et Yves Mpunga, étaient restés dans la salle, devant le secrétaire exécutif de la Centrale électorale qui leur expliquait le fonctionnement de la machine à voter.

" UNE PRESSION SUR TOUTES LES CENI DU MONDE ", FOI DE NORBERT BASENGEZI
Si certains pensent que les concertations entre la CENI et les 21 candidats Présidents de la République font du sur place, Norbert Basengezi note pour sa part, une avancée dans la bonne direction. " Nous avons beaucoup avancé en ce qui concerne le Fichier électoral. Tout le monde a compris qu’il y avait d’abord 1865 candidats, et maintenant plus de 2000 qui appartiennent à tous les partis et regroupement politiques. Ca fait environ un total de 6000 personnes. Ce qui représenterait 20% des candidats qui, soit n’ont pas d’empreinte digitale, soit ont été enrôlés avec des empreintes digitales illisibles. Quelle attitude adopter face à ces cas ? Un intervenant est même intervenu pour suggérer de laisser tomber le débat autour de cette question qui, selon lui, risquerait même de remettre en cause, les arrêts de la Cour constitutionnelle ", explique à la presse, Norbert Bansengezi au sortir de la salle.
L’adjoint de Corneille Nangaa ajoute que les candidats Présidents de la République étant d’abord respectueux de la loi, ne doivent pas aller outre mesure des prérogatives de la Ceni. " "L’article 22 des mesures d’application de la loi électorale reconnait à la CENI, le rôle qu’elle doit jouer dans la situation des électeurs ayant des problèmes de handicap ou ceux enrôlés avec des empreintes illisibles. Ce ne sont pas des irréguliers. Comme on a déjà affiché les listes, il appartient désormais aux candidats d’envoyer leurs témoins qui devront montrer la personne à radier ou à invalider. Mais cette démarche est illégale ", renchérit le vice-président de la Centrale électorale, ayant dans ses attributions les relations avec les partis et regroupements politiques.
S’agissant de la saga autour de la machine à voter, ici aussi, Norbert Basengezi met au défi quiconque démontrera les failles techniques et fonctionnelles qui cautionneraient la triche au prochain scrutin, comme certains le prétendent. " On a demandé à tout le monde de nous emmener leurs experts qui nous démontreraient que la machine à voter favorise la tricherie. Dire par exemple que quand un électeur appuie sur la photo du candidat n°66, la machine imprime le bulletin avec la photo d’un autre candidat non choisi. C’est ce que nous attendons. Il ne faut pas que la contestation ne s’arrête qu’au microphone des médias. Il faut plutôt prouver ce qu’on allègue. C’est ça l’ultime défi ", ponctue Basengezi.
A en croire le numéro 2 de la Ceni, ce n’est pas la première fois qu’une Commission électorale nationale indépendante soit sous pression. " C’est une pression qui est exercée non seulement sur nous, mais sur toutes les CENI du monde. Le rapport de l’OIF, par exemple, a été dirigé par le Général Sangari du Mali. Mais que n’apprend-t-on pas après les élections organisées dans ce pays ? Tout le monde tire sur le Fichier électoral, le même qui leur avait été donné par le même Général Sangari. Il en a été de même au Madagascar où les 21 candidats avaient décrié le Fichier électoral expertisé par le Général Sangari. Plus les jours avancent, plus les gens diront, soit qu’ils sont près pour le 23 décembre, soit qu’ils ne le sont pas encore. Mais la grande disposition, comme on parle du consensus, personne ne dit qu’il ne se présentera pas au 23 décembre. A preuve, aucun candidat n’a refusé de venir confirmer sa photo dans la machine à voter mardi dernier", a conclu Norbert Basengezi qui entrevoit l’horizon 23 décembre 2018 avec beaucoup d’optimisme.

DE LA LEGALITE DE LA MACHINE A VOTER
Faut-il aller aux élections de décembre prochain avec la machine à voter ? Si oui, quelle disposition légale prévoit le recours à cet outil informatique ? C’est donc cette problématique qui résume la polémique actuelle autour de cette machine.
A la CENI, on affirme qu’au regard des dispositions constitutionnelles, aucune disposition ne détermine les matériels de vote. La Constitution renvoie cette question explicitement à la Loi électorale. C’est le cas des articles 5 et 101 de la Constitution qui donnent pleine compétence à la Loi électorale pour toutes les questions en matière électorale. De ce fait, aucune disposition de la Constitution ne peut justifier le fondement à la contestation de la machine à voter.
Par ailleurs, la Centrale électorale s’appuie sur les premiers alinéas des articles 47 et 55 de la Loi électorale qui stipulent : " Le vote s’effectue soit au moyen d’un bulletin papier soit par voie électronique. Dans le cas de vote manuel, un bulletin de vote unique par scrutin et par circonscription électorale est établi par la Commission électorale nationale indépendante ".
Au demeurant, les dispositions légales sus-évoquées permettent à la CENI de faire usage de l’outil qu’est la machine à voter pour l’impression des bulletins de vote in situ, en toute légalité, étant entendu que le mode de scrutin n’a pas changé. Il s’agit d’un vote à bulletin papier. Le bulletin de vote est unique pour chaque scrutin et pour chaque circonscription électorale. Il peut être pré-imprimé avec les éléments d’identification des candidats ou vierge pour une impression par l’électeur au bureau de vote.
Des spécialistes de la CENI expliquent, en outre, qu’au regard de l’article 237 ter de la Loi électorale,ne peut servir de fondement pour le rejet de la machine à voter ; les termes "pour les élections en cours " utilisés à l’article 237 ter de la loi électorale est une disposition désuète qui ne peut s’appliquer au processus électoral actuel, le fichier électoral ayant été complètement reconstitué.
En effet, l’article 2, alinéa 1 de la loi portant identification et enrôlement des électeurs définit le cycle électoral comme étant une " période pendant laquelle se déroulent de manière ininterrompue les activités préélectorales, électorales et postélectorales pour les scrutins locaux, municipaux, urbains, provinciaux, législatifs et présidentiel sur la base d’un même fichier électoral. Le processus électoral en cours étant fondé sur un nouveau fichier électoral, constitue par conséquent un nouveau cycle électoral totalement différent de celui visé par l’article 237 ter de la loi électorale adoptée en 2015. Il s’ensuit que cette disposition légale, devenue obsolète et sans aucune utilité, ne peut s’appliquer aux prochains scrutins ni justifier le rejet de la machine à voter permettant l’usage de bulletins papiers ", argumente-t-on à la Centrale électorale.
La vérité est simple : cette disposition légale confuse et inutile est obsolète et totalement étrangère au processus en cours porté par un nouveau calendrier électoral et, par-dessus tout, fondé sur un fichier électoral totalement reconstitué avec cette conséquence qu’il s’agit d’un nouveau cycle électoral conformément à l’article 2 de la loi sur l’identification et l’enrôlement sus invoqué.

LA DISTINCTION DU VOTE ELECTRONIQUE DE L’USAGE DE LA MACHINE A VOTER
L’utilisation de la machine à voter, induit-elle ipso facto un vote électronique ? Quelle distinction faire entre les deux ? Selon l’encyclopédie ’’Wilkipédia’’, le vote électronique" est un système de vote dématérialisé, à comptage automatisé, notamment des scrutins, à l’aide de systèmes informatiques. Les normes juridiques, opérationnelles et techniques relatives au vote électronique du Conseil de l’Europe disposent " l’élection ou le référendum électronique qui implique le recours à des moyens électroniques au moins lors de l’enregistrement du suffrage. " tout en définissant l’enregistrement du suffrage comme étant "l’insertion du vote dans l’urne" ;
Ainsi par définition, la CENI explique que le vote électronique est nécessairement celui par lequel l’enregistrement des suffrages est fait par des moyens électroniques. En l’occurrence à travers une urne électronique qui est un "moyen électronique par lequel les suffrages sont stockés dans l’attente du dépouillement ".
Il découle de ce qui précède que l’enregistrement du vote, c’est-à-dire l’insertion par l’électeur de son choix dans l’urne est une composante substantielle de la détermination du caractère électronique du vote. De ce fait, un choix non enregistré ne remplit pas les critères d’un vote. Car il faut encore et surtout, qu’il soit enregistré par l’électeur pour être comptabilisé lors du dépouillement.
Fort de cet éclairage conceptuel, à la CENI, des voix s’élèvent de plus en plus pour déduire que le vote effectué avec la machine à voter reste un vote à bulletin papier. L’enregistrement du vote par l’électeur étant fait, non pas au moyen d’une urne électronique (virtuelle), mais bien par le biais d’une urne matérielle (physique) permettant au votant de s’assurer de l’authenticité de son choix.
Dès lors, la CENI conseille de retenir que la machine à voter met en place un vote à bulletin papier tel que prévu par les dispositions de l’article 47 de la Loi n°06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales telle que modifiée à ce jour.
En l’espèce, la procédure avec la machine à voter est exactement la même que celle du vote traditionnel utilisé lors des cycles antérieurs, avec pour unique différence le remplacement du gros bulletin pré-imprimé par un bulletin à format réduit qui imprime le choix de l’électeur au bureau de vote. En définitive, avec la machine à voter, il ne s’agit en aucun cas du vote électronique, mais bien du vote à bulletin papier.
Grevisse KABREL
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